Ce livre retrace l’itinéraire politique d’Eugène Bonaventure Vigo dit Almereyda, né en 1883 dans le midi languedocien et mort en 1917 à l’infirmerie de la prison de Fresnes. Adolescent sans famille dans le Paris de la Belle Époque, il est incarcéré pour un menu larcin à la prison pour enfants de la Petite Roquette et en sort révolté, anarchiste.
C’est l’époque où la CGT défend la grève générale comme unique moyen pour parvenir à l’émancipation des travailleurs. Quant à la SFIO, formée en avril 1905, à partir de plusieurs organisations socialistes, elle comprend un pôle réformiste et un pôle insurrectionnel. Dans cette période d’intense mobilisation sociale (entre 1 000 et 1 500 grèves par an sur l’ensemble du territoire et dans tous les secteurs de production), c’est l’armée qui est chargée du maintien de l’ordre : les blessés se comptent par centaines et les morts ne sont pas rares.
Vigo, qui collabore au Libertaire sous le nom d’Almereyda prend, à 21 ans, la tête de la section française de l’Association internationale antimilitariste (AIA) fondée en 1904 à Amsterdam. Emprisonné pour provocation à la désobéissance des militaires, il fonde avec plusieurs de ses coinculpés La Guerre sociale, organe de concentration révolutionnaire regroupant anarchistes, syndicalistes et socialistes insurrectionnels. Toujours sur la brèche, on le retrouve au cœur de toutes les grandes mobilisations de son temps sur le marbre comme sur le pavé. Pour combattre les Camelots du roi, milice des nationalistes antisémites de l’Action française, il crée les Jeunes Gardes, organisation armée semi clandestine, qui riposte aussi aux brutalités policières dans les manifestations. Mais il échoue à construire le parti révolutionnaire regroupant syndicalistes, socialistes insurrectionnels et anarchistes que les militants de la Guerre sociale appellent de leurs vœux.
Découragé, il glisse alors vers le réformisme et se laisse aller à sa passion du journalisme. Fondateur du Bonnet Rouge favorable au bloc des gauches, il est accusé sans relâche par ses vieux ennemis de l’Action française d’être stipendié par les Allemands pour avoir ouvert les colonnes de son quotidien aux partisans de la paix. Accusations qui rencontrent un écho favorable dans certaines sphères gouvernementales. Il meurt en prison le 14 août 1917, huit jours après son arrestation dans des circonstances troubles, laissant orphelin un fils de 12 ans, Jean Vigo, dont l’œuvre cinématographique portera l’empreinte de sa flamboyante et tragique destinée.
Anne Steiner, sociologue et historienne, a travaillé sur la violence politique dans les années 1970 avant de consacrer plusieurs ouvrages au mouvement anarchiste, et aux grèves émeutières à la Belle Époque. Son dernier ouvrage, Révolutionnaire et dandy, Vigo dit Almereyda, paru aux éditions L’échappée en avril 2020, est une biographie politique du militant révolutionnaire Eugène Bonaventure Vigo, dit Almereyda, père du cinéaste Jean Vigo.
Ce livre sera disponible au CIRA le jour de la causerie.