Pour un regard construit et humain sur les faits psychiatriques. Droit de réponse

Un article collectif et collaboratif sur des faits psychiatriques à Marseille en réponse aux attaques du quotidien de la région La Provence dans son numéro du 05/09/2017 contre des personnes en situation de vulnérabilité psycho-sociale.

Droit de réponse
Pour un regard construit sur les faits psychiatriques

Suite à la publication d’un article de bas niveau sur des faits psychiatriques dans le journal La Provence le 05 septembre 2017 avec des photos et des désignations primitives des personnes qui souffrent des problèmes psychiques conséquents des contraintes sociales, économiques, familiales et institutionnelles, un groupe de collectifs de terrain s’est mobilisé pour lancer une pétition citoyenne contre cette nouvelle forme de maltraitance médiatique conduite par la direction de ce journal sans la moindre retenue ou humanité. Le lien ici : https://www.change.org/p/journal-la-provence-les-stigmatisations-dont-sont-victimes-les-usagers-de-la-psychiatrie?recruiter=778687411&utm_source=share_petition&utm_medium=copylink&utm_campaign=share_petition&utm_term=share_petition

Dans un esprit d’indignation et de proposition, le groupe des collectifs avait pris une initiative démocratique dans le cadre de droit de réponse à cet article insultant en envoyant un article à la direction du journal sans compter des appels téléphoniques pour publier cette réponse afin que l’opinion publique se fasse des représentations adéquates et réelles sur ces faits. Malheureusement, la direction du quotidien, par son silence violent, voire sa complicité, a refusé de donner une suite favorable. Le lien ici :
https://www.change.org/p/12222784/u/22250433?utm_medium=email&utm_source=petition_update&utm_campaign=228115&sfmc_tk=LBJflxL8rh%2bcVw46dbNtLT7f3wjeZpUvREU1hCHeNntwcIiRqi%2b7Tm7awINaEy9m&j=228115&sfmc_sub=153446862&l=32_HTML&u=41741272&mid=7259882&jb=1

Après quatre mois d’attente, le groupe des collectifs a refusé de laisser passer cet événement médiatique déplorable. Il a redéployé ses actions pour une large diffusion du texte de droit de réponse. Le lien ici : https://nomadescelestes.files.wordpress.com/2018/01/texte-droit-de-reponse-proposition-collective11.pdf

Le collectif Vérité et Justice pour Nathalie en lien avec tous les collectifs et associations du terrain qui se battent à Marseille et ailleurs pour la dignité des personnes victimes de la maltraitance psychiatrique et du sale jeu médiatique, invite toutes les sensibilités humaines et toutes les bonnes consciences à partager ce texte collaboratif qui par ses fondements et son sens exprime son indignation et sa solidarité effectives avec les victimes de la stigmatisation psychiatrique et médiatique et leurs proches. Par cet acte, nous renvoyons ce journal La Provence qui a refusé notre droit à s’appauvrir dans sa médiocrité et se discréditer dans sa complicité en agissant ainsi. Ses orientations sont symptomatiques de la crise de l’autonomie de la presse en France, déjà discréditée à l’intérieur et à l’extérieur.

Le texte du droit de réponse

https://nomadescelestes.files.wordpress.com/2018/01/texte-droit-de-reponse-proposition-collective11.pdf

Pour un regard construit et humain sur les faits psychiatriques

Suite à la parution de la Une de la Provence du 5 Septembre 2017 dernier, intitulé « Barjots, Schizo et les autres – Comment la société les gèrent ? », illustré d’une photographie mettant en scène une personne soumise au port d’une camisole, un grand nombre de personnes en souffrance psychique ainsi que leurs familles, se sont senties offensées et opprimées et ont pris l’initiative pour réagir et agir comme le démontre la mobilisation autour de la pétition mise en ligne par l’association les « Nomades Célestes », le 9 Septembre dernier.

L’association Les Nomades Célestes, ainsi que les acteurs signataires de ce texte (voir encadrés), qui travaillent au quotidien auprès de personnes en situation de souffrance psychique entendent ici répondre, collectivement avec fermeté intellectuelle et citoyenne active, à cette parution afin d’éclairer le débat relatif à l’accompagnement et à la compréhension des problématiques de santé mentale :

La société ne « gère » pas des personnes. Tout comme les structures ne « gèrent » pas les malades mais les « accompagnent » pour répondre à l’aide sollicitée soit par elle-même soit par leur famille.
Il n’y a aucun lien statistique entre actes meurtriers et le diagnostic de schizophrénie, bien au contraire, l’étude « The predictive value of risk categorization in schizophrenia », publiée en 2011, montre que les personnes concernées ne sont pas plus dangereuses que le reste de la population. Par ailleurs, si les personnes en situation de souffrance psychique sont surreprésentées en prison, c’est généralement pour des délits mineurs jugés en comparution immédiate. (Un fait mis en évidence notamment par Médecins du Monde dans le cadre de leur projet de recherche sur les « alternatives à l’incarcération »).

