Cette compilation de témoignages (témoins et victimes directes) a permis la reconstitution du déroulement de cette soirée, heure par heure et trottoir par trottoir. Nous vous la restituons ici, dans un récit polyphonique et chronologique.
« Chasse à l’homme », « injures sexistes, racistes et homophobes », « ratonnades », « frappes à l’aveugle », « sévices corporels touchant les organes génitaux » et « véritables lynchages » de personnes qui ne montraient aucun signe de violence ou qui ne participaient même pas à la manifestation : riverains, adolescents, retraités, commerçants, journalistes.Les prénoms ont été changés et les propos entre guillemets rapportent la parole brute des témoins et des victimes.
Mercredi 14 novembre 2018, neuf jours après l’effondrement des immeubles de la rue d’Aubagne, au moins 15.000 personnes provenant des différents quartiers marseillais ont formé un immense cortège pour exprimer leurs émotions et leurs revendications contre les politiques de l’habitat indigne à Noailles et dans les quartiers populaires. Cette manifestation d’une colère digne et légitime avait été dûment déclarée par le Collectif du 5 novembre - Noailles en colère.
Les forces de l’ordre ont usé de leurs matraques, de gaz lacrymogènes et de grenades de désencerclement (dont la France seule fait encore l’usage, interdit partout en Europe) de manière indistincte, massive et non conforme à la déontologie (usage disproportionné et sans justification de la force et des armes, non-respect des principes d’absolue nécessité, de gradation et de réversibilité, coups portés à la tête et à la nuque, frappes au hasard et sans aucune menace...). Cet usage de la violence a ainsi largement dépassé le cadre du maintien de l’ordre public et s’est étendu sur les passant.e.s, les client.e.s de commerces et sur les riverain.e.s de Noailles et de la Plaine. Également, l’usage de la violence s’est déployé durant plusieurs heures, après dispersion de la manifestation, durant lesquelles le centre-ville s’est transformé en théâtre de parties de « chasse à l’homme » menée par « une meute enragée », et au cours de laquelle les témoins et victimes évoquent avoir subi des « injures sexistes », « racistes » et « homophobes », des « frappes à l’aveugle » et « sévices sur parties génitales ».
Cette réponse offensive et armée des pouvoirs publics a été d’une telle disproportion et d’une telle ampleur qu’elle constitue le point de départ d’un combat fermement engagé dans la défense et la lutte contre les violences de l’État et de sa Police.
Nous dénonçons une escalade répressive policière et judiciaire. Nous l’observons à l’échelle nationale pour des mouvements de contestation tels que les récentes mobilisations lycéennes, des gilets jaunes, etc., mais elle s’ancre aussi localement dans un contexte de mépris des leviers démocratiques de gouvernance de la cité et de déni du droit à la ville pour les plus pauvres.
Nous appelons à diffuser ces témoignages qui portent une information souvent minorée ou peu relayée. Sa diffusion est une manière de répondre à la banalisation de la répression qu’accompagne l’impunité policière et qui menace directement le droit à manifester.
Ces témoignages ont été transmis au Procureur de la République de Marseille, au Défenseur des droits de la République et à l’IGPN, 8 plaintes ont été déposées à ce jour et des enquêtes ont été ouvertes sur ces faits.
Dès 18h30, c’est une foule nombreuse et diverse qui se presse autour de Noailles. Comme l’attestent les témoignages, ce sont « tous types de personnes, de tous les âges et milieux, il y a des jeunes, des retraités, des personnes âgées, des ados, des familles et aussi beaucoup d’enfants, avec leurs parents, et beaucoup de poussettes ». Il y a aussi « les familles et les proches des personnes décédées sous l’effondrement des immeubles ». Et « beaucoup de gens pour qui c’est leur première manif ». « Il y a beaucoup de personnes âgées ». Cette foule immense se décrit comme « solidaire », « pacifiste », « émue », « triste et en colère », « profondément touchée par le drame du 5 novembre ».
Marc-Henri : « Moi et mon ami avons ressenti le besoin de nous mobiliser pour manifester notre soutien aux personnes mortes sous les décombres, à leurs familles et proches ainsi qu’aux plus de 500 évacué.e.s dans le quartier à ce jour. Le rassemblement avait lieu dans ce même quartier de Noailles, les rues étaient noires de monde. »
Évelyne : « Je suis profondément touchée par le drame du 5 novembre et endeuillée par le décès d’un ami cher, Fabien. Donc, en toute évidence, mais sans haine ni violence, enclines d’une profonde tristesse, avec quatre amies nous sommes allées à la marche blanche du samedi et aussi à celle du mercredi. Arrivées sur le port vers 19h15 devant la mairie, entourées de femmes, d’hommes, d’enfants, de personnes âgées toutes plus pacifistes les unes que les autres, solidaires et unies manifestant notre colère sans heurts, sans haine et sans arme. »
Claire : « C’était une évidence pour nous d’être présents. Pour celles et ceux qui ont péri dans les effondrements, pour ces familles délogées, pour les manquements, le mal-logement. (...) Cette manifestation était très soudée. »
Les participant.e.s à la Marche sont si nombreux et nombreuses que lorsque le cortège de tête parvient devant l’hôtel de ville et s’apprête à demander une minute de silence et à déclamer les revendications, les gens en queue de marche sont encore en train d’arriver sur le Quai du Port et de se diriger vers la mairie dont, selon Claire, les barrières positionnées en rangées autour du bâtiment « entravent le mouvement de la foule et le positionnement des participants » de la Marche.
François raconte : « J’ai été étonné d’arriver devant une mairie laissée sans lumière, sans représentants publics, sans dispositif de sécurisation des manifestants. Nous étions très calmes. Cinq minutes après notre arrivée, j’ai pu voir et entendre des pétards exploser. De simples pétards comme j’en ai utilisé dans mon adolescence. Tout de suite après, un immense nuage de gaz lacrymogènes nous a tous submergés, provoquant un mouvement de panique et des bousculades, les gens courant dans toutes les directions par peur des brûlures respiratoires et oculaires. »
Effectivement, tous et toutes partagent ce sentiment de surprise et de panique que créent les détonations quasi-immédiates des grenades de gaz lacrymogènes et l’aspect disproportionnel de l’usage de la force dès l’arrivée à la mairie. Comme le rapporte Carla, ce sont de véritables « salves de gaz » que « les gens massés, nombreux, coincés entre un front bâti en la mer » subissent, « impuissants ».
