Présentation de Guerre de Classe
Nous publions ici plusieurs articles (que nous avons traduits en français) provenant du AnarCom Network, un réseau de communistes anarchistes révolutionnaires basés en Grande Bretagne.
Ces quelques contributions démontrent une fois de plus que ledit « milieu anarchiste » ne s’aligne pas uniformément, et le doigt sur la couture du pantalon, dans la défense d’un camp bourgeois contre un autre. Ces contributions affirment clairement l’opposition de toujours des militants révolutionnaires à toute guerre capitaliste, ainsi qu’à son corolaire « la paix », que cela soit en « Ukraine » ou en « Israël/Palestine » ou encore ailleurs. Ils mettent en avant notre seule et unique réponse face aux guerres entre nations et/ou entités capitalistes : le refus du nationalisme, la défense de l’internationalisme prolétarien, le développement du défaitisme révolutionnaire sur le front militaire comme sur le front de la production, le soutien aux déserteurs, aux mutins, aux refuzniks de tous bords…
Contre les « défensistes » qui prennent position pour un camp bourgeois contre un autre (l’Ukraine contre la Russie et vice versa, la Palestine contre Israël ou le contraire, etc.), nous mettons une fois de plus en avant la nécessité pour les révolutionnaires de s’organiser, de se regrouper, de se rencontrer, de se clarifier, de renforcer notre communauté de lutte prolétarienne mondiale pour qu’ensemble nous forgions un pôle de référence dans la lutte de notre classe pour transformer la guerre (et la paix) capitaliste en révolution sociale mondiale.
Guerre de Classe
À la veille de l’invasion
Source en anglais : https://anarcomuk.uk/2023/10/23/on-the-eve-of-invasion/
Soldats ! Combattants ! Tous ouvriers !
Ils vous ont donné des armes pour vous entretuer ! Retournez-les contre ceux qui vous ordonnent de tuer vos camarades de travail pour satisfaire LEURS ambitions et LEURS profits !
Il est plus urgent que jamais de réaliser ce vieux rêve de la résistance internationaliste contre la guerre capitaliste. Refusez ce périodique bain de sang implacable de notre classe qui ne possède rien d’autre que sa force de travail et ne tire aucun profit de son propre massacre !
Un tel rêve n’est pas moins fantaisiste que l’idée que cette guerre apportera la paix ! Le sang ne lave pas le sang et mourir ne ramène pas les morts.
L’histoire est si ancienne qu’elle n’éclaire plus le présent. Quelle que soit la date à laquelle elle commence, il y a toujours la veille de ce moment. Seule notre expérience de ce que signifie l’exploitation de notre classe et du prix que nous payons pour ce « privilège » doit nous éclairer aujourd’hui.
Toutes les platitudes avancées par l’Occident sur la guerre de Gaza sont à l’opposé de ce qu’ils disent sur la guerre en Ukraine. La destruction et le génocide ne sont plus des « crimes de guerre » mais de la légitime défense. La défense de qui et par qui ?
L’obscénité de l’hypocrisie du Hamas, de l’État israélien et de leurs puissants bailleurs de fonds et commanditaires respectifs, cachée derrière leur opportunisme, est exposée dans leurs propos.
Le 19 octobre, le chef du Hamas (qui signifie littéralement « zèle », « ferveur »), Khaled Mashaal, a déclaré dans une interview accordée à la chaîne saoudienne Al-Arabiya : « Nous connaissons très bien les conséquences de notre opération du 7 octobre », ajoutant qu’« aucune nation ne se libère sans sacrifices ».
Lorsqu’on lui a demandé combien de vies palestiniennes le Hamas était prêt à sacrifier pour atteindre ses objectifs, il a fait référence à la perte de 30.000.000 de Russes pour vaincre l’Allemagne pendant la Seconde Guerre mondiale. Cela représenterait plus du double de la diaspora palestinienne dans le monde.
En mars 2019, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a déclaré à son parti politique au pouvoir, le Likoud (littéralement « la Consolidation ») : « Quiconque veut contrecarrer la création d’un État palestinien doit soutenir le renforcement du Hamas et transférer de l’argent au Hamas… Cela fait partie de notre stratégie visant à séparer les Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie. »
Le Hamas a le sang des Israéliens et des Palestiniens sur les mains ; Israël a le sang des Palestiniens et des Israéliens sur les mains. Ces mains ensanglantées, entrelacées depuis des décennies, sont celles qui vous donnent les armes !