Le port de la camisole, qu’elle soit physique ou médicamenteuse est une pratique contraignante qui représente une réduction significative de liberté nécessitant un cadre médical, législatif et institutionnel pour un temps réduit. En outre, le traitement médicamenteux négocié n’a aucun rapport avec la camisole chimique.

Rappelons que la France est l’un des pays d’Europe dont les hospitalisations obligatoires sont en augmentation, comme le démontre l’étude de la démographe Magali Coldefy publié en 2017. Par ailleurs, l’espérance de vie des personnes souffrant de schizophrénie est réduite de dix à vingt ans par apport à l’ensemble de la population. Faits mis en lumière par l’étude réalisée par des chercheurs de l’université d’Oxford, publiée en 2014 dans la revue « World Psychiatry ».

Cet article est l’occasion de mettre en valeur le travail considérable réalisé par des structures associatives et des collectifs du terrain qui créent et amènent des solutions alternatives innovantes dans le domaine de la
santé mentale » avec l’implication des personnes concernées. C’est l’approche dite du « rétablissement » et d’appropriation par l’empowerment. Il s’agit de prendre en compte le vécu individuel et collectif des personnes concernées, en amont et en aval, d’apporter une attention particulière à leurs attentes et leurs besoins, afin qu’elles soient actrices dans le processus d’accompagnement et d’affranchissement. En effet, nombreux sont les outils considérés comme efficaces pour la majorité des usagers comme :

La satisfaction des besoins de base : Logement, environnement, lien social et culturel
Le soutien de l’entourage : Proches, amis, famille
L’aide des personnes paires présentes pour véhiculer leurs savoirs d’expérience sur la gestion des symptômes
La prescription médicale basée sur une relation d ’écoute du vécu dans sa complexité
Le renforcement ou l’activation du potentiel d’un sentiment d’utilité sociale

Par ailleurs, Mme Catalina Devandas-Aguilar, Rapporteuse de l’ONU, a souligné, dans son rapport préliminaire d’Octobre 2017, la nécessité de mettre en place un système de santé moins accès sur l’enfermement.
Personne n’est à l’abri de sombrer un jour dans une telle souffrance. Le décès d’un proche, un contexte familial compliqué, une situation financière difficile, et bien d’autres, font partie des aléas de la vie difficilement maîtrisables, rendant le développement de troubles psychiques possibles.
La revue « European Neuropsychopharmacology » , a publié une étude en 2012, qui indique que presque 1 français sur 5 est touché par la maladie mentale.
Si moi ou mes proches sombrent demain dans la souffrance psychique, devra-t-on moi ou mes proches m’enfermer dans le labyrinthe de la stigmatisation ou écouter mes besoins et valoriser mes potentialités ? Les lecteurs de la Provence sont en droit de poser le débat en ces termes.

Structures signataires

GEM les Nomades Célestes :

Les Nomades Célestes garantissent l’accueil des personnes en souffrance psychique et en situation de précarité. En effet, son but premier est de favoriser le rétablissement et l’empowerment des personnes accueillies, par l’intermédiaire de 3 pôles : La garantie d’un accueil inconditionnel participatif, la mise en place d’activité « d’empowerment », puis la sensibilisation du grand public aux enjeux de la participation des usagers, et à la lutte contre les stigmatisations.

MARSS :

MARSS (Mouvement et Action pour le Rétablissement Social et Sanitaire) est une équipe mobile de précarité et psychiatrie (EMPP) de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Marseille (APHM) composée d’une quinzaine de salariés. MARSS est né en 2005 d’une rencontre entre deux pratiques : celle de la psychiatrie communautaire de rue, et celle de la réduction des risques à Marseille, dans la rue également, mis en place par Médecins du Monde. MARSS développe depuis sa création différents projets expérimentaux dans différents domaines, ayant tous pour objectif de réduire les inégalités et les injustices, dans des pratiques orientées autour du rétablissement. MARSS a d’abord développé un travail de rue quotidien des 2005 à la rencontre de personnes ayant passé de longues années à la rue, puis a également développé des programmes d’auto-support par les pairs à l’hôpital et en ville (groupe d’entendeurs de voix, groupe prarano) et d’accompagnement à la maîtrise des moments de crise. Une équipe de recherche au sein de MARSS possède entre autres des compétences d’ingénierie de projet et d’évaluation de recherches orientées sur la santé au sein de la société.