Solène, avec ses deux filles de 5 et 10 ans, dont une en poussette : « Arrivée(s) à la mairie, j’ai collé la poussette contre les doubles barrières pour la sécuriser, il y avait du passage. Soudain, il y a eu un mouvement de foule, quelques personnes ont commencé à bousculer les barrières et les CRS cachés derrière la mairie ont envoyé tout de suite les lacrymogènes sur la foule. On a couru et j’ai croisé des CRS à qui j’ai crié : « honte sur vous, il y a des enfants ! » Ils m’ont répondu : « ta gueule, connasse ». Ma fille aînée a cru que c’était un attentat et que le gaz allait nous tuer. »
Comme Magali et sa fille de 11 ans : « L’ambiance familiale, fraternelle et solidaire de cette marche avait vraiment un sens. Arrivée devant l’hôtel de ville, un mouvement de foule a commencé en début de cortège, j’ai cru à un attentat, j’ai pris ma fille par la main et soudainement des gaz lacrymogènes ont atterri devant moi. Surprise par tant de fumée, je me suis sentie perdue, ma fille également. Apeurées et choquées, les yeux et le visage en feu, nous avons réussi à nous faufiler dans les rues transversales et à rejoindre un groupe de personnes dont des familles avec des enfants en larmes et choqués. »
Suzi : « Aux premiers lancers intensifs et soudains de gaz, c’est la panique dans la foule, une femme d’une cinquantaine d’années cherche sa mère (!), je l’accompagne. Les gens refluent vers les arcades et sous les terrasses des restaurants, ne comprenant pas pourquoi toute cette fumée et tous ces gaz. C’est la confusion, j’entends des gens crier, gémir, se plaindre, appeler leurs amis, appeler à l’aide. »
C’est que, à cette première charge subite et massive de bombes de gaz lacrymogènes, s’ajoutent les charges successives violentes, gratuites, et de nombreux coups de matraques donnés sur la tête, dans le dos : plusieurs blessé.e.s sont déjà à déplorer, il n’est pas 19h25 !
Fatima : « Quand j’ai pu ré-ouvrir les yeux, une femme était tombée, un malaise. On l’a aidée à plusieurs – je suis formée en secourisme – et j’ai appelé les secours. (...) J’ai aidé un homme piétiné par les CRS et gazé à bout portant dans le visage, qui avait tenté de s’asseoir sur la place de manière pacifiste. Il était en difficulté respiratoire. »
Suzi : « Dans ce contexte et dans les mêmes instants, se sont formés deux attroupements autour de deux personnes inanimées, deux madames d’une cinquantaine d’années. La fille de l’une d’elle est à ses côtés. Quant à l’autre, elle est en position latérale de sécurité, inconsciente, coincée là où elle est tombée suite au mouvement de foule. Elle est tombée entre la fin d’une barrière de restaurant et un des piliers carrés de l’immeuble, les personnes autour d’elle n’arrivent même pas vraiment à l’approcher. Les secours sont appelés (...) Le temps de revenir vers ce que j’appelle l’esplanade de la mairie, trois personnes ont été amenées pour être mises à l’abri et être soignées avec les moyens du bord. Ce sont trois hommes dont deux plus jeunes. L’un d’eux pisse le sang du dessus du crâne, il est ouvert, il a reçu des coups de matraque en aidant quelqu’un à se relever, on lui a même frappé sur les mains, le deuxième est complètement hagard et sonné, il a la tempe gauche tout enflée, et le troisième, assis au sol, complètement sonné, a l’arrière du crâne qui a doublé de volume, il a un énorme œuf, matraqué lui aussi. »
Corentin, devant la mairie en tête de cortège : « J’ai reçu un violent coup de matraque sur la tête, sans raison. Je me tenais devant les premières banderoles pacifiquement. Le coup a été porté par des CRS. Les CRS ont chargé après avoir reçu des projectiles et ils ont frappé la foule avec leurs matraques, en aveugle. »
Laurent : « J’ai reçu une grenade lacrymogène encore enflammée au cou, me brûlant celui-ci, ainsi que les vêtements que je portais. Cela s’est passé avant 19h22. Ma compagne n’a eu que quelques mèches de cheveux brûlées. »
Isabella : « Je sonne un couvercle de casserole avec une petite baguette en bois. D’un coup, je me retrouve entre les gars qui bougeaient les grilles et les CRS. Ces derniers, sortis de derrière la mairie, viennent vers moi en courant. Le premier me frappe à l’avant-bras avec la matraque. En fuite, de dos, rendue aveugle par les lacrymos, le deuxième CRS me donne une coup de matraque à la fesse. »
Mati : « Un agent de la BAC a sorti une matraque télescopique et a commencé à donner des coups à l’homme âgé à côté de moi. L’homme est tombé par terre et l’agent a continué à le frapper sans pitié... »
Yann y voit « un défouloir » de la part des forces de l’ordre, quand Églantine dit : « je comprends que peu importe qui l’on soit, femme, homme, jeune, vieux, il va se défouler, taper jusqu’à en avoir mal aux bras. »
De 19h30 à 20h, ce déploiement de force et de répression ne tarit pas, au contraire, il prend d’autres formes : alternance de charges de lignes de six à huit CRS, interpellations musclées, coups de matraque des policiers en civil, gazages individualisés à bout portant...
Suzi : « Je me retrouve seule au début de l’esplanade près des arcades quand une charge de ligne de CRS arrive droit sur moi, je suis un peu de 3/4 par rapport à eux, je les vois de mon côté droit. Et je me fais frapper de plein fouet et de plein corps par le bouclier. Je tombe, projetée sur le sol, sur mon flanc gauche. J’ai le réflexe de me mettre en position de protection, je me recroqueville sur moi-même, les bras devant mon visage. Je reçois plus d’un coup de matraque (je ne sais pas combien) sur mon genou droit. Surtout je reçois un coup de pied dans la tête. Heureusement, la bouteille spray que je tenais en main m’a protégée, c’est cet objet qui a pris le coup et revolé plus loin. J’ai ensuite été tirée en arrière par mon sac à dos par un manifestant qui m’a ainsi permise de réintégrer le groupe de manifestant.e.s. »
Même son de cloche pour Claire : « J’ai subi, ainsi qu’une dizaine de personnes autour de moi, une violente charge de CRS (six à huit casqués). Il n’y a eu aucune sommation. Le contexte était pourtant calme, nous étions à discuter entre manifestants, faisant même dos à la mairie. J’ai pris la charge dans le bas du dos et j’ai été violemment propulsée à terre. Une femme gisait au sol à mes côtés. Ils ne se sont pas arrêtés là, ils nous ont piétinées et j’ai évité de justesse la botte de l’un deux qui s’est écrasée à quelques centimètres de ma tête. La femme à mes côtés était blessée et criait. Elle avait pris un choc violent dans le dos et avait senti sa cheville craquer dans la chute. Avec une autre personne, nous avons tenté de lui venir en aide alors qu’une pluie de matraques de CRS et de policiers en civil s’abattait sur nous et qu’elle ne parvenait pas à se relever. »
