Bientôt 2 millions de tonnes de déchets radioactifs. Le PNGDMR est une bouffonnerie

La non-participation au pseudo débat public sur le Plan National de Gestion des Déchets et Matières Radioactives qui vient de s’ouvrir est la seule attitude active pour condamner cette mascarade. Les choix de politique énergétique sont verrouillés depuis des décennies par l’industrie nucléaire et ses gouvernements successifs aux ordres.

Les choix de politique énergétique sont verrouillés depuis des décennies par l’industrie nucléaire et ses gouvernements successifs aux ordres. Conséquence : le débat public portant sur le pseudo Plan National de Gestion des Déchets et Matières Radioactives qui vient de s’ouvrir est une bouffonnerie. La nucléocratie veut bien que la population discute mais uniquement dans le cadre de ce qu’elle a déjà décidé et imposé. Les dés sont pipés encore une fois. La non-participation aux débats publics est la seule attitude active pour condamner cette mascarade. D’autant que la répression policière et judiciaire frappent durement les opposants.

En vertu d’une ordonnance du 3 août 2016, tous les plans d’envergure nationale doivent maintenant faire l’objet d’un débat public. C’est pourquoi le pouvoir organise un débat public, , pendant cinq mois, portant sur le Plan National de Gestion des Matières et Déchets Radioactifs/ PNGMDR [1]. Mais débattre n’a de sens que si les choix sur ce sujet ne sont pas déjà verrouillés. Or la seule solution réellement existante - l’arrêt de la production de déchets radioactifs - est exclue par les pouvoirs publics.

Enfouissement, entreposage des produits de fission atomique usés en piscine (les piscines sont vulnérables aux attaques extérieures) ou à sec, démantèlement immédiat des centrales nucléaires ou plus tard après baisse de la radioactivité, comment sécuriser pour des centaines de milliers d’années les installations de mort, et quid des transports, et des coûts pharaoniques, et des risques sur la très longue durée, des produits radioactifs mortels usés entreposés dans les piscines de refroidissement des centrales atomiques et à La Hague (Manche) à saturation d’ici 2030 [2]. Les nucléocrates ont engagé notre pays, ses habitants et les générations futures sur une voie de garage. Il faut leur retirer tout pouvoir de nuisance.

Les décisions essentielles sont déjà prises. Le débat ? : une mascarade.

Déjà, contre l’avis des citoyens, la majorité des parlementaires a entériné, il y a quelques mois, la Programmation Pluriannuelle de l’Énergie qui inscrit la prolongation de quasiment tous les réacteurs nucléaires au-delà de 50 ans. Pire elle programme l’implantation de nouvelles centrales atomiques dites de « nouvelle génération » à travers toute la France. Nouvelle génération dont la conception remonte, précisons-le, aux années 80 !

Et plus encore. Le lobby atomiste, aveugle à la réalité et à un avenir qui peut être libéré de la destruction atomique, a déjà organisé la suite. La PPE a inscrit la poursuite du traitement des déchets usés et hautement radioactifs de la fission nucléaire des réacteurs actuels, afin d’en généraliser l’utilisation sous forme MOX. Un mélange d’oxyde de plutonium (la bombe atomique) et d’oxyde d’uranium pourri. Ce Mox qui, fournit par Areva au japonais, rejette ses particules mortelles du ventre déchiqueté du réacteur n°3 de Fukushima-Daïchi toujours en perdition.

Autrement dit le gouvernement a décidé d’imposer à la population des décennies d’accumulation de nouveaux déchets et matières radioactifs. Dans ces conditions, demander à la population et aux antinucléaires de participer à la cogestion de ces déchets relève de l’indécence, de la manipulation, du double langage.

D ’autant que quelque soit la bonne volonté potentielle des membres de la Commission Particulière du Débat Public pour mettre en discussion l’ensemble des sujets et solliciter une expertise pluraliste : il n’existe aucun mécanisme contraignant qui garantisse la prise en compte des conclusions. Et l’expérience démontre implacablement qu’en matière de nucléaire, aucun pseudo-débat public (débats sur les déchets en 2005 et en 2013, sur l’EPR de Flamanville en 2007) n’a jamais permis de remettre en question les projets déjà décidés ailleurs [3]. D’ailleurs pour que les choses soient bien claires, Isabelle Harel-Dutirou, la présidente de la commission confirme « Etre pour ou contre le nucléaire n’est pas le sujet ».

Il ne s’agit donc pas d’un rendez-vous démocratique, loin s’en faut. Plutôt, encore une fois, une tentative du lobby atomiste et des politiciens complices, d’imposer à la population l’acceptation de la production des déchets de morts pour tous et pour des milliers de générations à venir. Ils ont créer un monstre et veulent le faire biberonner par les victimes.

Ainsi la production de déchets et les modes de gestion actuels et futurs sont déjà tracés et ce, depuis des décennies, tant pour l’Andra que pour les futures député-es et gouvernements. Le débat est bidon. Clos avant d’avoir commencé. Cadenacé. C’est si vrai que la secrétaire d’État à la transition écologique, Emmanuelle Wargon, a pu réaffirmer son soutien à Cigéo et déclarer sur « Europe 1 » le 26 janvier 2019 « A la question sur la bonne manière de gérer les déchets les plus radioactifs, on va retomber sur la solution qui est développée ici »

Cette pantomime politico-nucléariste qui s’assoie sur l’avis des citoyens veut utiliser les antinucléaires comme caution du jeu de dupes [4]. Mais dans le même temps les opposants au nucléaire et à ses projets démentiels subissent une féroce répression du pouvoir avec des blessé-es graves (mains et pieds arrachés par les grenades et tirs de LBD), des interdictions de vivre chez soi (familles interdites de leur ville et territoire), des condamnations financières, des emprisonnements, une surveillance policière devant les domiciles, des violations de vie privées (caméras policières qui filment à l’intérieur des maisons), des contrôles judiciaires absurdes, des procès à répétition. Autant d’actes institutionnels qui portent atteinte à la démocratie et au fondements de la liberté d’expression.

