Jeudi 14 novembre à 8h la mairie demande aux quelques 80 habitant.es du 51 Boulevard Dahdah de quitter le bâtiment au motif d’une suspicion de péril. Quelques heures plus tard, la police municipale arrive et impose à tous les habitants d’évacuer l’immeuble, sans possibilité de récupérer la plupart de leurs biens personnels. L’évacuation se fait dans la confusion, à la hâte, sans donner aucune information aux habitants. La mairie a demandé expressément au service social chargé d’intervenir dans toute évacuation, l’EAPE (Espace d’Accueil des Personnes Évacuées), de ne pas se déplacer. Tandis qu’une partie des personnes restent devant le bâtiment, d’autres partent sans être informé de leurs droits. Ceux restés devant le bâtiment sont emmené.e.s dans un gymnase de la municipalité situé rue Ruffi dans le 3ème arrondissement. Un arrêté d’évacuation avec interdiction d’occuper (consultable sur le site de la ville) est pris dans l’attente de la nomination d’un expert désigné par le Tribunal Administratif et la prise d’un arrêté de péril grave et imminent. Un tri arbitraire et discriminatoire, organisé par du personnel non qualifié, est alors opéré entre les personnes en possession d’un bail et les autres. Plus d’une cinquantaine de personnes doivent rester. Beaucoup de ces personnes sont demandeuses d’asile et relèvent du dispositif national d’accueil, géré par l’OFII (Office Français Immigration Intégration). N’oublions pas que si les demandeurs d’asile du 51 boulevard Dahdah se sont retrouvés dans cette situation de logement précaire, aux prises avec les marchands de sommeil, c’est bien parce que l’Etat et ses sous-traitants tels que l’OFII ne respectent pas le droit des étrangers et refusent aux exilé.e.s l’hébergement qui leur est dû.
Contre les expulsions et la (non) politique de relogement : appel des expulsés du bv Dahdah
Les habitant.e.s du boulevard Dahdah, du Manba et du collectif du 5 novembre appellent à un rassemblement et une conférence de presse contre les expulsions et les non-politique de relogement, vendredi 22 novembre (...)
Le lendemain de l’évacuation, la préfecture mandate l’association Sara Logisol pour la gestion du gymnase, tandis que la mairie se dédouane de toute responsabilité de relogement, sous prétexte que les personnes concernées sont des demandeurs d’asile, niant leurs droits à la "charte pour un relogement digne" dont toute personne évacuée devrait bénéficier. Il aura fallut la mobilisation des délogés et de soutiens présent sur le site pour que L’EAPE, gérée par l’association France Horizon, finisse par être mandatée pour proposer des solutions temporaires aux expulsé.e.s et vider le gymnase municipal. La démarche est claire : plutôt que de leur faire bénéficier des mêmes droits que toute personne évacuée, la mairie renvoie la responsabilité à l’OFII, qui offre des perspectives d’hébergement quasiment nulles. De plus, les solutions temporaires proposées sont inadaptées et indignes. Parmi les délogé.es du boulevard Dahdah la colère monte.
Nous habitions au 51 bd Dahdah, nous sommes des demandeurs d’asiles et vivions avec des familles, des français.es, des personnes avec des titres de séjour. Nous avons été expulsés et mis dans un gymnase sans solution de relogement tandis que les autres habitant.es ont été pris.es en charge. Depuis, l’EAPE a proposé des nuits d’hôtel à certains d’entre nous. Beaucoup sont revenus au gymnase face aux conditions à l’hôtel : absence d’eau chaude et pas de chauffage. Nous avons besoin d’un endroit où rester de manière permanente, ou nous pouvons cuisiner. Nous ne voulons pas des solutions à court terme. Nous voulons continuer à vivre à Marseille et ne pas être envoyés loin, sans moyen de transport. Nous voulons récupérer nos affaires restées dans l’immeuble.
Nous nous sommes débrouillés sans l’OFII pour avoir un toit jusqu’à maintenant. Aujourd’hui nous demandons au gouvernement,à l’État de prendre ses responsabilités. Nous demandons à la mairie de nous traiter de la même manière que tout délogé de logement indigne et de bénéficier du même dispositif que nos voisin.es avec titre de séjour ou avec la nationalité française.
L’EAPE, face à une nouvelle mobilisation des délogés, finit par trouver des nuits d’hôtel sur Marseille et par donner un document signé par le SIAO 13 [voir annexe]. Sur place, les travailleurs et travailleuses sociaux de Sara Logisol et de l’EAPE affirment que ce papier est une garantie pour le relogement pérenne des délogés. Ils et elles laissent quelques minutes aux personnes présentes pour accepter ce compromis, sous menace de fermer le gymnase sans aucune solution, même temporaire. Sous pression, les évacués de Dahdah acceptent les nuits d’hôtel et de signer le document.
A l’heure actuelle, la situation est inquiétante. Effectivement, la ville de Marseille refuse de prendre ses responsabilités et exerce une politique de division des populations arbitraire et discriminatoire en refusant aux délogés du 51 boulevard Dahdah l’accès aux droits que leur ouvre la charte pour un relogement digne.
Nous, délogés du 51 Boulevard Dahdah et collectifs de soutien exigeons :
- Que la ville de Marseille applique immédiatement la charte pour un relogement digne
- Que l’EAPE mène ses missions à bien et reconnaisse comme occupantes de bonne foi toutes les personne délogées du 51 boulevard Dahdah
- Que l’OFII et son sous-traitant la PADA repectent le droit des étrangers et assurent un logement immédiat pour tou.te.s les demandeur.se.s d’asile et dubliné.e.s tout au long de la procédure
- Que l’Etat reconnaisse que sa gestion déplorable de l’hébergement dans le cadre de sa politique d’asile fait prospérer le business des marchands de sommeil au détriment des personnes les plus précarisées
- Que les délogés récupèrent leur affaires et biens personnels et que les conditions matérielles de déménagement soient assurées par la mairie de Marseille
- Que les délogés soient toutes et tous relogé.es de manière pérenne et dans des conditions qui répondent à leurs besoins
- Un logement digne pour tous et toutes
Nous sommes déterminé.es à poursuivre cette mobilisation tant que les personnes seront dans des situations de relogement précaires. Pour ce faire, nous convoquons dans l’immédiat une réunion exceptionnelle du comité de suivi de la charte et nous appelons tout habitants de Marseille à se mobiliser. Nous étions 15’000 le 9 novembre pour dénoncer le mal-logement. D’autres actions viendront, tenez-vous prêts.
Solidarité avec tous les délogés, mal logés, sans logement, victimes des politiques discriminatoires de l’Etat !