Ingrid : « Vers 19h40, ça va très vite. Des membres de la BAC dégainent leurs matraques et distribuent des coups autour d’eux, sans aucune menace préalable qui aurait justifié cette attaque. Au même moment un groupe de CRS fonçait droit sur nous. Nous n’avons reçu aucune sommation de quoi que ce soit. Le groupe nous charge donc dessus dans le dos, par surprise et gratuitement car nous n’étions pas agressifs. Je reçois un coup de bouclier dans la tête, mon compagnon se voit écrasé par le CRS. Nous sommes écroulés l’un à côté de l’autre sous la violence de la charge et nous retrouvons recroquevillés sur le sol. Nous sommes sommés de nous « tirer » tandis que d’autres personnes pacifiques se font matraquer. Nous parvenons avec peine à nous relever et nous extraire de la pluie de coups. Mon compagnon est blessé au coccyx et au coude. Nous regagnerons notre domicile choqués et meurtris. »
Marc témoigne pour sa part : « Un homme est soutenu par deux personnes qui l’aident à marcher, il est blessé et porte un bandage à la tête. Une jeune fille est en état de choc et en pleurs, ayant été témoin du matraquage d’une dame par un CRS. »
Sofia (et sa cousine) : « J’ai assisté à une arrestation de la police devant nos yeux, un couple était assis derrière nous quand la BAC, sans raison, s’est jetée sur le monsieur et sa compagne sous les arcades côté mairie, il l’ont traîné au sol comme un chien, on a essayé de tirer, ils ont frappé avec leurs bâtons et nous ont menacés avec des gaz. »
Évelyne : « Sous les arcades, au niveau du resto Le Sanglier, scandant des chants ou échangeant des commentaires, la BAC en civil bien dissimulée s’en est prise à un jeune sans raison apparente, un scénario de western... Le minot ne se rebellait même pas, un attroupement s’en est suivi, la police l’a embarqué. »
Selma : « Au niveau des arches à l’angle où se trouve la brasserie La Terrasse, (les mecs de la BAC) ont tout d’abord embarqué un gars de façon sournoise sans que personne autour ne réagisse. Puis un papi s’est approché de l’un des hommes de la BAC et ce dernier a aussitôt dégainé sa matraque télescopique et lui a porté un coup violent qui l’a fait tomber à terre. Puis la BAC s’est littéralement jetée sur lui violemment, l’a matraqué et a continué à s’acharner sur lui alors qu’il était à terre... Le monsieur agressé devait avoir une soixantaine d’années, petit de taille et portait un ensemble k-way jaune fluo. »
C’est de ce même « papi » dont parle Kevin : « Du coup, ils se sont rabattus sur un papi en gilet jaune qui, comme moi, les avait reconnus dans la foule. Ils sont passés à la matraque, du coup le papi est tombé au sol au premier coup, il n’a plus suffi que de lui placer le pied sur le visage. Quant à moi, en voyant que je voulais intervenir, ils m’ont provoqué en me disant : « viens te battre, allez viens ! » »
Églantine : « En même temps, on est un peu piégé entre les arcades, les CRS qui chargent et se mettent sur la place entre les arcades et l’hôtel de ville nous semble mal venu. Deux hommes arrivent alors, ils ont entre 55 et 70 ans. Ils crient leur colère face à la situation. Rien de mal, pas plus, pas moins que lors du défilé. Toutefois, l’un d’entre eux nous suggère de trouver refuge ailleurs car parmi le groupe il y a, je cite : « des Benalla en puissance ». C’est à ce moment-là que la situation dégénère. Les trois policiers infiltrés dans le groupe sortent leurs matraques et se mettent dos à dos en mode « défense ». Un des deux hommes dont je parle précédemment et vêtu d’un gilet jaune est alors mis à terre de manière très violente et est matraqué. Kévin part avec une partie du groupe et moi je me retrouve coincée par une arcade, la personne à terre que l’on tape est à mes pieds et un des policiers lui écrase le visage avec son pied. Paniquée, je crie : « mais laissez-le, il n’a rien fait... Laissez-le, votre violence est démesurée ». J’avoue que je crie mais je suis incapable de bouger, terrorisée par tant de violence, j’ai juste le temps de m’apercevoir de deux choses. La première, c’est que j’ai perdu mon compagnon et que je suis seule. La seconde, c’est que l’un des 3 policiers avec sa matraque s’approche de moi et que je vais prendre. J’ai omis de vous préciser que ces trois « infiltrés » ne portent aucun brassard de police. Ils ressemblent à n’importe quelle personne qui aurait pu participer à la Marche de la colère ce jour-là. C’est sournois. J’ai juste le temps de voir que le policier infiltré avait pris son élan avec sa matraque et à ce moment-là j’arrive à bouger et là, mon déplacement fait que la matraque est au niveau de ma figure puisque je me suis baissée (une nouvelle salve de lacrymo a été lancée). Le policier arrête son geste à 1cm de mon visage. Ses yeux sont emplis de haine. On se fixe quelques secondes et je comprends que peu importe que l’on soit femme, homme, jeune, vieux, il va se défouler, taper jusqu’à en avoir mal aux bras. Il tend à nouveau sa matraque pour taper plus bas. Juste à ce moment-là, Kévin est venu me récupérer, il me tire par le col de ma veste. Le policier rate sa frappe. Il lui lance alors des joutes verbales : « fils de pute, viens te battre si t’es un homme, enculé ! » »
Dans leurs témoignages, les personnes décrivent leurs sentiments sous ces termes : « sous le choc, panique totale, indignés de la violence subie, ont peur, hésitants, ne sachant pas s’ils doivent rester ou partir, abasourdie, dégoût » / décrivent les manœuvres des unités de police comme suit : « assauts des CRS, personnes poursuivies, agression policière, intimidation violente et gratuite, les policiers en civil cachés, en faction, pugilat de la police pour semer la haine, meute de CRS, foncent sur la foule, arrestation sournoise ». Ce qui fait dire à Valérie : « Je pensais qu’ils étaient là pour sécuriser la Marche et j’atteste et j’affirme qu’ils étaient là pour nous terroriser ».
Il est à peine 20h, c’est « l’accalmie », le « statu quo bizarre après tout ce déploiement de violence et de terreur ». Les gens se remettent de leurs brûlures et de leurs chocs, il y a ceux et celles qui retrouvent leurs amis, ceux et celles qui ne peuvent pas les rejoindre car, en fait, la manifestation a depuis longtemps été scindée en deux et séparée par des lignes de CRS (dès 19h15 lors de la première offensive gaz, charges, matraques). Certains scandent des slogans, les faux sapins de Noël prennent feu chacun leur tour, les gens regardent et entonnent un défoulant : « Gaudin, ça sent le sapin », chacun-e prend des nouvelles des autres, commente ce qui vient d’être vécu.
20h30-20h40. On ne sait pas trop si c’est « un policier » ou « un CRS » qui revêt une écharpe tricolore. On ne sait pas trop non plus ce qu’il fait : Tristan-Paul dit que « le policier porteur d’une écharpe tricolore serait en train d’annoncer une sommation mais visiblement personne ne l’a entendu ».
Une vidéo filmée juste à côté de ce fameux policier avec écharpe tricolore le montre effectivement faire sommation de la fin de la manifestation et de l’ordre de dispersion. Cependant, on le voit clairement, il le fait à voix nue, sans même crier, sans haut-parleur, sans porte-voix, sans rien qui démontre le souci de faire part de l’ordre de dispersion à toutes les personnes présentes. Surtout, la charge à été lancée immédiatement après ce semblant de sommation, alors même que plusieurs milliers de personnes sont encore présentes.