La mort de 1.500 Israéliens est une tragédie, et le nombre croissant des morts Palestiniens (qui s’élève aujourd’hui à 5.000) est de plus en plus considéré comme une statistique. L’État « en place », Israël, et « l’État en attente », le Hamas, sont égaux dans leur indifférence à nos souffrances et à leurs conséquences.
Dans cette guerre, comme en Ukraine et en Russie, notre classe est comme un poisson dans son aquarium : c’en est fait de nous, quelle que soit la direction dans laquelle nous nageons. Les morts sont nos morts, les profits sont les leurs !
Alors que nos pertes s’accumulent, d’autres exploiteurs entrent en lice : le Hezbollah, l’Iran et même l’Irak se joignent à eux ou sont menacés par l’un ou l’autre camp. Comme si les travailleurs libanais, iraniens et irakiens n’avaient pas assez souffert.
Les travailleurs n’ont pas de pétrole, n’ont pas de ports, n’ont pas d’atouts géostratégiques – nous ne faisons que les construire et mourir pour eux. En fin de compte, nous avons le pouvoir de refuser de mourir et de reconstruire à nouveau, pour nos propres besoins et non pour les leurs.
Toute guerre est dirigée contre notre classe, quel que soit le côté de la barrière ou de la frontière où nous nous trouvons. Refuser de se battre et de mourir dans une guerre pour le pouvoir, le profit et la cupidité n’est pas seulement le rêve de notre classe, mais une nécessité historique !
Chaque front est le front de la guerre de classe. La solidarité de classe est notre seul espoir de survie ! « Non à la guerre sauf la guerre de classe » n’est pas un appel mais un manifeste !
On a oublié une guerre ou quoi ?
Source en anglais : https://anarcomuk.uk/2023/10/19/did-we-forget-a-war-or-something/
L’horreur du massacre (largement unilatéral) de la guerre entre Israël et Gaza a capté l’attention de l’opinion mondiale, canalisée par les politiciens et une machine médiatique obscène.
A-t-on oublié l’autre guerre en Europe ? Se souvient-on même de la dizaine d’autres guerres qui font rage du Sahel au Soudan, de la RDC au Yémen, du Haut-Karabakh au Myanmar ?
Le monde est un gigantesque abattoir. L’endroit où nous portons notre attention est aussi politique que les conflits eux-mêmes. L’Ukraine est le nouveau bastion de l’Occident à la frontière orientale de l’Europe, Israël, son bastion historique au Moyen-Orient.
Que les djihadistes islamistes du Hamas aient commis des atrocités innommables ne peut être nié que par les fanatiques islamistes, les fascistes et les antisémites. La question la plus importante n’est pas de savoir comment ils sont sortis du siège de Gaza, mais comment ils ont fini par contrôler Gaza en premier lieu ? La réponse est paradoxalement Israël.
Pendant 30 ans, à partir des années 1970, la politique palestinienne d’Israël, soutenue par l’Occident, a consisté à éradiquer la résistance laïque à l’occupation. La libération nationale et le panarabisme étaient considérés, au plus fort de la guerre froide, comme un bras armé de la politique étrangère soviétique.
Leur guerre contre les fractions Fatah et Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) s’est traduite par des détentions massives sans procès, des assassinats dans le pays et à l’étranger et l’invasion sanglante du Liban en 1982. La campagne visant à expulser l’OLP hors du Liban a coûté la vie à 30.000 personnes, dont 3.000 civils massacrés par leurs alliés des milices chrétiennes dans les camps de réfugiés de Sabra et Chatila à Beyrouth.
Cette politique consistait à encourager l’opposition islamiste naissante afin de semer la division, d’affaiblir davantage l’OLP et de la contraindre à négocier. Les accords d’Oslo de 1993 ont transformé les combattants en administrateurs civils de ce qui est devenu l’Autorité palestinienne.
Il s’en est suivi 30 ans de paix, de promesses non tenues, d’expulsions continues et d’implantations illégales, soutenues par la force brute et la discrimination. Un système de facto à deux niveaux et un seul État plutôt que la « solution » à deux États.
L’analogie avec le régime d’apartheid sud-africain est souvent évoquée. Le racisme est aussi répandu en Israël que partout ailleurs. Il existe également une hiérarchie entre les juifs européens, les juifs d’Europe de l’Est, les juifs d’Afrique de l’Est transportés par avion et les « autres » juifs. Les relations à l’intérieur du pays sont tiraillées par le racisme, même au sein des communautés juives. Le racisme est encore plus concentré sur les 20% d’Israéliens qui sont Arabes, contre lesquels l’extrême droite – avec des représentants au gouvernement – appelle à des attaques, quel que soit l’âge.
