Le choix de s’opposer ou pas à l’exploitation animale ou à d’autres formes de domination n’est pas une simple préférence de goût et de couleur n’impliquant que nous et notre liberté individuelle. Il a des conséquences sur énormément d’individu-e-s non-humain-e-s et humain-e-s. Le refus de l’exploitation animale est une revendication politique, une opposition à une oppression, une domination, une discrimination de plus. On rejette l’hypocrisie du « tout se vaut », qui met sur le même plan des positions réactionnaires et des positions émancipatrices, qui devraient, selon une conception très libérale de la liberté individuelle, toutes être respectées. Cette façon de penser dépolitise les luttes contre l’exploitation animale et invisibilise les implications radicalement différentes découlant respectivement de l’antispécisme et du spécisme.
Nous voulons le plus de liberté et d’égalité possible pour les individu-e-s. Nous sommes opposé-e-s à toutes les formes de domination et de hiérarchie. C’est donc pour ça que nous nous opposons à la liberté prise par le spécisme, le racisme, le sexisme, le capitalisme ou les États d’écraser une autre liberté plus importante : celle de pouvoir vivre sans les souffrances engendrées par ces dominations. Manger de la viande, par exemple, c’est la liberté d’une préférence gustative qui prime sur celle que devrait avoir une vache de jouir de son intégrité physique, de ne pas souffrir, de ne pas vivre enfermée ou être assassinée. Donc qu’est ce qui est liberticide ? Accepter le spécisme ou vouloir abolir la consommation de produits de l’exploitation animale et revendiquer que les bouffes soient veganes ? Accepter le sexisme ou ne pas tolérer la liberté prise par des personnes de son entourage d’avoir des comportements sexistes ?Le spécisme
Ce que c’est
Le spécisme est le fait de discriminer des êtres vivants sur le seul critère de leur espèce. En pratique, c’est une idéologie actuellement prédominante dans nos sociétés, selon laquelle il est acceptable d’exploiter, de faire souffrir et de mettre à mort les êtres vivants non-humains, pour la simple raison qu’elles/ils sont d’une autre espèce que la nôtre. En d’autres termes, leurs besoins et intérêts "comptent" systématiquement moins que ceux des humain-e-s. Le spécisme constitue ainsi une forme de discrimination arbitraire, basée sur le critère de l’espèce, au même titre que le racisme et le sexisme le sont respectivement pour la race et le sexe.
Le spécisme ordinaire
Le spécisme ordinaire est issu de l’acceptation profondément ancrée et banalisée dans nos sociétés de la suprématie humaine. C’est la violence quotidienne, et normalisée qui est infligée aux animaux non-humains considérés comme inférieurs parce qu’ils sont d’une autre espèce. Il s’exprime aussi souvent par la pression sociale infligée aux humain-e-s qui sont solidaires des non-humain-e-s en s’opposant à leur exploitation. Ce n’est pas seulement le fait de celleux qui contraignent directement la vie de milliards d’animaux non-humains chaque année, mais c’est aussi, pour la plupart des personnes, une forme généralisée et indirecte de profit, de privilèges et de soutien qui rend possible cette exploitation animale. La plupart des personnes sont profondément spécistes sans avoir jamais frappé un chien, ni tué une vache.
Le spécisme ordinaire est une construction sociale et forme un ensemble de pratiques,de pensées et de représentations collectives vécues comme allant de soi et même souvent revendiquées. C’est bouffer son pain et fromage en discutant, c’est faire passer systématiquement ses propres intérêts au-dessus des intérêts des non-humain-e-s, c’est caresser « son » chat et le nourrir de vache, c’est se nourrir de vache, c’est minimiser et mettre en doute la souffrance des animaux non-humains exploités, c’est les centaines (!) de milliards de poissons qui crèvent d’asphyxie chaque année au fond des chalutiers, c’est les blagues à répétitions faites aux antispécistes, c’est le fait de légitimer le spécisme avec des arguments relevant de la mauvaise foi ou d’une réflexion de surface (pour avoir des muscles faut manger du muscle !), c’est le fait de se sentir fort-e avec d’autre spécistes, c’est le fait d’essayer de dépolitiser l’antispécisme en le ramenant à une préférence diététique (un régime) ou mystique.
Au mieux c’est le fait des rares personnes qui soutiennent l’antispécisme, sans pour autant l’appliquer à leur vie, mais la plupart du temps il est totalement assumé et décomplexé.
Antispécisme : une perspective révolutionnaire
Il n’y a selon nous, pas de libération animale possible sans révolution et pas de révolution souhaitable sans libération animale. Petite mise au point sur le spécisme, l’antispécisme et quelques perspectives de lutte.