Paul : « Vers 20h30, les CRS ont chargé subitement et sans raison apparente - j’étais sur la chaussée à 30 mètres de la mairie. »
Saïd : « Un CRS me dit : « retourne dans ton pays », je lui réponds que « mon pays c’est ici », puis la charge a été lancée, j’ai reçu des coups de matraque, je suis resté par terre, la colère commençait à monter en moi. »
Ibrahim : « À la fin de la manif, au niveau de la mairie, juste après la sommation de quitter les lieux, deux ou trois CRS se sont jetés violemment sur une jeune femme à quelques mètres de moi, elle se débattait et criait. »
Alain : « Et puis, tout d’un coup, toujours sans que personne ne s’y attende, les CRS chargent violemment tout le long du quai de la mairie. »
De 20h30 à 20h50. Effectivement, c’était le coup d’envoi d’un refoulement sans ménagement. Depuis la mairie sur toute la longueur du quai du Vieux-Port, jusqu’à la rue de la République d’un côté, la Grande Roue, la rue passant devant l’église St-Ferréol, le début de la rue de la Canebière de l’autre côté. Les CRS font preuve d’une grande violence, se détachant par « grappes » et « petits groupes » plus mobiles pour foncer sur les personnes déjà dispersées.
Camille atteste même que : « J’ai vu une dame tomber dans l’eau. »
Suzi : « Alors que les personnes présentes étaient calmes, surtout au vu de ce qui s’est déroulé avant, les unités de CRS entament un rythme soutenu, cadencé, rapide pour nous repousser. On a bien compris qu’il n’était plus question de pouvoir rester ici. Mes trois amies et moi scandons le rassurant : « restez groupés, pas de panique, ne courez pas » mais qui ne fonctionne pas. Il faut dire qu’il est assez stressant en même temps que l’on se fait repousser de voir des gens se faire frapper par les CRS mais surtout par une bande de policiers en civil qui courent, frappent, tirent par les cheveux, ramassent, alpaguent les gens qu’ils saisissent au hasard de leur avancée brutale. Les personnes sont saisies à la fois sur le quai, à la fois vers l’eau du Port, à la fois le long des arrières des terrasses, et sont de toutes façons tirées vers les terrasses, loin des autres manifestants et manifestantes. Je vois quelques personnes attablées se lever mais rien n’y fait. »
Paul : « Ils ont tenté d’interpeler des personnes. Un ami a essayé de s’interposer, il a reçu un coup de matraque sur la tête, sans savoir d’où venait le coup - le CRS se trouvait derrière lui. Il avait le front ouvert et il a perdu beaucoup de sang. J’ai retrouvé une autre connaissance qui avait été frappée à la tête dans les mêmes circonstances. »
Éric : « Malgré avoir prévenu les CRS, qui forçaient l’évacuation en courant, que je ne pouvais pas courir (deux opérations du genou), j’ai été tabassé et gazé près des cafés situés près de la mairie. C’était à 20h49. Ils m’ont frappé avec une matraque à la cuisse et poussé violemment dans le dos, mon agresseur était casqué. À côté de moi, un monsieur âgé était à terre, il avait du sang sur la tête et le bras gravement touché. Après mon tabassage, j’ai voulu le secourir et le relever. Un CRS est arrivé et m’a sommé de le laisser tranquille et m’a forcé à m’éloigner en me poussant énergiquement. »
Lila : « Lorsque les CRS ont commencé à charger pour évacuer le Vieux-Port, j’ai entendu leur responsable leur crier : « Dégagez-moi tous ces sales cons ! » »
Joris : « J’étais en train de fuir après avoir filmé quatre flics qui tiraient une fille loin des gens. Un m’a couru après, je l’ai semé et en me retournant, un autre m’a pointé le lacrymo dans la gueule et, bim, coup de matraque à la cuisse. »
Fanny qui tenait encore une banderole avec quatre de ses amies : « J’ai reçu un violent coup de matraque au niveau de la cuisse puis sur le crâne, qui m’a fait saigner, J’ai vu blanc, dix minutes après la douleur m’a faite vomir mais j’ai tout de même continué à courir car les CRS continuaient de gazer le Vieux-Port et les civils de la BAC nous couraient derrière, non sans insulter. »
Jean-Pierre : « J’ai vu, à cinq mètres de moi, un CRS asséner un très violent coup de matraque dans la nuque d’un jeune homme, cette personne était de dos et ne présentait aucun danger pour les CRS. Je l’ai vu s’éloigner de la victime, choquée et fuyant moi-même la charge, je n’ai qu’entendu des gens appeler des pompiers... »
Thierry : « J’étais sur le côté, sur les quais du port, quand j’ai soudain vu un petit groupe de CRS foncer en notre direction. Nous avons couru et un homme est tombé à mes pieds, un CRS s’est précipité sur moi et je me souviens sa matraque levée au ciel et qu’elle s’est brutalement abattue sur mon crâne. J’étais donc en train de fuir et je n’ai à aucun moment exprimé une quelconque agressivité. Instantanément, j’ai ressenti un vive douleur et le sang a abondamment coulé. »
Saïd : « J’ai suivi le cortège qui se faisait refouler, je me mets debout dos aux policiers, un ou deux CRS, je ne sais pas, m’ont poussé violemment, j’ai fait un bond mais j’ai résisté, j’ai réussi à rester debout sauf que je me suis rendu compte que ma prothèse (de jambe, visible puisqu’il avait remonté son pantalon) était branlante, elle tenait mal, le bouton de fixation en haut qui ne marche plus. »
Clément : « Les CRS se séparent ensuite en petits groupes et commencent à devenir très violents. Un des CRS appelle ses collègues pour aller « taper ». Suite à cela, d’autres CRS s’approchent et commencent à vouloir frapper tout le monde. Les CRS essayent de nous saisir. Un des CRS particulièrement virulent fait des moues avec sa bouche, nous regarde avec un sourire narquois et nous incite à venir le frapper. »
Lisa : On s’est mis à courir, ils nous poursuivaient. Ils ont attrapé une fille avec un pull gris, je l’ai vue se débattre et ils l’ont emmenée. Et puis ils m’ont attrapée aussi, je suis tombée, j’ai senti des coups, ils me frappaient en gueulant : « sale pute ». Des bras m’ont relevée et emmenée plus loin. Il y a avait un homme à terre, il s’appelle Ibrahim, il avait l’arcade sourcilière ouverte : il avait voulu défendre la fille au pull gris et ils l’ont matraqué. Partout où les gens étaient tombés, il y avait du sang sur le trottoir. »
Ibrahim, effectivement, témoigne : « Un autre CRS que je n’ai pas vu arriver par derrière m’a violemment frappé d’un coup de matraque au front. Sonné, je suis tombé à terre »
Pour clore ce nouvel épisode « violent », « brutal », « ahurissant », « marquant », les témoignages permettent de révéler deux moments particuliers saisissants, quasiment au même moment, vers 20h45.