La diaspora palestinienne des « territoires occupés » n’est même pas assez importante pour faire l’objet d’un plan de « développement séparé » comme dans le cas de l’apartheid. L’analogie est moins efficace que la réalité de l’occupation, du racisme et de la discrimination. Quels que soient les mots que l’on cherche pour la décrire, ils sont moins pertinents que l’impact – douleur, dislocation et désespoir. Le désespoir défie toute analogie.
C’est dans ce contexte qu’ont émergé une administration palestinienne largement docile ainsi que les zélotes rebelles du Hamas et du Jihad islamique à Gaza et du Hezbollah au Liban. Depuis lors, l’occupation, les rébellions périodiques, le terrorisme et la répression règnent en maîtres.
La marche d’Israël vers la droite populiste, qui dure depuis une décennie, n’a fait que rajouter du carburant et le 7 octobre a été la date de la mise à feu. Le sentiment de supériorité arrogant que la droite israélienne tire de la provocation l’a rendue aveugle à cet assaut barbare.
« C’est la bataille de la civilisation », a annoncé M. Netanyahu à la veille d’une invasion qui alourdira considérablement le bilan actuel des 16.000 victimes, dont 4.000 morts à Gaza et 75 en Cisjordanie.
L’assaut est déjà implacable. Si la responsabilité d’Israël dans l’attaque contre l’hôpital Al-Ahli peut être contestée, le fait qu’Israël ait continué à bombarder le sud de la bande de Gaza, alors qu’un million de personnes ont été contraintes de s’y réfugier pour se mettre à l’abri, ne l’est pas.
Le Hamas a déclaré qu’il ne détenait pas d’otages, mais seulement des « prisonniers de guerre », notamment des enfants, des bébés, des personnes âgées et des handicapés. Les deux camps considèrent chaque personne comme un combattant. Les travailleurs de la « rue palestinienne » sont aussi vulnérables (voire plus nombreux) que les jeunes massacrés par le Hamas lors d’un festival de la paix, aux yeux des bellicistes de l’État israélien et du mini-État islamique du Hamas.
L’hypocrisie impitoyable du pouvoir capitaliste et de ses guerres est démontrée dans la réponse de l’Occident. Alors qu’ils sont restés étrangement silencieux sur leur guerre en Ukraine (peut-être sont-ils reconnaissants pour la diversion qui leur est offerte concernant l’échec de l’offensive ukrainienne), ils s’alignent sur Israël, au moment où Gaza est rasée, pour saluer précisément ce qu’ils ont dénoncé comme des crimes de guerre en Ukraine.
Le fait que deux États dotés d’armes nucléaires envahissent leurs voisins devrait tous nous terrifier. D’autant plus que ce conflit risque d’attirer l’Iran, principal allié de la Russie dans son invasion et aspirant lui-même à la puissance nucléaire. Une telle situation pourrait inciter les États-Unis, par l’intermédiaire de leur proxy Israël, à faire d’une pierre deux coups en protégeant le ciel israélien et en assagissant les forces russes en Syrie grâce à leurs porte-avions au large des côtes israéliennes.
Ils veulent que nous ne voyions qu’une seule guerre. Mais si l’on reliait l’ensemble des événements, nous pourrions commencer à mettre les pendules à l’heure. La course à la guerre qu’ils nous imposent est réelle et croissante, et dans les deux camps les victimes seront toujours les mêmes. Des gens comme nous, des travailleurs et des producteurs qui n’ont aucun intérêt dans le système et qui ont tout à y perdre.
Chez nous, nous payons l’austérité, notre volonté de lutter contre elle, c’est aussi la lutte contre leurs guerres, contre leur capacité à faire la guerre, c’est notre refus de la faire à leur place. Notre réponse doit être la guerre de classe !
Déclaration internationale contre la guerre et la violence d’État
Source en anglais : https://anarcomuk.uk/2023/10/15/international-statement-against-war-and-state-violence/
Cette déclaration a été rédigée à la suite du rassemblement international de Varna de groupes anti-autoritaires en septembre. Elle a été cosignée par nos camarades en France [ASAP] et en Bulgarie [FCAB] et a été rédigée en réponse à la guerre en Ukraine. Sa publication a été retardée en raison de la priorité accordée aux événements récents, mais elle est pertinente pour toute guerre, tout conflit ou toute violence d’État.
