Capitalisme + Came = Génocide : Manifeste et programme du Young Lords Party

Nous devons apprendre notre histoire de lutte contre le génocide culturel et économique perpétré par les Yankees. La culture révolutionnaire, la culture de notre peuple est le seul enseignement véritable.

Nous reproduisons dans une série d’articles la brochure Capitalisme + Came = Génocide dans sa version de 2017.

En 1969, l’ex-toxicomane et membre du Black Panther Party, Michael Cetewayo Tabor écrivait Capitalisme + Came = Génocide, un texte devenu depuis lors incontournable sur les ravages de la drogue, en particulier de l’héroïne, dans les ghettos noirs de New York.

En 2015, nous avions publié une première édition de ce texte inédit en France et relativement oublié même outre-Atlantique. L’intérêt provoqué par la redécouverte de ce texte a conduit des compas mexicains à le rééditer, en y ajoutant quelques nouveaux éléments sur la lutte menée durant ces années-là à New York contre le fléau de l’héroïne, notamment au sein de la communauté portoricaine. Au vu de la déferlante des drogues industrielles un peu partout dans le monde, et à l’heure où l’argent qu’elle génére graisse l’ensemble des rouages sociaux et économiques, les réflexions qui ont traversé les mouvements révolutionnaires portoricains et afro-américains dans les années soixante et soixante-dix restent plus que jamais d’actualité.

C’est la raison de cette nouvelle édition : réfléchir de nouveau sur cette contre-insurrection cachée, et pouvoir tirer du passé quelques outils pour comprendre et affronter la situation actuelle, en se réappropriant notamment les savoir-faire et les usages nécessaires à l’émancipation de nos corps et de nos esprits. Que ces textes, réunis au gré des amitiés et des solidarités internationales, puissent susciter de nouvelles idées et s’enrichir de nouveaux partages.



Young Lords Party : Manifeste et programme en 13 points

Le Young Lords Party est un parti politique révolutionnaire qui combat pour la libération de tous les opprimés.

1. Nous voulons l’autodétermination pour les Portoricains, notre libération sur l’île et à l’intérieur des États-Unis.
Pendant 500 ans l’Espagne d’abord, les États-Unis ensuite, ont colonisé notre pays. Chaque année, des milliards de dollars de profit quittent notre pays pour les États-Unis. À tous points de vue, nous sommes esclaves du gringo. Nous voulons la libération et le pouvoir entre les mains du peuple, et non de celles des exploiteurs portoricains.
¡Que viva Puerto Rico libre !

2. Nous voulons l’autodétermination pour tous les Latinos.
À l’intérieur comme à l’extérieur des États-Unis, nos frères et nos sœurs latinos sont opprimés par le business amérikkkain. Les Chicanos ont construit le Sud-Ouest et nous soutenons leur droit à contrôler leurs vies et leur territoire. Le peuple de République dominicaine continue de lutter contre la domination gringa et ses généraux fantoches. Les luttes de libération armées en Amérique latine sont partie intégrante de la guerre des Latinos contre l’impérialisme.
¡Que viva la raza !

3. Nous voulons la libération de tous les peuples du tiers-monde.
Tout comme les Latinos réduits en esclavage d’abord par les Espagnols ensuite par les Yankees, les Noirs, les Indiens et les Asiatiques ont été réduits en esclavage pour édifier la richesse de ce pays. Pendant 400 ans, ils ont combattu pour la liberté et la dignité contre cette Babylone raciste (cet empire décadent). Les peuples du tiers-monde ont mené la lutte pour la liberté. Tous les peuples de couleur et opprimés du monde ne forment qu’une seule nation opprimée.
Aucun Portoricain n’est libre tant que tous les peuples ne le seront pas !

