Depuis trois jours, dans le centre de rétention de Marseille les personnes enfermées dans un des bâtiments ont commencé une grève de la faim. Pour ceux qui y participent la répression policière a déjà commencé (interdiction de parloir, les familles venues de loin prévenues une demi heure avant de l’annulation de leur parloir, interdiction de recevoir du tabac ou des affaires que ramènent les proches…).
Les témoignages parlent aussi de seresta et de valium (anxiolytiques sur ordonnance) distribués pour contrôler leur révolte et l’enfermement qu’il subissent.
Les personnes enfermées demandent leur libération, notamment car les conditions sanitaires, déjà invivables, se dégradent de plus en plus (pas de masque, pas de lessive, pas de nettoyage des chambres qui ont été partagées avec des personnes positives, certains dorment encore avec des personnes positives…)
Dimanche après-midi un rassemblement s’est tenu devant le CRA afin de soutenir les revendications des grévistes : la libération de tous les prisonniers et la fermeture des centres de retentions.
Pendant le rassemblement, les prisonniers ont prévenu les solidaires à l’extérieur qu’il y avait un incendie qui se déclenchait. Ils ont aussi communiqué que les flics ne les laissaient pas sortir et qu’ils étaient donc coincés avec le feu. Plusieurs prisonniers témoignent être restés jusqu’à 20h dans la promenade collé au bâtiment en feu et qu’ils ont été menacés d’être envoyés dans d’autres CRA de France, loin de leurs proches.
Tandis que des habitant.es du quartier manifestaient leur solidarité depuis leurs maisons, des policiers agressifs ont dispersé le rassemblement en menaçant de tirer au flash-ball.
Après tous ces evenements, certains grévistes ont décidé d’interrompre temporairement la grève de la faim. Toutefois, ce matin, lors du petit déjeuner, les flics ne leur ont pas donné à manger, ce qui représente une forme de représaille évidente.
Les prisonniers ne cessent de demander leur libération et la fermeture des tous les CRA. Montrons-leur notre solidarité et soutenons-les jusqu’au bout.
Nous vous relayons ci-dessous une partie des témoignages récoltes pendant les derniers jours
[Témoignage n. 1]
-Tu peux nous dire comment ça se passe à l’intérieur ?
En fait ça fait trois jours qu’ils ont ramené un mec, il a attrapé la maladie, il est cas positif. Il y en a aussi deux autres. Personnes n’est venu nettoyer leurs places mème si on leur a demandé, il s’en foutent de nous. Il y a un mec qui a demandé de faire le test cette après midi mais ils ont refusé, ils ont dit : non tu as refusé ce matin on peut pas le faire. Du coup il y a tout le monde qui fait la grève de la faim depuis hier. […]
Dans notre couloir on est 17 personnes et il y avait déjà trois cas positifs. Je pense qu’aujourd’hui il y en a d’autres parce qu’il y en a deux qui se sentaient mal et sont restés dans leurs chambres. Mon collègue dort dans le lit à coté d’un gars qui est cas covid et ils ont même pas nettoyé le matelas et retiré ses fringues.
-La nourriture et les produits d’hygiène ça passe pas au parloir ?
Rien on a rien.
Et ils ont interdit les parloirs, par exemple mon collègue à sa femme qui a pris rendez-vous pour le parloir hier pour aujourd’hui et ils ont accepté et maintenant, ils ont dit que c’était pas possible alors que sa femme est partie a 7h du matin de Lyon.[…]
Et pour manger, avant ils faisaient rentrer de bouffe, et on avait le droit de recevoir des trucs de l’extérieur, mais là ils ont dit maintenant même les gâteaux sont interdits… Par contre eux, ils vendent des trucs à deux euros dans les machines. Et ils gagnent des sous sur nous ! On a le droit d’acheter ici et on a pas le droit de faire rentrer de la bouffe de dehors !
[ Témoignage numéro 2]
-Tu peux nous dire pourquoi tu fais grève ?
Bah en fait déjà on a fait tout ça par rapport à la situation qu’on vie. Il y a des cas positifs. Vous n’imaginez pas. […] Par exemple, moi personnellement, je suis un père d’enfants, j’ai trois enfants. J’ai tout ce qu’il faut. Ça fait 17 ans que je suis ici. Avant ça n’existait pas dans des centres comme ça des personnes comme moi. Je vous ai pas tout raconté mais 90 jours ça s’appelle plus un centre de rétention, ça s’appelle une prison. Voilà. C’est une peine.
[…] Hier j’ai parle avec la docteure qui est venue au centre. Je lui ai dit : je souffre, ça fait des jours que je dors plus j’en ai marre. Elle m’a dit je ne peux rien faire tu attends ton rdv.
-Du coup il n’y a pas de suivi médical dans le CRA ?
Non, je n’arrive pas à manger, je ne mange plus j’ y arrive pas.
Si tu veux voir l’infirmier ou le docteur il te donne le spasfon ou le doliprane.
Il y a quelques jours on m’a donne des cachets de 700mg ils sont trop forts, c’est un truc de fou.
[…] Hier il y avait un collègue qui avait besoin de la ventoline. Il est asthmatique. Ils n’en avaient pas et ils lui ont dit non. Ça fait trois jours qu’il n’a pas de ventoline. Espérons qu’il fait pas de crise. Il y en a un qui le dépanne mais bon... J’espère qu’il fait pas de crise entre temps.
Il y en a un autre qui a mal au pied. Ils lui ont mis une attelle mais ils n’ont même pas fait une radio, rien du tout. Et voilà il y a plein de trucs quoi, plein de trucs. Il y a tout qui se passe ici. […]
Même forum réfugiés, ils te font signer n’importe quoi, quand tu fais n’importe quelle demande ils te font signer un papier, tu sais mème pas ce que c’est, ni ce qu’ils vont écrire.
Tu ne vaux plus rien, une fois que tu rentres ici tu vaux plus rien, c’est eux qui font tout, qui se mettent d’accord tous entre eux, même les avocats commis d’office ils te défendent même pas.
Tu leurs demandes de te défendre, il te disent : « Non on est pas la pour ça ».
Ils sont là pour quoi ?
Ils sont tous d’accord ensemble c’est un théâtre. Si t’as pas un avocat de dehors, des gens qui te courent derrière pour t’aider tu ne peux rien faire, mème les commis d’office ils sont avec eux. Ah ouais, c’est des truc de fou ce qu’il se passe, ce qu’ils font c’est abusé. Il n’y a plus de justice, il y a rien du tout. Ca y est, tu rentres ici. Ils t’emmènent direct, ça y est, ils font de toi ce que tu veux. T’as plus droit à rien du tout.