Tout d’abord, un jeune homme est gravement blessé par un tir de grenade de désencerclement. Cela se déroule au niveau de la Grande Roue, c’est-à-dire à la fin de la dispersion précédente, alors que tout le monde court et fuit, de dos aux escadrons de CRS qui poursuivent leurs manœuvres.
Johanna : « J’ai vu un homme se faire blesser au visage (joue droite) par un éclat de grenade, lancée donc assez loin en avant par les CRS parce que j’étais vers le milieu de la foule, voire assez devant. L’homme courant comme moi au milieu de la route, était entouré de plusieurs filles qui l’ont relevé, il était bien sonné, se tenait la joue, les yeux fermés et elles ont crié : « Pompiers ! ». Nous étions de dos, en train de courir vers la Canebière. J’ai été assez effrayée de voir ce pauvre gars se faire blesser, parce qu’on se dit que ces éclats frappent n’importe où. »
Alain : « À hauteur de la Samaritaine, un jeune homme est effondré, une vilaine blessure juste au-dessous de l’œil droit. Sa joue a littéralement triplé de volume (je soupçonne une fracture du maxillaire supérieur), les pompiers sont appelés et les premiers soins donnés. »
Jeanne : « Je me dirigeais rapidement vers la Canebière pour quitter la manifestation et éviter les gaz lacrymogènes qui tombaient tous azimuts lorsque j’ai entendu une forte détonation. Des personnes se sont mises à courir autour de moi en criant : « j’entends plus rien ! ». Un ami m’interpelle : « il y a un mec qui s’est pris un truc, il est tombé, viens ! » Nous marchons quelques pas en sens contraire et voyons un homme relevé du sol par deux autres, le visage ensanglanté. »
Suzi : « Au niveau de la Grande Roue, quand tout le monde court pour échapper à une autre charge soutenue des CRS, je me retourne et je regarde en l’air car j’entends un sifflement et je vois une trainée de projectile qui arrive en cloche juste au-dessus de la foule qui fuit et crie. Dans une forte détonation, le projectile éclate en l’air, ça fait comme un feu d’artifice et les éclats retombent épars sur les gens en dessous. »
Silvia, enfin : « Les CRS ont commencé à nous charger à plusieurs reprises et nous à courir car ils frappaient tout le monde sans distinction avec les matraques. Nous étions environ à hauteur du numéro 60 du Quai du Port quand j’ai entendu une explosion, j’ai ressenti une forte douleur aux jambes et j’ai dû m’arrêter. J’ai retourné la tête vers É. qui était à côté de moi, par terre. Moi et d’autres gens l’avons aidé à se relever et son visage était plein de sang. Nous avons avancé en le soutenant debout jusqu’à trouver un lieu au bout du Vieux-Port pour nous asseoir. J’ai demandé à quelqu’un d’appeler les pompiers et j’ai regardé mes jambes : j’avais des blessures à la jambe gauche. É. était plein de sang sur le visage qui était fortement enflé. Nous avons dû aussitôt nous déplacer à cause des CRS qui continuaient à charger et nous sommes mis à l’abri d’un restaurant. »
Le jeune homme en question, gravement blessé, a porté plainte et une enquête à été ouverte par le procureur de la République.
Au même moment, un épisode étonnant arrive. Quatre personnes en attestent (trois témoins et une victime).
Jeanne : « Une voiture de police (fourgonnette) déboule à toute vitesse, gyrophares allumés, en direction des derniers manifestants qui couraient toujours sur le quai direction Canebière. La voiture semble foncer sur les piétons (nombreux) qui sautent sur le bord de la route pour ne pas se faire écraser. Je vois que les piétons s’arrêtent et se plient en deux. Je réalise alors que la fourgonnette a les vitres baissées et que les policiers à l’intérieur gazent les gens par les fenêtres, arbitrairement et massivement. »
Julien et sa camarade en font les frais directement : « Au moment d’arriver à l’angle de la Grande Roue, une voiture de police a ralenti en passant à côté de nous, avec deux membres de la BAC à l’intérieur, et nous a gazés à bout portant, sans sommation. Ma camarade étant asthmatique, elle a fait une crise pendant près d’une demi-heure. »
20h50. La manifestation est finie, à grands renforts de matraquages sur les crânes, de gazages, d’insultes, de poussées, de frayeurs, de détonations, d’armes dangereuses. La manifestation est finie, tout le monde est dispersé au maximum entre la rue de la République, le début de la Canebière et les petites rues adjacentes à l’église St-Ferréol. La manifestation est finie, mais pas la terreur policière.
Pour les victimes et témoins de ce qui se déroule ensuite sur la Canebière, au choix, c’est là un moment « intense », « choquant », « traumatisant », « scandaleux », « d’une violence inouïe », « hallucinant », « ahurissant », « terrorisant ». Tant que pour certaines personnes il leur est ensuite « impossible de dormir », que ces « images (les) hantent » et que pour d’autres, elles « garde(nt) les yeux grand ouverts toute la nuit sans pouvoir desserrer les dents » et « ont la boule au ventre ».
20h50-21h. Alors que les unités alignées de CRS font un barrage sur la Canebière au niveau du Vieux-Port et interrompent quelques instants leurs manœuvres, des policiers et une policière en civil (des agent.e.s de la Brigade Anti-Criminalité) surgissent depuis le Centre Bourse et fondent comme une « meute enragée ».
