Lettre aux comités locaux et à toutes celles et ceux qui aimeraient comprendre où on en est sur la ZAD

Mai 2018 : Il paraît que c’est très difficile de suivre de loin ce qui se passe, et du coup on voulaient raconter les derniers mois à la ZAD de Notre-Dame-des-Landes. On présente dans ce texte ce qu’on comprend de ce qui se passe. C’est pas trop nos analyses ou nos sentiments par rapport à la situation : on essaye de présenter une diversité d’opinions même si on n’est pas d’accord – on n’est même pas d’accord entre écrivain.e.s ! Les écri­vain.e.s, d’ailleurs, sont quelques personnes qui habitent sur la zone et ont l’habitude de s’organiser ensemble, dans le même groupe politique.

Victoire et peurs. L’annonce de l’abandon du projet d’aéroport le 17 janvier 2018, c’était pour une bonne partie du mouvement la victoire d’un long combat qui donne force et motivation aux autres luttes. Pour une fois une lutte a gagné contre un projet de l’état porté par des grosses entreprises. Mais pour d’autres, la phase d’après semblait difficile et donnait plein d’inquiétudes. Le gouvernement annonçait en même temps que l’abandon le « retour à l’état de droit », alors que tout ce qui se fait sur la zone est décidé par nous qui y vivons et nous y impliquons. Comment va-t-on pouvoir continuer avec tout ce qui s’est construit humainement ou matériellement sur cette zone ? Beaucoup d’entre nous n’étaient pas là que contre un aéroport. Comment va-t-on continuer à lutter contre « son monde », en particulier dans le contexte actuel de la politique de Macron et du développement mondial du libéralisme ?

Tout est allé très vite : D281 et compagnie

À partir de là, le rythme, à la fois dicté par le gouvernement et repris par beaucoup d’entre nous, était très rapide et il n’y avait souvent pas assez de temps pour discuter des choses ensemble avant de prendre des décisions politique complexes ou difficiles parce qu’il s’agissait souvent de faire des compromis avec nos idéaux. Une de ces décisions très conflictuelles était le dégagement de la « route des chicanes » ou D281 qui était ouverte au ralenti depuis 2013. À partir du lendemain de l’abandon, on discute de lâcher la route dans de très longues assemblées. Les avis sont très divergents : pour les un.e.s, c’est nécessaire de la lâcher pour ne pas prendre le risque que les flics reviennent tout de suite pour la dégager et ainsi en profiter pour expulser des lieux ; pour beaucoup c’était nécessaire comme signe aux voisin.e.s que c’est plus facile de passer maintenant qu’il n’y a plus d’aéroport. Mais pour beaucoup cet acte représente l’abandon d’un des lieux les plus forts de la ZAD en en faisant cadeau à l’État pour préparer le terrain pour les expulsions qui étaient aussi clairement évoquées à partir du 31 mars dans l’annonce de l’abandon du projet. Parmi celleux qui accepteraient le dégagement de la route, certain.e.s considèrent que ce n’était pas le bon moment, qu’on aurait dû la garder comme un levier dans les négociations, ou attendre d’avoir des garanties sur les expulsions. Suite à des grosses pressions et à un rapport de force d’une partie du mouvement, la D281 a été dégagée pendant des moments collectifs très tendus, des cabanes qui se trouvaient sur la route ont été démontées ou bougées dans la haie. La plus centrale, Lama Fâche, a été reconstruite sur le champ voisin dans les deux mois suivants et rebaptisée La Massacré, ou Lama Sacré. Ce moment a contribué à creuser la méfiance entre nous.

PS :

Lire la suite sur l’Expansive.

A lire aussi...