4. Nous sommes des nationalistes révolutionnaires et nous nous opposons au racisme.
À l’intérieur des États-Unis, les Latinos, les Noirs, les Indiens et les Asiatiques sont des colonisés qui combattent pour leur libération. Nous savons que Washington, Wall Street et les mairies tenteront de transformer notre nationalisme en racisme, mais les Portoricainssont de toutes les couleurs et nous ne cédons pas au racisme. Des millions de Blancs pauvres se dressent pour réclamer la liberté, et nous les soutenons. Nous organisons chacun les nôtres, mais nous menons la même lutte contre l’oppression et nous vaincrons ensemble.
Pouvoir à tous les opprimés !

5. Nous voulons que la communauté ait le contrôle de ses institutions et de son territoire.
Nous voulons que nos communautés soient sous le contrôle de notre peuple et que des programmes garantissent que toutes les institutions soient au service des besoins des nôtres. Le peuple doit pouvoir contrôler la police, les services de santé, les églises, les écoles, le logement, les transports et les aides sociales. Nous voulons que cessent les attaques contre notre territoire par la rénovation urbaine, les grandes routes, les universités et les entreprises privées.
La terre appartient à tous !

6. Nous voulons une véritable éducation qui nous enseigne notre culture créole et la langue espagnole.
Nous devons apprendre notre histoire de lutte contre le génocide culturel et économique perpétré par les Yankees. La culture révolutionnaire, la culture de notre peuple est le seul enseignement véritable.

7. Nous nous opposons aux capitalistes et aux alliances avec les traîtres.
Les dirigeants portoricains – ces marionnettes de l’oppresseur – n’aident pas notre peuple. Ils sont payés par le système pour conduire notre peuple dans une impasse, tout comme les milliers de macs de la pauvreté qui pacifient nos communautés pour les besoins du business, ou ces éducateurs de rue qui contribuent à la division et aux tueries entre gangs. Nous voulons une société dans laquelle le peuple contrôlera son travail de façon socialiste.
¡Venceremos !

8. Nous nous opposons à l’armée amérikkkaine.
Nous exigeons le retrait immédiat des forces armées et des bases américaines de Puerto Rico, du Vietnam, et de toutes les communautés opprimées, à l’intérieur comme à l’extérieur des États-Unis. Aucun Portoricain ne devrait servir dans l’armée américaine contre ses frères et sœurs, car la seule véritable armée des opprimés est l’armée du peuple en lutte contre tous les puissants.
États-Unis hors du Vietnam, Libérez Puerto Rico !

9.Nous exigeons la libération de tous les prisonniers politiques.
Nous exigeons la libération de tous les Portoricains, parce qu’ils ont été jugés par les tribunaux racistes des colons et non par leur peuple, par leurs pairs. Nous voulons que tous les combattants de laliberté soient libérés.
Libérez tous les prisonniers politiques !

10. Nous voulons l’égalité pour les femmes. Être un homme signifie être un révolutionnaire, pas un oppresseur.
Dans la société capitaliste, nos femmes ont été opprimées à la fois par la société et par nos propres hommes. La doctrine du machisme a été utilisée par nos hommes pour soulager leur frustration en se vengeant sur leurs femmes, leurs sœurs, leurs mères et leurs enfants. Nos hommes doivent soutenir leurs femmes dans leur lutte pour l’égalité économique et sociale, et doivent reconnaître que nos femmes sont à tous points de vue égales aux hommes dans les rangs révolutionnaires.
En avant, sœurs, luttons !

11. Nous combattons l’anticommunisme par l’unité internationale.
Quiconque résiste à l’injustice est taxé de communiste et condamné par « L’Homme ». Les nôtres subissent le lavage de cerveau de la télévision, la radio, les journaux, l’école et les livres, qui les dressent contre les peuples qui luttent pour leur liberté dans d’autres pays. Mais notre peuple ne croit plus dans ces attaques et ces mensonges, car ils ont découvert qui est leur véritable ennemi et qui sont ses véritables amis. Nous défendrons nos frères et sœurs qui combattent à travers le monde pour la justice contre les riches et les puissants de ce pays.
¡ Viva Che !