Lieu de Répit :

Permet d’offrir aux personnes vivant une « crise psychotique » un milieu de vie calme, communautaire, proposer une approche visant à donner un sens à l’expérience subjective de la crise psychotique, accompagner la personne dans ses activités quotidiennes selon le principe « d’être avec » et « faire avec » ; favoriser l’absence de recours systématique aux traitements neuroleptiques, ou l’administration de faibles doses en favorisant plutôt les anxiolytiques qui altèrent moins les fonctions cognitives supérieurs et toujours avec l’accord de la personne ; permettre la présence permanente de professionnels et de bénévoles qui adhèrent à une vision existentiel et contextuelle de la crise sans la médicaliser/psychiatriser d’emblée . Le Lieu de Répit place l’auto-support et la pair-aidance comme pilier de son fonctionnement. Le séjour au Lieu de répit est un levier pour l’accès aux thérapies, au logement et à l’emploi grâce à l’intervention spécifique des acteurs expérimentés du lieu mais surtout grâce au travail de partenariat avec les équipes d’accompagnement.

COFOR :

Le CoFoR est un Recovery College, un lieu unique pour expérimenter de nouvelles expériences et développer des pratiques orientées rétablissement. Il s’adresse exclusivement aux personnes concernées par le rétablissement, c’est à dire aux personnes ayant ou ayant eu des troubles psychiques. Le concept de Recovery College, a été développé en Angleterre, se développe partout dans le monde et arrive enfin en France avec le CoFoR (Centre de Formation au Rétablissement). Les Recovery Colleges ont comme but de soutenir le bien- être et le rétablissement des personnes en valorisant le développement de connaissances et compétences, le partage de savoirs théorique et expérientiel, le soutien entre pairs et l’ancrage dans le local. Ce modèle ne remplace par les interventions thérapeutiques et psychosociales offertes et nécessaires dans le parcours de rétablissement de certaines personnes. Le Cofor c’est aussi un centre de ressources en ligne autour du rétablissement et en lien avec nos formations qui contient de nombreux outils.

Collectif Vérité et Justice pour Nathalie :

Lutte contre la maltraitance psychiatrique et les procédures d’hospitalisation psychiatrique sans consentement. Le collectif agit en synergie avec d’autres collectif à l’échelle régionale, nationale et internationale. Il était engagé activement dans la préparation de la visite de la Rapporteuse Spéciale de la CDPH-ONU en France surtout à Marseille.

Collectif Francophone pour la Prohibition Absolue

Le Collectif Francophone pour la Prohibition Absolue fait parti de la campagne internationale pour la prohibition absolue de l’hospitalisation et les soins sans consentement en application de la CDPH-ONU (voir https://absoluteprohibition.org). L’objectif de ce regroupement de personnes et de membres d’associations représentatives de personnes en situation de handicap psychosocial, (ex)usagers et survivants de la psychiatrie francophones et leurs alliés est de sensibiliser tous les acteurs et le grand public sur l’importance du respect des dispositions de cette Convention ratifiée par la France et les droits des personnes handicapées qui y sont consacrés. Seule une initiative du terrain venant de la part des personnes concernées elles-mêmes dont la voix doit être entendue peut faire avancer les droits humains de tous dans un esprit d’égalité et d’humanité.

Chef de service
Pr Jean NAUDIN, Hôpital St Marguerite, Bâtiment Solaris

Ce service dispose d’une Unité d’accueil dans laquelle 5 lits sont réservés aux patients en grande précarité (Unité Véga), une autre Unité Temps plein prend en charge de façon plus spécifique les personnes de moins de 35 ans présentant des troubles psychotiques (Unité Centaure).
Il dispose d’autres Unités fonctionnelles orientées vers la prise en charge ambulatoire et les alternatives à l’hospitalisation :
• une Équipe Psychiatrie Précarité (MARSS) travaille dans la rue auprès des patients présentant des
troubles psychiques et n’ayant pas de domicile
• une Équipe Mobile de Crise a pour but d’agir en amont et en aval des urgences pour intervenir à
domicile à la demande des familles (ULICE)

L’ensemble de ce dispositif tend à ne plus être centré sur l’hospitalisation temps plein et à intervenir sur un territoire plus vaste que le secteur d’attribution du service.

PS :

Nous revenons vers Marseille Info Autonome pour lui demander de mettre en ligne cette contribution collective dans le cadre de la réponse aux attaques du journal de la région La Provence du 05/09/2017 contre les personnes victimes de la maltraitance psychiatrique et de toutes les formes de stigmatisations, sociales, politique et médiatiques. Après plusieurs démarches auprès de la direction et la rédaction de ce quotidien pour demander notre droit de réponse, nous avons constaté un refus catégorique après plusieurs mois de silence violent.

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