Refourguer des milliers de tonnes de déchets radioactifs dans des biens de consommation courante

Les industriels de la destruction atomique, Areva-Orano et EDF sous les auspices du Commissariat à l’Energie Atomique (CEA) cherchent à faire fructifier leur business tout azimut. Ils sont en faillitte mais, grâce à l’argent public soutiré aux trois derniers gouvernements (9 milliards pris dans la poche des contribuables), ils veulent aussi recycler, dans des biens de consommation courante et dans le bâtiment et travaux publics, leurs milliers de tonnes de métaux radioactifs, qu’ils qualifient de « peu contaminés ».

C’est que le site de stockage de leurs déchets (à Morvilliers dans l’Aube) sera certainement saturé en 2025/2028 (trois à huit ans plus tôt que leur propre prévision lors de la construction du stockage).

De Bure à Tricastin et un peu partout en France : chacun-e aura son quota de radioactivité supplémentaire pour des milliers d’années

L’Andra, sous la coupelle du lobby, propose ainsi de compacter un certain volume pour optimiser les capacités de stockage et l’Etat donne son feu vert à la prolifération d’une autre partie dans la vie quotidienne des français-es. Il s’agit, entre autre, des générateurs de vapeur à raison de trois unités de 500 tonnes pour chacun des 58 réacteurs se trouvant dans les 12 centrales atomiques d’EDF. Mais aussi des monceaux de métaux de l’ancienne usine d’enrichissement d’uranium Georges Besse 1 (plus de 140.000 tonnes) d’Orano-Areva, du Tricastin (Vaucluse-Drôme).

14 réacteurs nucléaires à minima vont devoir être arrêtés d’ici à 2035, de l’aveu même de EDF, chacun génère 10.000 tonnes de déchets radioactifs. Les deux-tiers sont dit de très faible activité mais non pas propres, neutres et sans dangers radioactifs. Ces déchets métalliques sont évalués sur la période 2015-2070 à plus de 900.000 tonnes. Mais comme sous la pression du lobby nucléaire et des Etats nucléarisés, un texte européen a fixé dernièrement un seuil (dit « de libération »), sous lequel ces matériaux toxiques pourront être « déclassifiés » et réutilisés dans des industries conventionnelles : la vie est belle pour la nucléocratie criminelle.

D’ailleurs, les fanatiques du nucléaire n’en ont rien à foutre de l’avis des populations. Pour preuve : depuis 2016, EDF a pris le contrôle d’ une entreprise suédoise (Studsvik) utilisant un procédé de traitement par fusion qui permet de concentrer la radioactivité dans les résidus, et de reconditionner les métaux en lingots qui sont ensuite réutilisés dans tous types d’industries. Y compris l’automobile.

Ce four à fusion, initialement prévu sur le site du Tricastin (Vaucluse-Drôme), où se trouve une filiale d’EDF déjà spécialisée dans le traitement des métaux contaminés (Socodei) sera construit finalement à Fessenheim (Haut-Rhin). Il est vrai que les vauclusiens et drômois, tout comme les gardois, gardent le souvenir de l’explosion d’un autre four qui, voici quelques années, avait tué, contaminé et mutilé des salariés sur leur territoire. Peut-être et certainement plus pratique pour le business de mort d’EDF qui verrait d’un bon oeil le traitement de volumes de déchets radioactifs en provenance … d’Allemagne. Et avec un coût du stockage relativement bas, autour de 500 euros par mètre cube contre 300 euros par mètre cube pour des déchets dangereux conventionnels ce serait une bonne affaire bien juteuse [5].

Mais déjà EDF et Areva-Orano, en complicité avec l’Andra, travaillent sur un nouveau centre de stockage quelque part en France. Un ou plusieurs d’ailleurs pour ne pas faire de jaloux parmi les députés de chaque région. Car il y a aussi les déchets de haute activité radioactive et ceux de moyenne activité radioactive à vie longue, radioactifs jusqu’à plusieurs centaines de milliers d’années. Ainsi EDF tente d’acheter à tour de bras des terres agricoles autour de ses sites atomiques. Ce n’est certainement pas pour y créer des terrains de golfs et des parcs aquatiques.

Vous en prendrez bien un peu dans votre jardin et sur votre balcon ? Il faut penser à léguer un héritage aux générations futures.

J.R

Notes :

[1Chaque PNGMDR dure trois ans

[2Depuis 2006, une loi a fait le choix d’un stockage géologique profond ayant donné naissance au projet d’enfouissement de poubelle atomique Cigéo, à Bure (Meuse).

[3Ce constat avait poussé, en 2013, trois membres de la CPDP à se désolidariser des conclusions.

[4Illusions : a) du côté de chez Greenpeace, qui a décidé de participer au débat, la position est très proche de celle de l’Autorité de sûreté nucléaire : « Nous sommes prêts à parler du zonage » ; l’organisation prône un entreposage à sec juste sous la surface en attendant des avancées de la science vers une meilleure solution pérenne. b) pas sûr non plus, comme l’interprète certains spécialistes « antinucléaires » ( Yves Marignac, directeur de Wise-Paris) que le projet de sur-générateur « Astrid » , développé sur Marcoule à coup de millions d’euros en provenance du « grand emprunt » de Sarkozy, soit abandonné dans cette feuille de route nucléariste.

[5En juillet 2019 la Cour des comptes doit publier son rapport sur le financement du cycle du combustible.

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