Le réseau Mutu a développé un nouveau modèle à succès pour les médias radicaux francophones, avec 15 sites web à travers la francophonie [1], intégrés dans leurs contextes locaux, rendant compte des luttes locales et luttant contre la monopolisation de l’information militante par les entreprises de médias sociaux.
Le mois dernier, deux d’entre nous du groupe libcom ont été invités à donner une conférence sur notre projet à l’une des réunions semestrielles du Réseau Mutu. Créé en 2013, Mutu regroupe quinze sites d’information radicale à travers la France et la Suisse, dont certains sont très anciens et très bien établis comme RebelLyon.info, créé en 2005, et Paris Luttes, créé en 2013, tandis que d’autres sont plus récents comme les collectifs de villes comme Rouen, Grenoble, Dijon et Nancy qui ont tous été créés au cours de la dernière année. La conférence a duré trois jours et a vu des membres de tout le réseau se réunir pour rendre compte de leurs activités, partager diverses compétences techniques et savoir-faires en matière d’infrastructure et discuter de la manière de faire avancer le réseau.
Bien qu’il existe des différences politiques entre (et au sein des) collectifs, ils sont tous unis par quelques principes communs :
- La publication participative : toute personne ou collectif local concerné par les objectifs du site est invité à proposer ses articles ; la rédaction d’articles n’est pas réservée aux personnes du collectif.
- L’aide à la publication : le collectif peut aider à la mise en forme des articles, à la rédaction, à travers une interface de modération qui permet les échanges avec les différents contributeurs du site.
- L’ouverture : le site n’est pas la propriété d’un groupe ou collectif, il reflète la diversité des idées et des pratiques qui traversent localement les luttes.
- Les idées politiques anti-autoritaires : dans une perspective émancipatrice, anticapitaliste et de lutte contre toutes les dominations.
- La volonté de diffuser le plus massivement possible les articles publiés.
- L’ancrage dans le contexte local, dans la mise en forme comme dans son fonctionnement.
- L’entraide entre les sites similaires.
Médias radicaux, du local à l’(inter)national.
Comme indiqué dans ses principes communs, les sites Web du réseau Mutu sont mis en place pour refléter la diversité des pratiques qui existent localement, ce qui signifie que les sites hébergeront des articles sur un éventail de sujets allant des divers mouvements sociaux dans leurs villes : des conflits ouvriers aux actions écologistes, des luttes pour le logement aux protestations contre la violence policière, avec un contenu généré (autant que possible) par les utilisateurs et utilisatrices du site eux-mêmes en rédigeant des articles directement à partir du terrain de la lutte en question.
Cela reflète en partie les origines de nombreux sites Web locaux de Mutu, qui sont nés de la disparition d’Indymedia et de la nécessité pour les militant-e-s locaux de disposer d’un outil de communication pour faire connaître les luttes et les activités politiques locales. Cependant, contrairement au modèle Indymedia, avoir un contrôle éditorial sur le site web et soutenir les personnes qui veulent publier des articles est une partie importante du projet. Ainsi, alors que les sites Web de Mutu ont conservé le modèle de « publication ouverte » d’Indymedia, permettant à quiconque de soumettre des articles, à la différence d’Indymedia, ils rejettent les articles qui ne conviennent pas et soutiennent les contributeurs et contributrices dans le processus d’édition. Ce qui rend le modèle de publication de Mutu si intéressant, c’est que tout le processus d’édition est totalement transparent. Tout utilisateur et utilisatrice enregistré peut se connecter à l’interface de publication du site et voir quels articles sont discutés, approuvés et rejetés, quelles modifications ont été suggérées, etc.