“ Solidarité internationaliste contre le massacre de la guerre capitaliste !
Des camarades du monde entier ont récemment participé à une assemblée d’internationalistes révolutionnaires anti-guerre sur la côte de la mer Noire, afin de coordonner notre attention sur la crise de la guerre en Ukraine et l’intensification des attaques contre notre classe dans tous les pays.
Environ 70 camarades de 14 pays des 5 continents ont refusé à l’unisson de prendre parti dans les guerres capitalistes, réaffirmant qu’il n’y a pas d’autre guerre qui vaille que la guerre de classe !
Des anarchistes communistes comme nous, des anarchistes, des communistes de gauche, des syndicalistes et des autonomes se sont accordés sur la nécessité de réaffirmer le principe fondamental du défaitisme révolutionnaire – « une peste sur leurs deux maisons » !
Le capitalisme russe oblige ses travailleurs à aller au massacre, afin de voler les actifs des travailleurs ukrainiens. Les capitalistes ukrainiens militarisent les travailleurs ukrainiens pour les faire passer au même hachoir à viande afin de vendre eux-mêmes ces mêmes actifs pour en tirer profit.
Ceux qui sont déconcertés par le défi moral que représente la violence de l’agresseur par rapport à la légitime défense devraient réfléchir à cette fausse identification de la Russie et de l’Ukraine comme s’il s’agissait d’individus, ce qui n’est pas le cas ! Il s’agit d’entités capitalistes rivales dont les intérêts de classe sont au cœur de leurs préoccupations.
Des centaines de milliers de personnes ont été tuées, mutilées ou déplacées de part et d’autre de leurs frontières nationales respectives. Les travailleurs n’ont pas d’animosité les uns pour les autres avant qu’on les mobilise pour une guerre dont notre classe est la seule perdante.
Le travail internationaliste contre les blocs impérialistes rivaux se poursuit sur le front intérieur où la perturbation de leur « paix sociale » ralentit leur élan vers la guerre. La guerre de classe au pays c’est le mouvement pour la paix !
Nous continuons à développer notre travail international avec des révolutionnaires ayant une optique commune, au-delà des frontières artificielles.”
« Ni un État ni deux États ! Aucun ‘État’ ne mettra fin au massacre de notre classe ! »
Source en anglais : https://anarcomuk.uk/2023/10/09/neither-one-state-nor-two-states-no-state-will-end-the-slaughter-of-our-class/
1.500 morts au cours de la seule première journée – pas en Ukraine cette fois-ci, mais à nouveau au Moyen-Orient.
« Si la guerre engendre la guerre, on a l’impression qu’elles se multiplient à un rythme alarmant et sanglant dans le monde entier », a déclaré un journaliste britannique en guise d’introduction au déclenchement de la guerre entre Israël et Gaza.
Comme si la guerre était un phénomène naturel contagieux, indépendant de toute cause et de tout effet. La guerre n’engendre pas la guerre, c’est le capitalisme qui l’engendre.
Comme l’a dit le socialiste français Jean Jaurès juste avant la Première Guerre mondiale : « Le capitalisme porte la guerre en lui, comme la nuée porte l’orage ».
L’hypocrisie de ceux qui prétendent offrir des solutions est démontrée par la déclaration du président turc Erdogan appelant « … les parties à agir avec retenue et à ne pas prendre de mesures impulsives qui aggraveraient les tensions » quelques jours seulement après le bombardement des communautés kurdes au Rojava, dans le nord de la Syrie.
En tant que « médiateur », les États-Unis promettent à Israël : « Nous vous soutiendrons toujours », ce qui revient à lui donner un chèque en blanc pour un permis de tuer.
Des familles entières anéanties dans leurs maisons à Gaza ; des centaines de jeunes traqués et abattus lors d’un festival de musique. Le massacre est devenu immédiatement vaste et impitoyable. Nous savons qui tue, mais nous devons nous demander qui en paye le prix.
Des gens comme nous, des travailleurs, juifs et arabes. Sans propriété ni maîtrise sur sa propre existence, notre classe, impuissante, est tuée par ceux qui luttent pour la propriété et le pouvoir.
