Festival Africa Fête : Camp de Thiaroye avec Survie PACA
Camp de Thiaroye
d’Ousmane Sembène et Thierno Faty Sow – 1988, Sénégal/Algérie/Tunisie, 2h27
« En 1944, après avoir combattu sur les champs de bataille européens, des centaines de tirailleurs sont rapatriés à Dakar. Ils viennent du Dahomey (Bénin), du Soudan, de la Côte d’Ivoire, de l’Oubangui Chari (Tchad et Centrafrique), du Gabon et du Togo.
Dans l’attente de leur solde et de leur démobilisation, ils sont regroupés au camp de Thiaroye, près de Dakar. Leur participation active au sein des forces françaises a renforcé leur sentiment d’égalité avec les soldats français. Mais la fierté fait bientôt place à la désillusion. Devant les manipulations et le racisme de leurs supérieurs, les tirailleurs se mutinent et enlèvent un général. Ils le relâchent quelques heures plus tard, rassurés par la promesse d’un versement de solde imminent. Mais dans la nuit, ils sont exécutés. On dénombre vingt-cinq morts et de nombreux blessés. Les survivants sont emprisonnés.
Né en Casamance en 1923, le cinéaste Sembène Ousmane, aujourd’hui disparu, avait exercé toutes sortes de métiers avant de se tourner vers le septième art. Engagé volontaire dans l’armée française pendant la Seconde Guerre mondiale, il a ensuite été pêcheur, maçon, mécanicien, puis docker sur le port de Marseille pendant dix ans. Il a découvert dans les locaux de la CGT la littérature et l’action militante. C’est de cet épisode qu’est né Un docker noir, un roman pamphlétaire écrit en 1956 et aujourd’hui considéré comme un ouvrage témoin de la prise de conscience africaine.
Sembène Ousmane s’oriente vers le cinéma en réalisant que la méconnaissance du français en Afrique freinait la diffusion de ses idées. C’est ainsi qu’il a tourné en 1966 La Noire de…, film fondateur du cinéma africain. « Je souhaitais y dénoncer trois réalités, expliquait-il en 1985 dans un entretien radiophonique avec Catherine Ruelle, journaliste et critique de cinéma à RFI : le néocolonialisme français qui poursuit, sous une nouvelle forme, la “traite des nègres” ; la nouvelle classe africaine, sa complice ; et une certaine forme de coopération technique ».
Le Camp de Thiaroye était son septième film. Couronné par le Prix spécial du jury à la Mostra de Venise en 1988 et par le Prix Unicef, il n’a été diffusé en France que dix ans plus tard. Sembène Ousmane a mis fin à sa carrière de réalisateur en 2004, trois ans avant sa mort, avec Moolade. Il était alors âgé de 81 ans. » (François-Damien Bourgery, RFI)