Les stupides résurgences du nationalisme et des religions ne sont que l’écume dérisoire du vrai danger : l’acquiescement suicidaire au sort qui nous est fait et par lequel une économie en dépérissement nous enjoint de dépérir avec elle.Raoul Vaneigem
Humeurs hérétiques n’est rien de plus qu’une critique ordinaire et partielle de ce monde, dont l’un des chaînons fort est le christianisme. Étant môme, les cours débilitants et soporifiques de catéchisme, l’aube immaculée et ridicule de la communion ou la fréquentation imposée des églises froides et morbides, ont d’emblée fait naître en moi une suspicion affligée à l’égard du message ecclésiastique. Il n’a pas fallu poireauter des lustres pour que la « religion de paix et d’amour » – avec son exaltation de la souffrance, sa haine du corps et des femmes, sa morale sexuelle répressive et son histoire sanguinaire – ne me suscite que dégoût et mépris. Notons qu’au regard de ces critères, il est évident qu’aucune religion, de surcroît monothéiste, ne saurait trouver grâce à mes yeux. Et c’est peu de le dire ! Toutes s’inspirent de fables consternantes, rivalisent d’absolutisme haineux et reposent sur des commandements avariés.
A l’image de la plupart des chrétiens qui méconnaissent leur religion et son livre sacré, ma perception de l’église était jusqu’alors extrêmement limitée, se bornant pour l’essentiel à un ressentiment viscéral. Une lubie aussi soudaine qu’extravagante (en tout cas pour mes proches) m’a poussé à ouvrir et à lire cette satanée Bible, de fond en comble, histoire de matérialiser et d’affiner la critique du domaine religieux. La Bible, cet ouvrage qui a étrenné l’imprimerie de Gutenberg et qui se présente comme le livre le plus édité et le plus lu au monde, constitue le socle idéologique et culturel sur lequel la civilisation occidentale s’est construite.
Se coltiner est le terme à peu près exacte pour qualifier une lecture laborieuse et assommante, s’étalant sur trois mois étouffants. Trois longs mois à s’user les mirettes sur de petits caractères, à blasphémer contre les désagréments du papier fin et à soupirer devant des textes mortellement ennuyeux, autant à cause d’un style fadasse et pompeux, que par l’inintérêt d’un propos métaphysique et pathétique. À force de persévérance et d’un brin de masochisme, j’ai résisté aux listes généalogiques interminables, supporté la niaiserie des psaumes, serré les dents devant l’abject et survécu aux préceptes sidérants, pour finalement venir à bout des Saintes écritures. Lire et prendre des notes était une chose, mais synthétiser celles-ci pour tenter de les rendre intelligibles en était une autre. Bon an, mal an, cet ultra-condensé biblique – fruit du désir de partager les maigres connaissances en la matière ainsi que les réflexions qui en découlent – a fini par prendre corps et âme dans cette brochure.
La première partie se farcit l’Ancien Testament, qui nous offre le récit mythique, initiant les concepts bancals d’un peuple juif élu par Yahvé, d’un paradis terrestre ou d’un péché originel, à travers les épisodes de la Genèse, de l’Exode, de Noé, de Sodome et autres bondieuseries. Vient ensuite celle sur le Nouveau Testament, hagiographie aberrante au sujet d’un perché déguenillé, qui entend se substituer à son prédécesseur, marquant ainsi son essence antijuive. Pour finir, les Origines du christianisme, de l’an zéro au Ve siècle, de la construction du dogme à son sacre impérial en passant par la chasse des premiers hérétiques, clôture la présente brochure.