La souffrance des Palestiniens est une plaie ouverte de la forteresse occidentale au Levant. Les Forces de défense israéliennes (FDI) sont les « troupes au sol » de l’Occident depuis les années 50, jouant un rôle central dans des entreprises impérialistes telles que la crise de Suez en 56. Armées jusqu’aux dents, elles ne manquent de rien.
Malgré les références démocratiques à tendance pro-occidentale de l’État israélien, il maintient de facto un système d’apartheid sur les Palestiniens, leur permettant de travailler quand cela leur convient et les enfermant quand cela ne leur convient pas. Sa marche lente vers la droite théocratique a suscité une résistance massive de la part de sa propre classe ouvrière.
La tragédie de Gaza c’est qu’elle se trouve au cœur d’un dilemme. En raison du blocus imposé par l’État israélien, elle a été décrite comme la « plus grande prison à ciel ouvert du monde ». Son autre malheur c’est d’être sous la garde du mini-État islamique du Hamas.
« Hamas », qui signifie littéralement « zèle », « ferveur », est une dictature théocratique brutale, pire que celle contre laquelle le monde a protesté en Iran. Alors que les libéraux et les gauchistes scandent « nous sommes tous Hamas maintenant », ils feraient bien de réfléchir à ce que serait la durée de leur survie là-bas.
Le Hamas massacre même les siens, comme Mahmoud Ishtiwi, un ancien commandant du Hamas qui a été, selon le New York Times, « … accusé de débauche morale, ce par quoi le Hamas entendait l’homosexualité », puis torturé et exécuté en 2016.
À l’instar de l’offensive du Têt au Viêt Nam en 1968, cet assaut brutal de « David » contre un « Goliath » brutal est une tentative de changement de paradigme.
Elle vise autant la fraction Fatah de l’Autorité palestinienne de Cisjordanie afin d’en usurper la direction qu’à faire échouer les tentatives d’Israël de geler le conflit par le biais d’un rapprochement avec ses voisins arabes.
Bien qu’il puisse sembler paradoxal que le Hamas ait uni une entité israélienne divisée, il pourrait s’avérer opportun d’exploiter l’attention portée par l’Occident à la guerre européenne pour élargir le conflit en y associant un Iran réticent.
Le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, ayant évoqué le rôle potentiel de l’Iran, cela peut nous mener n’importe où. L’envoi de la force de frappe des porte-avions de la Méditerranée occidentale vers l’est « pour dissuader l’Iran » permettrait certainement à Israël de se lancer dans une entreprise militaire plus vaste contre le programme nucléaire iranien, comme il le souhaite ardemment.
Quelle que soit la vérité, il ne s’agit pas d’Arabes contre des Juifs, il s’agit de travailleurs des deux côtés massacrés et manipulés par la rivalité de puissants blocs du capitalisme, par l’intermédiaire de leurs sous-traitants sanguinaires. La guerre capitaliste, dans tout ce qu’elle a de plus impitoyable !
Ni un État ni deux États ne peuvent mettre fin à ce cycle, aucun agent du capitalisme n’en est capable ou ne le souhaite. Toutes leurs guerres sont dirigées contre notre classe. La guerre de classe est notre seule réponse et c’est pourquoi, ici comme en Ukraine, nous disons : « Résistons à leur marche vers la guerre – Non à la guerre sauf la guerre de classe ! »
Pourquoi est-il si difficile d’être contre la guerre ?
Source en anglais : https://anarcomuk.uk/2023/09/23/why-is-being-against-war-so-hard/
L’hiver arrive. Ce n’est pas une phrase de Game of Thrones, mais une réalité météorologique dans l’hémisphère nord.
Avant que les pluies n’immobilisent les lignes de combat pour six mois supplémentaires, une nouvelle victime est à déplorer dans ce conflit entre blocs capitalistes rivaux. L’attaque à peine annoncée de l’Azerbaïdjan contre l’enclave arménienne assiégée du Haut-Karabakh a conduit à la capitulation complète de l’Arménie.
Bien qu’elle soit membre de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) de Poutine, les forces de maintien de la paix russes n’ont pu que négocier les conditions de la reddition arménienne.
L’humiliation de Poutine a été orchestrée par le principal allié de l’Azerbaïdjan, le président turc de l’OTAN, Erdogan. L’opération militaire spéciale en Ukraine a rendu la Russie impuissante sur ses propres frontières.
Cette guerre éclair n’a pas duré assez longtemps pour que ceux qui prétendent s’opposer à la guerre se rongent les sangs à propos de quel belligérant soutenir.
