Intro
Raoult et Fouché, figures marseillaises, sont partis ou sur le départ des hôpitaux de Marseille - APHM. Loin d’être des électrons libres, ils étaient le fruit d’un système pour le moins défaillant. Pour nous, hospitalier-es antifascistes et autogestionnaires de Marseille, une mise au point s’impose.
D’autant plus quand on voit le positionnement des organisations syndicales se disant représentatives des agents travaillant à l’APHM. “Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire”, pas de surfer sur le chauvinisme et le complotisme.
Au sommaire :
- L’IHU, le capitalisme, le professeur Raoult et l’exploitation
- Louis Fouché, RéinfoCovid, et la fascisation
- Timides et scandaleuses réactions locales
- Construisons du Commun
L’IHU, le capitalisme, le professeur Raoult et l’exploitation
L’IHU est une structure privée adossée à l’hôpital public et à l’Université. Il est dirigé par un conseil d’administration et est soutenu par la droite locale. Véritable rejeton de la politique des “Partenariats Public/Privé”, enfanté sous la présidence de Sarkozy, biberonné à l’argent public et des fonds privés [1] : son existence même est une attaque contre le service public.
L’IHU pousse à son maximum deux logiques capitalistes : la Tarification à l’activité (T2A) et les mécanismes de classement par point dans la recherche (SIGAPS).
La T2A c’est pour le versant “laboratoire d’analyses médicales”, dans la pratique c’est une recherche permanente de l’optimisation de la production… En rognant sur les effectifs et au détriment des conditions de travail. Tout n’est pas à jeter dans le fonctionnement de l’IHU, l’organisation du travail entre les différentes spécialités notamment. Mais il s’agit bien d’un “laboratoire usine” avec son lot d’exploitation et de course au rendement. Bien entendu l’IHU est loin d’être le seul labo d’analyses concerné.
Dans la course à la thune, on peut même optimiser les rentrées d’argent en facturant des “forfaits jours” artificiels [2]. C’est "bâtard", rien d’illégal certes, mais le droit c’est bâtard quand il s’agit d’exploitation et de gros sous.
Les SIGAPS, c’est sur le versant “labo de recherche”, c’est une course aux points, nécessitant une surproduction des publications scientifiques. Les patrons de l’IHU ont les yeux rivés sur ce classement qui devient l’alpha et l’oméga du taf. Et parfois au détriment de la qualité. Et quand l’essorage des chercheurs et chercheuses ne suffit pas, les petits arrangements dans les publications peuvent faire surface.
A l’intérieur de l’IHU s’y entremêle du personnel de droit public et de droit privé. Le travail syndical y est compliqué. Il y règne une véritable culture du chef, avec Raoult appelé “Dieu”, pour se moquer mais aussi parce que “ce que Raoult veut, Dieu le veut” quel que soit le délai. La chefferie est aux ordres, et se retrouver en opposition avec les orientations de “Dieu”, c’est se faire placardiser et se faire éjecter plus ou moins rapidement. Notamment au sein des postes à responsabilités. Le conseil d’administration est un panier de crabes et les statuts juridique de l’IHU un modèle de verrouillage antidémocratique [3]
Culte du chef, mécanismes claniques, absence de contre-pouvoir, soutien politique local… sans surprise, des témoignages sur les conditions de travail déplorables sortent régulièrement. Sans parler de l’ambiance sexiste et des harcèlements sexuels. En 2017 déjà, une lettre anonyme émanant de plusieurs ingénieurs, techniciens et employés avait provoqué l’ouverture d’une enquête CHSCT [4]. Une autre est actuellement dans les tuyaux.
L’IHU est un laboratoire… des politiques de casse du service public et de maltraitance du personnel.
La seule revendication valable concernant l’IHU ? Sa dissolution et le retour de tout ce beau monde sous le giron “100% Public”. On en profitera pour aborder les limites et lourdeurs de l’APHM en matière de fonctionnement des labos volet recherche et volet analyses médicales.
