Émeute populaire sur la Canebière

Gilets jaunes, marcheurs pour le Climat, habitant.e.s en colère contre la politique urbaine, lycéen-ne-s et minots de quartiers ont tenus, ensemble, la Canebière une bonne partie de la journée. Le lourd dispositif policier n’a pas suffit à contenir la grosse colère populaire qui s’est exprimée ce samedi 8 décembre 2018. Même si la journée se soldera quand même par une soixantaine d’arrestations...

Un gros dispositif de 600 flics et gardes mobiles, appuyés de 2 blindés de la gendarmerie était en place ce 8 décembre au matin pour protéger la marchandise et les lieux du pouvoir local. Certaines boutiques de luxe de la rue Paradis et de la rue Grignan ont préféré prendre les devant et ont décidé de ne pas ouvrir de la journée.

Matinée en jaune

Deux milliers de Gilets Jaunes partent du Vieux-Port à 11 heures, direction la préfecture. Manifestation tranquille avec des ambulanciers en tête de cortège. Et quelques un-e-s imposent aux autres les relents nauséabonds de l’extrême-droite drapée de jaune : drapeaux français à croix de Lorraine, discours contre l’action directe (« On doit défiler à visage découvert. Si on en voit qui cassent, ils seront sortis »), mots d’ordre anti-immigration (« D’abord la France, les autres après »), et illusoires slogans pro-police («  La police avec nous  »)... Bref une toute petite minorité que tout le monde gagnerait à faire taire, comme cela est fait à Paris depuis deux semaines.

Retour au Vieux-Port

De retour dans le centre, les Gilets jaunes tentent de se rapprocher de la mairie centrale ou de partir rue de la République direction le centre commercial "Les Terrasses du port", et c’est là, vers 14h, que les premières lacrymo sont tirées... Début des hostilités qui dureront plusieurs heures sur la Canebière. Les flics refoulent en effet les manifestant-e-s sur la Canebière. Des groupes de minots des quartiers sont déjà là et attendent que plus de monde rapplique. Un magasin de luxe se fait piller boulevard Longchamp. Charges et contre-charges se succèdent épisodiquement...

Vers 16 heures, plus de 5000 personnes reviennent de Castellane où les manifestant-e-s pour le climat épaulé-e-s par celles et ceux réclamant une autre politique de la ville (arrêt du chantier sur la Plaine, justice et logements pour les évacué-e-s de l’après drame de la rue d’Aubagne) aux cris de « Marseille, debout soulève toi ! », « Qui sème la misère, récolte la colère  », « Nous sommes tous des enfants de Marseille ! » « Gaudin, Macron, rendez le pognon ! » ou encore « Macron, Gaudin, ça sent le sapin ! »... Rue de Rome, de plus en plus de personnes se masquent et préparent leurs lunettes de piscines pour les gaz à venir... La jonction se fait sur la Canebière. Tout le monde a convergé.

Émeute sur la Canebière et alentours

Grande solidarité entre les différentes composantes. Les résidus de discours pacifistes se sont évaporés. Tout le monde est là, ensemble, pour en découdre. Trop peu de thunes, trop de mépris, désormais ce sera l’émeute populaire jusqu’à ce que le pouvoir lâche de l’argent. C’est le sentiment partagé sur la Canebière. Une voiture de location est enflammée en bas de la Canebière. Les flics se font pressants et gazent comme des malades. La BAC, habituellement décomplexée et toujours prête à la ratonnade, aujourd’hui casquée et solidement harnachée, s’attelle à protéger, en bons larbins, les boutiques de la rue St Férréol...

La boutique de l’OM est joyeusement pillée, à chacun-e son maillot. Un minot enfile à la va-vite sur sa tête le bonnet qu’il vient de sortir, ses collègues sont morts de rire : l’antivol est encore dessus et trône sur le haut de son front ! Pendant ce temps-là, plusieurs banques se font défoncer vitrines et distributeurs. Les sucettes de pub volent elles aussi en éclat.

