Le feu, survenu à cause d’une ampoule défectueuse, s’est rapidement étendu d’un conteneur à l’autre. Dès le début de l’incendie, pendant que des dizaines d’habitants allaient au secours des victimes, d’autres essayaient de s’échapper pour se protéger, souvent avec leurs enfants.
L’arrivée des pompiers auraient été volontairement retardée car ceux-ci n’auraient pas obtenu l’autorisation d’intervenir immédiatement dans le camp. Les habitants ont ainsi commencé à éteindre le feu par eux même. Face à ce mouvement de foule et la crainte de voir fuir des gens qu’ils considèrent comme des prisonniers, les policiers ont tiré des grenades lacrymogènes sur des personnes déjà en état de panique, asphyxiant doublement ces adultes et ces enfants en danger. La situation a provoqué une confrontation entre les résidents et la police, qui a alors odieusement fermé les portes du camp alors que le feu était encore rugissant. Adultes et enfants furent bloqués alors qu’ils tentaient de fuir l’incendie, et pris en tenaille entre la fumée toxique de l’incendie et celle des gaz envoyés délibérément par la police grecque.
Plusieurs médias grecs et internationaux ont utilisé cette nouvelle pour promouvoir leur nauséabonde rhétorique anti-migrants, accusant les habitants du camp d’avoir provoqué le départ du feu, où d’avoir bloqué l’intervention des pompiers. Certains sont allés jusqu’à invoquer la surpopulation comme cause du problème, non sans oublier de décrier notamment les récentes arrivées depuis la Turquie, c’est à dire une manière à peine détournée d’insinuer que les migrants seraient responsables de leur propre sort... Mais pour les médias avides de désinformation, un incendie mortel est prétexte à alimenter la politique sécuritaire exercée par le pouvoir, non à en dénoncer les manquements.
Ainsi, ont été battues en brèche les décisions prises à la suite de l’incident par le conseil des ministres grec de renvoyer 10.000 migrants en Turquie, de renforcer les patrouilles en mer Égée, ou de rapporter le rapprochement récemment établi entre Mitsotakis et Erdogan présageant pourtant de nouveaux drames. Les récents durcissements du séjour des demandeurs d’asile n’ont quant à eux guère été évoqués (suppression des possibilités de faire appel, obligation d’obéir à une domiciliation imposée le plus souvent dans un camp, création de nouveaux camps désormais systématiquement fermés même sur le continent, surveillance renforcée des agissements politiques des migrants), tout comme une reconsidération des conditions d’accueil déplorables livrées aux migrants.
Cette nouvelle tragédie est pourtant le produit d’une politique européenne odieuse, résultant directement de choix délibérés. Le camp de Moria vient récemment d’atteindre le chiffre exorbitant de 13000 personnes confinées, pour 3000 places seulement, selon l’évaluation du HCR. Il a été conçu par les « spécialistes » et les responsables politiques de l’Union européenne, et le problème n’est nullement le résultat fatidique d’un soi-disant nombre trop important de migrants causant une « surpopulation », mais bien une volonté d’enfermement et de coercition nécessaire à une gestion des flux au niveau européen. Depuis trois ans, des gens sont morts de maladies, notamment liées à une mauvaise alimentation, à des conditions d’hygiènes innommables et au manque de protection face aux conditions climatiques (extrême chaleur, neige, boue...). Les personnes vivant dans ces camps ont été soumises à l’humiliation, à la déshumanisation, ont été souvent arrêtées ou emprisonnées, elles demeurent dans l’attente d’un hypothétique transfert ou d’une régularisation. Cet événement tragique ne peut qu’être une raison de plus de dénoncer une fois encore les politiques migratoires meurtrières.