Myriam : « Un policier en civil me charge dans la ruelle à côté de l’église alors que j’étais avec mon fils de 10 ans. Là, je me retourne pour lui dire que je suis avec un enfant, il continue sa progression et me donne un coup de matraque au niveau de l’épaule, de là, j’ai attrapé mon fils et on a prit nos jambes à notre cou pour rejoindre la foule qui était en train de remonter la Canebière. Je trouve cela scandaleux. »
Olivia : « J’ai 35 ans, je suis mère de famille, j’ai deux enfants. Vers la fin de la Marche, entre l’hôtel de ville et la Grande Roue, quand il y a un lancement massif de fumigènes, je marche vite pour partir par la petite rue qui part du Vieux-Port, j’arrive au niveau du monument de la Marine, je partais, j’ai soudainement reçu un coup de matraque sur la cuisse, par derrière, je me suis arrêtée net et je me suis retournée pour dire : « oh ! J’suis en train de partir ! », le policier en civil m’a remis un autre coup de matraque sur la cuisse en disant : « Dégage ! » avec haine. J’ai traversé la rue Canebière pour aller vers l’arrêt du tram, j’ai vu d’autres policiers arriver et j’ai couru en boitant jusqu’au commissariat. »
Grégory : « Je quitte le Vieux-Port sous les gaz lacrymogènes, tout le monde court en direction du Centre Bourse, soudain des hommes nous coursent. Dans la course, je reçois un coup violent sur la main, je continue à courir, j’arrive a m’arrêter et à lancer derrière moi : « nous courrons déjà sous les gaz, que voulez-vous de plus ? », à quoi je m’entends répondre : « je vais te défoncer, sale pédé ! », ces quelques hommes sous cet appel nous chargent de nouveau, ce dont je me rappelle, nous étions cinq ou six à ce moment, dans le boyau entre Vieux-Port et Centre Bourse. »
Jill : « Alors que la majorité des manifestants étaient contraints à s’échapper vers la Canebière, j’ai pu observer plusieurs policiers en civil munis de matraques télescopiques et de bombes de gaz. J’ai vu une jeune fille habillée avec un Perfecto noir se faire matraquer alors qu’elle était isolée en fin de « cortège » et totalement inoffensive. J’ai également pu voir un homme d’une soixantaine d’années se faire gazer au visage à bout portant sans que cet homme ne représente aucune menace non plus. J’ai pu reconnaître l’un des policiers responsable de violences car il était présent dans le cordon de CRS devant moi lorsque nous étions devant la mairie. Il était très remonté contre les manifestants et a échangé quelques paroles musclées avec certains d’entre eux. »
Émilie : « Je décide de partir du Vieux-Port, étant poursuivie par un barrage de CRS violents. Je remonte la Canebière, j’entends crier derrière moi et je vois tout le monde courir, je ne comprends pas trop puisque je vois que le barrage de CRS qui avance vers nous est quand même assez loin. Je vais comprendre par la suite que des personnes de la BAC en civil étaient dans la foule devant les CRS et ils frappaient avec leurs matraques. Je m’arrête au coin d’une rue pour appeler mon frère. Il y avait deux jeunes filles pas très loin de moi qui ne semblaient pas avoir été à la manif, je pense qu’elles venaient d’arriver sur la Canebière par une petite rue perpendiculaire. Je suis donc au téléphone et soudain un homme tout en noir, sorti de nulle part, se jette sur nous en nous frappant avec sa matraque et en nous criant de dégager (et il frappe avant de nous dire de « dégager »). Sur le coup, j’ai cru que c’était un civil qui pétait un plomb et voulait nous tuer. Je me mets donc à courir pour fuir et une femme de la BAC me frappe encore une fois d’un coup de matraque. Je vois alors le brassard et je comprends qui ils sont. Je réalise par la suite que je venais de me faire frapper sans aucune justification, alors que j’étais seule dans une rue, loin de la manifestation, mais ce qui m’a le plus choquée, c’est la violence et la haine avec laquelle ces policiers m’ont frappée. Je retrouve ensuite des amis, sous le choc eux aussi. Ils ont tenté de fuir les violences mais n’ont pas réussi. Ils viennent de voir des policiers de la BAC frapper toutes personnes qui étaient dans la rue, manifestants ou pas, avec des coups de matraques au visage (les matraques semblent être en fer), une fois les personnes à terre ils leur envoient du gaz dans les yeux. Un ami crie : « il y a un blessé », le policier de la BAC lui répond : « je m’en bats les couilles »... »
Florent : « Pour ma part, après avoir réussi à fuir le Vieux-Port par la rue Coutellerie, je me suis retrouvé au niveau du carrousel face au CCI. J’étais débout, sans armes ni mains occupées. Les CRS étaient alors à l’arrêt à 150 mètres de moi. J’étais seul. J’envoyais un « selfie » à ma compagne rentrée tard du travail et effrayée depuis la maison où elle regardait le live de Brut, pour lui montrer que tout allait bien. Je me suis retourné, alerté par des pas rapides. Et là, un homme en sweat/veste noir(e) et cache-nez m’a foncé dessus et frappé violemment (il m’a matraqué la cuisse droite ultra fort) en me traitant de « fils de pute ». Un collègue a mis un deuxième coup de matraque au même endroit et ils ont continué à courir. J’ai dû partir à cloche-pied me « cacher » derrière le Carrousel pour fuir la place Charles de Gaulle, effrayé par l’action qui venait de se dérouler. Et là, rue Pavillon, j’ai trouvé une dame d’un certain âge (environ 55-65 ans) par terre, à genoux, en train de hurler, ramassant tant bien que mal ses affaires. Elle m’explique entre deux sanglots qu’elle revenait de courses, rentrait chez elle, et venait elle aussi de se faire taper les mains par les matraques télescopiques d’un agent de la BAC. Pour anecdote, on retrouve l’agent qui m’a agressé sur la vidéo prise depuis les terrasses de resto du Vieux-Port. »
Ioana : « J’étais sur La Canebière, marchant dans la rue, il y avait un mur de CRS en face de nous, et puis ils ont chargé d’un coup, alors que personne ne manifestait. La BAC s’est mise à courser les passagers, je me suis mise dans une rue perpendiculaire car ils fonçaient sur les gens comme des fous, mais ils ont tourné dans cette rue et matraquaient n’importe qui, je me suis alors mise à courir très vite, mais j’ai fait tomber mon portable ce qui m’a ralentie, j’ai mis les mains en l’air pour qu’ils ne me fassent rien, seulement, un premier policier est arrivé par derrière et m’a presque assommée avec sa propre main, un deuxième est arrivé, j’avais toujours les mains en l’air, il m’a encerclé avec ses bras, j’avais aussi une bouteille, il me l’a arrachée, vidée dessus en disant, je cite : « bois-la, ta merde, bois-la, ta merde ». Puis il m’a frappée, encore frappée, puis jetée au sol où je me suis éclatée contre un poteau, j’avais l’oreille en sang et ils ont continué leur course. »
