« Avez-vous travaillé ? ». Chaque mois, les personnes inscrit-es à Pôle Emploi répondent au même questionnaire, qui va conditionner le versement de leur allocation. Mais la période d’actualisation qui s’ouvre le 28 janvier introduit une nouveauté aux conséquences encore floues : le journal de la recherche d’emploi, présenté comme une « évolution » qui « enrichit l’actualisation ». Chaque mois, les demandeurs·euses d’emploi devront renseigner toutes les démarches effectuées en vue de retrouver un job ou de créer une entreprise. Alors que la vidéo de présentation disponible sur Youtube fait passer ce journal pour une étape joyeuse et nécessaire du parcours qui mènera le demandeur d’emploi vers le métier de ses rêves [1], le dispositif constitue en fait une nouvelle mesure de contrôle des chômeur-euses.
Dans le Doubs, l’un des départements concernés par cette expérimentation [2], la coordination des intermittent·es et précaires de Franche-Comté appelle les demandeur·euses d’emplois des départements concernés par le test à ne pas tenir compte de cette mesure de justification de recherche d’emploi au cours de l’actualisation [3].
« Serons nous radié·es suivant les réponses ? »
Dans son communiqué, la coordination des intermittents et précaires indique avoir demandé des explications sur ce nouveau « journal », et avoir obtenu les réponses suivantes : « Vous n’êtes pas concernés » ; « Cette démarche n’est pas obligatoire » ; « Ce n’est pas du contrôle ». Ces réponses, à priori rassurantes, tranchent avec le ton qu’on trouve par ailleurs. Sur l’application Pôle Emploi, les personnes inscrites ont reçu le message suivant : « Vous devrez , à partir du 28 janvier 2020, déclarer vos démarches de recherche d’emploi » ; quant au texte du décret du 26 juillet 2019 organisant l’expérimentation du journal de la recherche d’emploi, il parle bien d’une « obligation de renseignement du journal ». Il ne s’agit donc pas, comme le dit la voix off de la vidéo de Pôle Emploi, d’un « moment permettant de prendre du recul sur vos recherches », mais bien d’une nouveau type de contrôle auxquels doivent se soumettre les chômeur·euses.
Malgré le ton rassurant de Pôle Emploi (« Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse », « Cela n’a aucun impact sur vos allocations »), les précaires du Doubs ne s’en laissent pas compter :
Nous ne voyons pas d’un bon œil ce nouvel outil dans la mesure où nous sommes déjà soumis à des accompagnements avec des conseillers.ères. Si dans un premier temps, certaines réponses en provenance du service public de l’emploi peuvent laisser entendre une étape « facultative », nous ne savons toutefois pas comment vont être traitées les données, ni comment va évoluer le questionnaire au fil du temps : quand bien même on nous assure une mesure non punitive, quid d’une série d’actualisation de trois mois chômés sans réponses au journal ? Devrons nous fournir d’autres preuves ? Serons-nous convoqué·es plus souvent ? Serons nous radié·es suivant les réponses ? [...] Nous refusons cette méthode d’actualisation. Nous demandons à Pôle Emploi de supprimer cet outil inadapté et irrespectueux. Non à la suspicion permanente de malhonnêteté des demandeur·euses d’emplois !
Alors que la dernière réforme de l’assurance chômage durcit les conditions qui permettent d’ouvrir des droits et se traduira par une chute brutale du montant des indemnisations, et que le gouvernement a les yeux rivés sur l’évolution des chiffres du chômage, difficile de croire que ce journal ne constitue pas, à terme, un outil supplémentaire pour procéder à des radiations.