Concernant Raoult, c’est un directeur d’établissement participant à la casse du service public avec l’IHU, pas vraiment de notre camp social. Ne revenons pas sur les délires sur l’hydroxychloroquine, de la grippette qui fait “moins de morts que la trottinette”, que “les morts du covid étaient en fin de vie”, que la vaccination “alors oui mais non mais en fait faut attendre et bof”... [5]
Internationalement, ses propos ont conduit à des politiques anti-vaccination et de “laisser courir l’épidémie” menées par l’extrême-droite. Au Brésil notamment une enquête est en cours à ce sujet suite à un scandale sanitaire [6]
Ce sont des orientations politiques qui font trinquer en premier lieu les classes laborieuses, notre camp social. A moins d‘être aveuglé par le chauvinisme ou l’idolâtrie. Ou peut-être d’avoir un des ambitions politiques qui vous invite à flatter une partie de votre électorat, on ne peut que dire, avec une majorité des personnes qui bossent à l’IHU : #AllezCiaoCiao Didouche !
Louis Fouché, RéinfoCovid, et la fascisation
Fouché bossait en service de Réa à l’hôpital de la Conception. Les collègues de cette Réa ont fait leur part, mais ce n’était pas la Réa la plus exposée aux patients Covid. Pendant le service, Fouché utilisait son statut de toubib pour bourrer le crâne aux collègues avec sa propagande. Rares étaient les infirmiers à oser le rembarrer, encore plus rares au sein des postes moins qualifiés. Sur son temps de travail, Monsieur se permettait même de faire ses vidéos de propagande ou d’organiser des manifs… en laissant les collègues et les patient-es en galère. Globalement, un gros soulagement est palpable dans l’équipe suite à son départ.
Son discours soit disant gentillet à base de “mouvement collectif qui émane de l’intelligence du vivant” et autre “Co-construction, Démocratie, Écologie, Ethique, Paix & Transparence.” peut sembler attirant. En grattant, on ne constate aucune analyse en termes de lutte des classes. Aucune critique du patronat, du capitalisme. Rien de bien concret sur ce qui peut modifier notre vie de tous les jours. Des signaux qui indiquent un “programme” pour attirer du mécontent en ratissant large.
Oui un “programme”. C’est passé inaperçu mais Réinfocovid a candidaté aux dernières élections régionales/départementales. Les listes "un notre monde" étaient présentes dans 3 régions. Ils se sont pris une tôle. Parmi les candidats, les propos et publications complotistes sont fréquents, plusieurs ont des comptes sur le réseau social Russe VK et font partis de communautés QAnon et certains roulent maintenant pour Philippot, Dupont-Aignan ou Onfray. Cerise sur le gâteau : l’alliance avec la "Fédération citoyenne" dirigée par un ancien trader militant d’extrême-droite qui s’est fait connaître initialement sur Youtube en invitant des personnalités ouvertement antisémites et ultra-réactionnaires [7] . Vachement dans la bienveillance tout ça...
Ce n’est pas surprenant, quand on sait que Fouché est proche d’Asselineau et qu’il a des positions anti-avortement [8] . Dernièrement, il s’est même rapproché des QAnon (l’extrême-droite complotiste américaine). [9]
Quant à “Réinfocovid”, ils sèment la confusion en bornant le débat dans les termes de l’extrême droite. Ils flattent en même temps les classes moyennes gauche écolo en recyclant les poncifs libéraux-libertaires post 68. [10]
Après avoir répété que “c’était pas pour l’argent”, une association a été montée et adossée à Réinfocovid pour récupérer du cash (on n’échappe pas au système... marchand !). On verra si elle suivra le chemin tracé par Maître Di vizio, avocat que Réinfocovid a plébiscité et qui a offert ses services pour des procédures douteuses. Ce dernier vient littéralement de se casser avec la thune.
Là encore, on ne peut qu’inviter les camarades à ne pas faire la promotion de cet adversaire politique et de ne pas relayer Réinfocovid et ses satellites (pseudo “syndicats”, collectifs thématiques, groupes d’avocats…). #AllezCiaoCiao Foufouche.