Annaelle : « Je suis partie acheter une bouteille d’eau et lorsque je suis revenue rejoindre mes amis, les CRS avaient formé un barrage, envoyant des lacrymos et empêchant les gens d’aller vers la mairie. Les manifestants remontaient donc assez tranquillement la Canebière, quand j’en ai vu certains se mettre à courir. Je n’ai pas compris de suite car le barrage de CRS était encore assez loin. Tout à coup, je me retourne et vois une horde de gens habillés en noir, avec un brassard rouge, qui fonçaient sur la foule. L’un d’eux brandit sa matraque et se précipita vers un groupe de jeunes filles qui leur tournaient le dos et qui marchaient tranquillement. Il leur a foncé dessus et tapé sur les jambes à l’aide de sa matraque. Les manifestants visés étaient presque tous des filles qui n’étaient en aucun cas menaçantes vu que la plupart ne les avaient pas vus arriver. Un autre a pris une cible qui semblait être encore au lycée tellement elle semblait jeune, et il l’a poursuivie en brandissant sa matraque puis je les ai perdus de vue comme elle tentait de s’échapper dans une rue avoisinante. Les manifestants étaient tous en train de remonter tranquillement la Canebière après avoir été copieusement gazés par les CRS. Je suis restée profondément choquée par ce que j’ai vu ce soir-là. La police avait l’air d’une milice fasciste des années 30. Ce soir-là j’ai pensé : on nous a attaqués gratuitement, mais qui nous protège de la police ? »
Sofia : « La BAC a tabassé un jeune à quatre dessus et ils lui ont mis du gaz dans les yeux et ils ont frappé un autre monsieur derrière moi, je suis écœurée. »
Suzi : « À 21h, ayant réussi avec ma compagne a échapper aux coups des policiers en civil qui se déchaînent sur la Canebière, nous arrivons au niveau de la rue St-Ferréol. Deux hommes policiers donc, dont le bas du visage est caché, sont rejoints par une femme policière, à visage découvert elle, qui arrive fièrement à leur hauteur et ils rient en se retrouvant côte-à-côte. Trois collègues en civil les ont rejoints et ils décident de fondre sur un homme d’une trentaine d’années, grand, habillé en noir, mat de peau et qui a un casque de scooter au coude. Il vient de garer son scooter, il rentre chez lui. J’ai vu tous les policiers aller à sa rencontre, l’arrêter dans sa marche, lui crier après, le pousser. L’homme leur répond en parlant, il n’est pas agressif, il n’est pas véhément. Ils sont six face à lui, dont la femme. Le plus grand d’entre les policiers (bas du visage caché, casquette, pantalon treillis, chemise à carreaux bleu clair), après lui avoir pris la gorge avec sa main droite, atteint avec sa main gauche le visage du monsieur, au niveau des yeux. Instantanément et simultanément, le monsieur porte ses deux mains à son visage, crie et s’écroule à terre. C’est là que les policiers fondent sur lui matraques levées pendant que l’agresseur remet tranquillement quelque chose dans sa poche de jambe droite. (...) Si ce qui est arrivé sur la Canebière ce soir-là n’avait pas été du fait de la Police, tous les médias auraient parlé d’un acte terroriste. Et c’était cela, c’était la terreur, la peur. C’est à cela que j’ai assisté, à du terrorisme ! »
Jean-Nöel : « On avance encore un peu sur la Canebière. On regarde la barrière de CRS assez loin. Les gens se mettent à courir très vite d’un coup. Je ne comprends pas pourquoi. Je vois un type en civil qui fracasse les jambes d’un mec avec sa matraque en métal. Un autre policier qui rigole et qui court après une fille qui n’était pas à la manif. Un mec buvait du Coca et se prend un coup de matraque sur les mains. Là, j’ai peur. Je prends mon amie par le bras et lui crie : « on se casse, c’est des fachos !! ». On avance vite et, en nous retournant, on voit des brassards orange à leurs bras. C’est la BAC. La Brigade Anti-Criminalité. Ils courent et ils frappent tout le monde sur la Canebière, à visage découvert. Ils ont des yeux de fous. On dirait des chiens enragés. J’entends un : « on est chez nous, cassez-vous ». Une jeune nana se prend du gaz dans les yeux, à bout portant, en plus de coups de matraques dans le ventre. Un monsieur est à terre et saigne du visage. Je gueule au policier qu’il y a un blessé au sol. Il me répond en souriant : « on s’en bat les couilles ! », « cassez-vous ». On réussit à se mettre à l’écart. On arrive au niveau du Cours Belsunce. On remonte un peu et on voit une dizaine de ces policiers, matraque à la main, qui courent après des gens et ils s’engouffrent dans une rue plus étroite. C’est la rue d’Aubagne. (…) C’était la première fois que je les voyais frapper en pleine lumière, à visage découvert, dans la rue la plus en vue de la ville. On aurait dit des animaux sortis de leur cage. La manifestation n’a pas mal tourné. Ce n’était pas un dérapage ni des échauffourées entre manifestants et forces de l’ordre. C’était sauvage et gratuit. La manif avait déjà été arrêtée par les CRS. Qui appeler pour nous protéger d’eux ? À qui demander de l’aide quand on se fait agresser par la police ? Qui nous porte secours après une telle violence ? »
Entre 21h05 et 21h20. Ça ne s’arrête jamais, on dirait. Loin d’être satisfaits et satisfaite de cette « bastonnade », les policiers et la policière de la BAC continuent donc leur course effrénée dans les rues de Noailles, au cœur même du quartier meurtri qui pleure encore ses morts et ses mortes.
Lisa : « Je suis remontée en regardant abasourdie des policiers frapper tout ce qui leur tombait sous le gourdin dans les petites rues de Noailles. Ils gazaient à bout portant des gens qui n’y comprenaient rien puisque les policiers étaient en civil et chargeaient, tapaient, cognaient n’importe qui. Une meute de chiens affamés lancés dans une chasse à l’homme violente, absurde, obscène. Je suis passée devant le commissariat. Une bagnole de flics venait de se garer. Un flic en est sorti en disant : « ah vraiment, ils sont pas courageux les jeunes cette année, on les a bien tabassés ! » Ils ont embarqué un gars à l’intérieur en continuant de se marrer : « on va se faire plaisir avec toi à l’intérieur, t’as pas été beaucoup tabassé encore, et ben tu vas voir le commissaire va être content de discuter, tout le monde déteste la police hein ? » Ils ont craché dans ma direction. »
Alain : « Je décide de m’écarter du parcours pour laisser passer la charge de CRS et oblique dans les ruelles de Noailles pour reprendre mon souffle. J’assiste alors à un spectacle proprement hallucinant : le retour de la meute de chiens et de chiennes (au moins une) déchaînés, lâchée sans retenue dans tout le quartier de Noailles. En courant, ils et elle frappent tout ce qui bouge devant eux. Ce sont essentiellement des habitant-es du quartier, un bacqueux dépasse un passant d’un certain âge, se retourne vers lui pour l’asperger à bout portant de sa gazeuse lacrymo (bien plus violent et douloureux que les gaz des grenades...). Rue Pollak, ils sont à cinq ou six sur une personne à terre et la tabassent copieusement avant de l’embarquer. Un attroupement d’habitant-es les hue à l’angle avec la rue d’Aubagne... Il se fait charger et gazer ; les gens sont révoltés : « ils viennent nous gazer jusqu’à la rue d’Aubagne, c’est une honte !! »
Claire : « Quand j’ai pu prendre une ruelle pour sortir de ce déchaînement de violence par la police, je me suis dirigée vers Noailles, avec quelques autres personnes, pour rentrer chez moi. Les rues étaient presque vides. Nous sommes entrés dans Noailles par la rue Vacon, où des jeunes du quartier nous ont demandé les raisons du bruit au Vieux-Port. Puis nous avons pris la rue Pollak. Nous avons alors vu les jeunes en train de courir vers nous, pendant qu’une bagarre éclatait derrière eux. Nous avons vu qu’il s’agissait des hommes de la BAC, qui frappaient encore à l’aveugle à coups de matraque et accouraient en direction du marché des Capucins. Arrivés au marché des Capucins, plusieurs voitures de police ont quadrillé la place (rue Pollak, rue Marché des Capucins) : empêchant toute sortie, elles ont prêté main forte à la BAC, qui a continué à tabasser à coups de matraque les jeunes de Noailles se trouvant par hasard sur son passage. Je voyais aussi la Canebière au bout de la rue Papere et la charge de dizaines de CRS contre les manifestants que nous venions de quitter au Vieux-Port. Nous nous sommes engouffrés dans le tunnel du tram, sous le choc de la violence déployée et de la « ratonnade » dont nous avions été témoins. »
