Mais c’est pas pour ça que l’on se donne rendez-vous des samedis matins sous la pluie. Et ce n’est pas uniquement parce que les calanques sont jolies, ou même nominalement protégées que l’on veut empêcher l’agrandissement de l’école de business du Kedge, mais parce que quel que soit l’espace menacé, il n’y à pas de bétonnage acceptable.
Aujourd’hui c’est l’expansion du Kedge et tout autre plan d’agrandissement de Luminy, mais c’est aussi les parcs Valmer et Longchamp et les arbres de la Plaine, ou toutes ces forêts qui se font arracher pour nourrir le monstre d’E.ON à Gardanne. Il ne s’agit pas alors de scier la branche sur laquelle on s’assoit en allant proposer des solutions toutes aussi néfastes à la place de cet agrandissement ; et d’aller suggérer d’agrandir le campus, les hotels ou les parkings aux dépends du centre-ville plutôt qu’à ceux de la pinède. Ces plans là existent et leur impact sur nos vies se font déjà ressentir. Kedge, qui remplace l’Euromed-École de management-Marseille en 2013, opère également depuis un second campus dans le quartier durement gentrifé de la Joliette. C’est de cette idée même du développement dont nous ne voulons pas, et afin de pouvoir établir un rapport de force qui ne soit pas en notre défaveur, il faudrait arrêter de se renvoyer éternellement la balle en nous désolidarisant d’autres terrains de résistance tant qu’ils ne sont pas dans nos jardins. Il ne s’agit pas non plus de nous désolidariser les un-e-s des autres : Aucune résistance n’a jamais été acceptable jusqu’à ce qu’elle réussisse. Kedge, tout comme le Parc National des Calanques ont les intérêts de la Chambre de Commerce et d’Industrie représentés à leur conseil d’administration, et les attentes de celle-ci concernant le développement du parc sont publiques.
Quel est donc l’intérêt de nous affronter entre nous qui avons ici le même objectif sur le sujet des tactiques, et de nous fermer à une plus grande diversité de celles-ci dans le but de nous rendre respectables aux yeux de ces mêmes autorités qui ont proposé ou approuvé ces projets. Ni la justice ni la mairie n’ont voulu de confit avec l’armée quand il s’agissait de condamner sa responsabilité lors de l’incendie de Carpiagne de 2009. Au-delà des attentes que nous pouvons avoir individuellement, ou non, de chacune de ces institutions, il faudra bientôt nous rendre à l’évidence que ce ne seront pas seulement des signatures sur des pétitions en ligne qui rompront l’alignement de la Mairie et de la Chambre de commerce. Notre responsabilité est d’empêcher l’expansion de ce désert de béton, de ces villes uniformes qui veulent voir abonder des étudiant-e-s en management aux dépends des arbres. La seule respectabilité à rechercher est celle de mener cette lutte à bien aux côtés de celles et ceux qui s’y reconnaissent.
s.n. Marseille, 17 février 2018