En Ukraine, malgré les trois mois de carnage les plus sanglants d’une offensive financée par l’OTAN, les lignes de front qui ont peu évolué seront une fois de plus gelées.
Le deuxième anniversaire de la guerre, le 24 février, sera énergiquement marqué par la reconstruction et le renforcement des frontières infranchissables du conflit.
Un conflit qui trouve un écho dans les clivages entre pro (partisans de l’un ou l’autre belligérant) et anti-guerre (contre tous les belligérants) dans ce qui était autrefois le milieu révolutionnaire.
Pourquoi l’opposition à la guerre est-elle si controversée par certains de ceux qui se réclament de la tradition révolutionnaire ? C’est une catastrophe absolue. 10 millions de personnes déplacées, environ 500.000 victimes et 150.000 morts. Un coût de 1.000 milliards de dollars et la moitié du monde qui a faim ou qui paie le prix de l’austérité imposée par les profiteurs de guerre.
Cela s’explique en partie par notre réaction naturelle d’horreur et de sympathie face à l’ampleur de la souffrance et de l’injustice – des instincts louables qui sont ensuite manipulés pour soutenir l’un ou l’autre camp sur la base d’une guerre juste ou injuste, légale ou illégale. C’est ce brouillard qui nous conduit à un récit déformé opposant le bien et le mal.
Plutôt que de considérer le conflit entre l’Ukraine et la Russie, qui ne sont que des États capitalistes corrompus et corporatistes, dans le cadre des rivalités planétaires propres au capitalisme international, et cela aux dépens des travailleurs des deux côtés, tous ces faux récits nous renvoient à des platitudes morales.
Un David contre Goliath. Une victime innocente contre un agresseur violent, ce qui nous conduit à un résultat binaire simple : soutenir le gentil contre le méchant. C’est la logique de la pantomime et non l’analyse des internationalistes révolutionnaires.
Les personnes concernées ne sont pas la Russie et l’Ukraine, mais leurs milliers de travailleurs qui ont tout à perdre et rien à gagner dans ce conflit.
Ceux qui ne voient pas la faille de cette logique devraient se demander pourquoi et qui ils ont choisi de soutenir lorsque l’Éthiopie a attaqué le Tigre ? Ou lorsque l’Érythrée a attaqué l’Éthiopie, ou que le Rwanda a attaqué la RDC ? En effet, où était leur indignation morale au sujet du Haut-Karabakh ?
Certains affirment qu’il n’appartient pas aux révolutionnaires des pays centraux capitalistes de formuler un point de vue sur des conflits qui se déroulent ailleurs. C’est ce qu’ils appellent, dans le langage contemporain des guerres culturelles, le West-splaining [NdT : c’est-à-dire une attitude qui relève de la « condescendance de l’Occident »]. Une résonance gênante avec le commentaire de Neville Chamberlain, en 1938, selon lequel nous n’avons rien à faire dans une « querelle dans un pays lointain, entre des gens dont nous ne savons rien ». C’était peu avant la deuxième guerre mondiale ; alors que l’humanité était au bord de l’abîme…
Les internationalistes savaient alors comment réagir. Le War Commentary de Freedom Press et le Solidarity de la Fédération communiste antiparlementaire se sont opposés à la guerre tout au long de celle-ci, ce qui leur a valu d’être poursuivis en justice en 1945 pour avoir qualifié la Grande-Bretagne d’« État guerrier ».
Leurs efforts comprenaient des contributions de personnalités telles que Guy Aldred, Paul Mattick, Anton Pannekoek et du Parti communiste ouvrier de Sylvia Pankhurst.
Cette incapacité, par confusion ou à dessein, à s’unir sur une position internationaliste de défaitisme révolutionnaire a nécessairement provoqué des ruptures avec d’anciens camarades. Elle a aussi forgé de nouveaux liens avec d’autres. Une réorientation historique des forces révolutionnaires est en train de se produire, comme ce fut le cas après les précédentes trahisons de principe en 1914 et 1939.
Nous nous trouvons à nouveau devant un abîme et nous devons séparer l’internationalisme révolutionnaire de l’ivraie du libéralisme et de la social-démocratie de gauche.
Nous continuons à lutter pour l’intensification de la guerre de classe sur le front intérieur. L’affaiblissement ici de la « paix sociale » du capitalisme permet de contrecarrer sa marche vers la guerre, toutes les guerres. C’est ce que nous entendons par « Non à la guerre sauf la guerre de classe ».