12. Nous croyons que l’autodéfense armée et la lutte armée sont les seuls moyens de parvenir à notre libération.
Nous sommes opposés à la violence – la violence des enfants affamés, des adultes illettrés, des vieux malades, la violence de la pauvreté et du profit. Nous avons demandé, nous avons adressé des pétitions, nous sommes allés devant les tribunaux, nous avons manifesté pacifiquement, nous avons voté pour des politiciens plein de promesses creuses. Mais nous ne sommes toujours pas libres. Le temps est venu de défendre la vie de notre peuple contre la répression par la guerre révolutionnaire contre les hommes d’affaires, les politiciens et la police. Quand un gouvernement opprime notre peuple, nous avons le droit de le renverser et d’en créer un nouveau. Les Boricuas se sont réveillés ! Que tous les porcs fassent attention !

13. Nous voulons une société socialiste.
Nous voulons la libération, des vêtements, de la nourriture, de l’éducation, des services de santé, des transports, des services publics libres et gratuits, et du travail pour tous. Nous voulons une société où les besoins de notre peuple passeraient avant tout, une société où nous apporterions notre aide et notre solidarité aux peuples du monde, et pas l’oppression et le racisme.

¡Hasta la victoria siempre !

Le programme de santé en dix points des young lords

1. Nous exigeons une autodétermination totale pour tous les services de santé situés à East Harlem (El Barrio) à travers la mise en place à la tête du Metropolitan Hospital d’un comité de direction composé de membres de la communauté et du personnel. (Le personnel inclut quiconque travaille au Metropolitan).

2. Nous exigeons le remplacement immédiat des administrateurs de Lindsay par des membres de la communauté et du personnel dont les pratiques ont démontré leur engagement à servir notre communauté pauvre.

3. Nous exigeons qu’on interrompe immédiatement la construction de la nouvelle salle d’urgence jusqu’à ce que le comité de direction communauté-personnel du Metropolitan Hospital ait inspecté et approuvé les travaux ou ait autorisé de nouveaux plans.

4. Nous voulons des emplois pour notre peuple. Tous les emplois disponibles à El Barrio doivent être occupés en priorité par ses habitants, en fondant l’activité et la promotion sur la formation des gens sur leur lieu de travail et d’autres moyens d’éducation.

5. Nous voulons une assurance santé gratuite et publique pour les traitements et la prévention. Nous exigeons la suppression de tous les honoraires.

6. Nous voulons la décentralisation totale ; les chefs de service devraient rendre des comptes au conseil de direction communauté- personnel.

7. Nous voulons des services de santé préventifs « porte à porte » se focalisant sur le contrôle de l’environnement et des conditions d’hygiène, l’alimentation, la toxicomanie, la santé des mères et des enfants et les services aux personnes âgées.

8. Nous voulons des programmes éducatifs pour tous afin d’informer sur ce qui crée des problèmes de santé : l’hygiène, la présence de rats, le mal logement, la malnutrition, les violences policières, la pollution, et d’autres formes d’oppression.

9. Nous voulons que le conseil de direction communauté-personnel du Metropolitan Hospital contrôle totalement la répartition du budget, la politique médicale en suivant ce qui vient d’être exposé, le recrutement, le licenciement et les salaires des employés, la construction des locaux et l’application du code de santé.

10. Toutes les communautés, tous les syndicats ou organisations ouvrières doivent soutenir tous les points de ce programme ainsi que travailler et lutter à sa réalisation, faute de quoi ils seront désignés comme ce qu’ils sont, des ennemis des pauvres de East Harlem.



Retrouvez la brochure complète imprimable ici :

Traduit par les Éditions Premiers Matins de Novembre et le Collectif Angles Morts
pmneditions@gmail.com + anglesmorts@gmail.com

« Capitalism plus dope equals genocide », 1969

Edition méxicaine : planetaria@riseup.net
http://www.bboykonsian.com/palante/Capitalismo-Droga-Genocidio_a36.html

Des éditions dans d’autres langues et d’autres pays sont en discussion. N’hésitez pas à nous contacter.

Illustrations de couverture et d’intérieur : Helios Figuerola Garcia h@putsh.one

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