La foule se fait repousser au niveau de la Soléam, au 49 de la Canebière. Toutes les vitres sont attaquées à coup de plots métalliques et de coups de pied bien sentis. Les manifestant-e-s entonnent le désormais célèbre « Tout Marseille déteste la Soléam !  ». L’infâme Gérard Chenoz pleurnichera quelques heures plus tard sur Facebook : « Il faut casser les casseurs » éructe-t-il. Certes Gérard, mais les "casseurs" dont tu parles sont les habitant-e-s que tu t’évertues déjà à casser et à chasser de leurs quartiers. Certain-e-s parlent déjà de « casser Gérard Chenoz » !! Bref, pas content que les marseillais-es s’en soit pris aux vitres de son joujou avec lequel il assassine les quartiers de Marseille. Étrangement, la mairie de secteur, située juste au-dessous, en prend aussi pour son grade : toutes les vitres sont tombées. Les élu-e-s s’indignent, ils ne comprennent pas. Ce sont bien les seul-e-s...

Tout autour du secteur, des affrontements durent plusieurs heures. Difficile d’en faire un résumé clair, tellement il s’est passé de choses. Ce qui est sûr c’est que les affrontements continuent, sporadiques, sur le Vieux-Port. Des barricades et des poubelles cramées. Les sapins de Noël en face de la Chambre de Commerce sont incendiés. Décidément ça devient une habitude... Noël aura-t-il lieu ?

La flicaille parvient cependant, avec ses blindés, à faire remonter tout le monde vers les Réformés. Les gens s’éparpillent un peu partout...

« Mes fins de mois sont difficiles, je dois faire mes courses de Noël, il est où le prochain magot ?! »

C’est le moment où la tendance "réappropriation populaire" prend clairement le dessus. Il est 17h30. Les jeunes cherchent où se trouve la marchandise à laquelle ils n’ont pas accès d’habitude. Mais le petit chaos généralisé et le peu de boutiques attrayantes en haut de la Canebière n’aboutira pas à grand chose. La gare, et ses échoppes, est donnée pour cible, mais le peu d’organisation collective empêchera d’y parvenir. Une bonne partie des manifestant-e-s sont pourtant disséminé-e-s dans les rues en-dessous. Rue Nationale, des barricades sont enflammées avec les poubelles, et un horodateur se fait dégommer à coup de lattes, les jeunes récupèrent la monnaie. Ça remonte vers la gare, avec toujours des feux de poubelles pour stopper la circulation et la progression policière. Puis tout le monde se disperse dans Belsunce.

Une demi-heure plus tard, rue d’Aix, plusieurs bijouteries se font piller par les minots. Pas un flic à l’horizon, normal, ils sont tous encore sur la Canebière où les affrontements continuent...

Les flics se concentrent sur Noailles, il est 18h30

Comme à l’heure habitude, les keufs aiment à se lacher sur Noailles à la fin des manifestations. Ils gazent, envoient les mastars de la BAC, mais ce ne semble pas très concluant. Nombre d’habitant.e.s continuent de les narguer et quelques poubelles partent en feu. Des groupes de jeunes bien mobiles tentent toujours d’accéder aux boutiques de la rue St-Fé, juste en dessous, mais se cassent les dents. Le jeu du chat et de la souris s’arrêtera vers 20 heures...

Une soixantaine d’interpellé-e-s et beaucoup de blessé-e-s

Un bilan assez lourd pour cette journée. Mais il faut dire que les flics s’étaient un peu mieux préparés sur Marseille. Sans doute les collectifs de la Street Medic Marseille et de la Legal Team publieront bientôt des bilans à ces sujets.

Solidarité avec tou-te-s les inculpé-e-s et les prisonnier-e-s du mouvement !! sera le mot de la fin !

PS :

Photos glanées sur internet...

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