Timides et scandaleuses réactions locales
On aurait pu imaginer que les organisations militantes sur Marseille auraient clarifié la situation. Mais on ne peut que constater le peu de réaction des militant-es marseillais-es à ce sujet. Il y a peut-être un mélange de pudeur associé à une bonne louche de chauvinisme local ? Le Marseillais ne casse pas du sucre sur Marseille.
Peut-être aussi qu’on récolte le flou artistique concernant la vaccination dans de nombreuses organisations politiques ? Cet article “Vaccination : Après la confusion, il faut une ligne syndicale claire” [11] en parle mieux que nous. Notamment de la perte de réflexes politiques au profit d’une attitude de girouette en fonction de “qui vient taper à la porte du local”.
On peut aussi se désespérer face aux positionnements des organisations représentant les hospitalier-es. Prenons les 3 syndicats dits “représentatifs” à l’APHM suite aux dernières élections.
-* FO APHM - non on déconne FO n’est pas un syndicat à l’APHM, une annexe de la DRH éventuellement. Un maillon dans un système gangréné par le clientélisme et le pistonnage. Next !
-* SUD APHM - un superbe virage à 180 degrés. Raoult le disait lui-même chez Hanouna : “je suis soutenu de SUD à Philippot”. SUD APHM allant jusqu’à l’exprimer clairement sur facebook en relayant cet extrait vidéo et en l’accompagnant d’un “soutien à el professor”. le post facebook a été supprimé depuis. Ses délégué-es tiennent devant les médias des propos complotistes sur le vaccin et proche de ce que l’on peut entendre chez RéinfoCovid.
-* CGT APHM - La CGT dans les Bouches-du-Rhône est assez avare en matière de communication. Apparemment ils ont oublié leurs revendications concernant l’IHU : rattachement à l’APHM et à l’hôpital public. C’est bien dommage. Ça aurait été l’occasion de se démarquer de la direction de l’IHU mais aussi de celle de l’APHM. La dissolution de l’IHU n’étant pas dans les logiques politiques des capitalistes et des macronistes en particulier.
Construisons du Commun
Mais plutôt que le désespoir, nous restons convaincus que construire des collectifs aboutissant à des mobilisations victorieuses est possible.
Mais pas en s’alliant avec les directions. Pas en copinant avec des collectifs complotistes proches de l’extrême-droite. Pas en pensant que “virer Macron” suffira à retourner ce système qui détruit notre système de santé depuis des dizaines d’années. Pas en regardant de haut les collègues salarié-es dans le privé. Pas en cherchant juste à “interpeller” les décideurs politiques. Pas en ayant des "leaders" qui veulent juste se recaser chez des copains à la mairie, au département ou à la région. Pas en pensant que les hospitalier-es vont s’en sortir sans s’allier à d’autres mouvements sociaux.
Revenons à des modes d’actions et des fonctionnements qui ont fait leurs preuves. S’organiser autour de notre classe sociale : les classes laborieuses. Construire l’auto-défense face aux directions maltraitantes, face aux racistes et aux sexistes. “Construisons du commun plutôt que de laisser détruire nos communautés". [12]
Et se défendre aujourd’hui, c’est dans l’immédiat vaincre le Covid par les gestes barrières et la vaccination, mais aussi par une réelle politique de santé publique visant à éradiquer le virus plutôt que de préserver l’économie capitaliste. La vaccination doit être accessible pour toutes et tous, partout dans le monde : levée des brevets sur les vaccins, transfert des technologies, accès aux vaccinodromes simplifié.
Notre système de santé va mal. Dans le public comme dans le privé. Les solutions sont connues : recrutement massif et augmentation des salaires. Dissoudre les coûteuses mutuelles et renforcer notre Sécurité sociale. Socialiser l’industrie pharmaceutique et les labos. Gérer nos établissements nous-mêmes, usager-es et professionnel-les.
"Hausse des salaires", "embauches", "amélioration des conditions de travail" et plus encore “baisse du temps de travail”, "contrôle et autogestion", "arrêts de l’exploitation et de toutes les oppressions". Autant de revendications qui font écho aux aspirations de l’ensemble de notre classe sociale.
Lâchez vos commentaires à hospitalier-es V-ner : hospitalieresvner@gmail.com