Anne : « À 21h10, rue Rodolphe Pollak côté numéros pairs, un peu après le numéro xx. En face du petit snack qui a des fleurs et un morceau de scooter devant en décoration. Nous filmons des fenêtres du troisième étage. Une voiture de police arrive et se met devant le lieu de l’arrestation. D’autres manifestants sont au bout de la rue (croisement Pollak et Aubagne). Un scooter s’approche, on lui met des coups de matraque et on lui arrache son tel pour l’écraser au sol pour pas qu’il filme l’arrestation. »
Andréa : « On a pris une pizza à Noailles, chez Sauveur, et d’un coup on a vu que trois garçons (...), de physionomies africaine et arabe couraient pour fuir de quelque chose. On les a vus passer, et deux secondes après, on a vu des hommes et une femme en civil qui couraient derrière eux. Ma première impression, c’était que c’était un groupe de néonazis qui persécutaient ces personnes, mais après on a vu des bracelets et on a su que c’étaient plutôt des « policiers », on s’est dit que ça allait aller vu que c’étaient des policiers et pas des nazis (...) On a commencé à voir que les jeunes criaient et étaient très angoissés (...) C’est dans le croisement entre la rue d’Aubagne et la rue Rodolphe Pollak qu’on a vu qu’il y avait un homme qui était en train d’être abattu [sic] par terre par les policiers. Moi, j’ai commencé à crier parce que je ne suis pas habituée à voir ça. Un des policiers nous a lancé une bombe de gaz qui nous a explosé à deux mètres de mon copain. Lui, il a été abasourdi pendant un bon moment et moi j’ai eu des difficultés pour respirer pendant quatre jours. (...) À la fin, on était une dizaine de personnes attrapées parce qu’il y avait des barrières là où se trouvent les offrandes pour les personnes décédées, il nous ont menacés et pour pouvoir s’en aller en impunité, ils ont jeté une dernière bombe. »
C’est aussi cet instant que relate Dominique : « Après avoir fuit la Canebière, j’arrive à Noailles par la rue Pavillon et j’arrive au bas de la rue d’Aubagne que je remonte, je croise des habitant.e.s et des jeunes gens ici et là qui prennent une bière et qui sont émus et choqués. Peu avant le coin de la rue Pollak sur notre gauche, j’entends une détonation et je vois un immense nuage de fumée blanche se déployer, remonter, envahir l’air entre les immeubles. Juste un peu en avant de l’endroit où les immeubles se sont écroulés et où est la pelleteuse ! C’est tout simplement honteux, abject. Les policiers n’ont eu aucune pitié, ni physique, ni symbolique. »
Ce n’est pas fini, toujours pas, malheureusement.
Entre 23h et 23h20 et jusqu’à très tard. C’est maintenant à la Plaine que sévissent gazage massif et abusif (jets de grenades, spray à bout portant), coups de matraques gratuits, insultes. Une agression à caractère sexuel est à déplorer. L’odeur des gaz lacrymogènes est dans l’air dès le cours Lieutaud au départ de la rue des Trois Mages.
Le témoignage de Jean-Baptiste est édifiant : « Je me suis fait gazer alors que je buvais un verre au bar Le Couz’In place du chien saucisse ; les CRS ont tellement mis la sauce que c’est descendu de la Plaine jusqu’aux terrasses. Quand je suis allé voir ce qui s’y passait et que j’ai commencé à prendre des photos face à la violence des policiers (tir direct de grenades lacrymogènes dans un groupe de dix personnes sans armes de l’autre côté de la rue), trois civils m’ont pris à part pour me violenter et m’humilier : ils m’ont tordu les tétons avec « caressage » de parties génitales tout en m’insultant et m’enjoignant de réagir, etc. « On mange bien, hein, on est bien gras et on vient faire le rebelle » en me tordant le ventre. « Pourquoi tu dis plus rien, hein, quand je te fais ça ? » Quand ils ont vu que je ne réagissais pas comme ils l’entendaient pour pouvoir m’embarquer ou me tabasser, ils m’ont chassé en m’interdisant de passer par le chemin pour rejoindre mon appartement. « Allez, dégage, clochard, c’est pas comme si tu travaillais demain ». Je n’ai jamais subi une agression aussi violente de ma vie. Je me suis senti humilié et violenté sans pouvoir rien faire, et je sais qu’il n’y a malheureusement que peu de recours face à la violence policière sauf que je ne l’avais jamais vraiment vécue aussi directement. »
Carla : « J’étais avec deux amies au Bar de la Plaine, près de notre maison. Vers 23h, toute la place était gazée par les gaz lacrymogènes, nous avons fermé les portes pour nous en protéger car c’était difficile de respirer. Après la dispersion du gaz, nous sommes sorties sur la terrasse pour respirer à l’air libre. Nous sommes restées avec des verres devant le bar. Alors que je parlais avec mes amies, j’ai vu tout d’un coup six ou sept policiers avancer vers nous. J’ai pensé qu’ils voulaient nous informer de leurs activités. Mais ils ont tiré avec des bombes lacrymogènes, en visant notre groupe sans hésitation, directement sur les gens. Un projectile m’a atterri sur la main gauche. J’avais soudain la sensation que tous mes os à l’intérieur explosaient. Choquée, je me suis protégée en courant dans le bar à côté où j’ai reçu de la glace contre le gonflement. Environ une heure plus tard (note : autour de minuit donc), avant de rentrer à la maison, j’ai voulu parler en personne avec les policiers qui étaient toujours là. Ils étaient environ 30 policiers, quelques-uns en civil avec ce qui semblait être une mitraillette et une écharpe noire devant la bouche pour cacher leur visage. Ces derniers s’approchaient de moi, l’air menaçant. J’ai dit qu’ils avaient tiré sur moi, alors qu’il était évident que je n’étais qu’une cliente du bar, que je suis blessée et qu’ils pouvaient au moins s’excuser. Ils en ont juste ri. »
Emeline : « Des flics arrivent en voiture à l’intérieur de la place (deux fourgonnettes). Au bout d’un moment, bien à l’abri derrière leur mur de 2.5 mètres, sans sommation et sans voir sur quoi ils jettent puisqu’on ne voit rien derrière ce mur, ils envoient beaucoup de grenades lacrymogènes (j’en ai compté au moins six) pendant les deux minutes que dure la vidéo. Ensuite, environ dix minutes plus tard, ils font le tour du mur, garent leur fourgon pour empêcher le passage de voitures venant de la rue Thiers ou de la Plaine et gardent le carrefour. Ils empêchent les gens à pied de se diriger vers la rue barrée, et intimident, poussent quelqu’un qui ne leur a rien fait, lancent un chien, puis gazent ceux qui n’obéissent pas. Immobilisent au sol une femme pendant plus de cinq minutes. »
Maude : « Entre 23h10 et 23h15. Du haut de ma fenêtre, habitant au xx Place Jean Jaurès, la police – CRS et chiens – se tient devant le portail qui ferme le mur de la honte. Sur la droite, venant de la direction du Bar de la Plaine, un jeune couple se dirige vers les forces de l’ordre afin de prendre à droite et de passer en direction de l’alimentation. C’est alors que le policier accompagné de son chien ne parvient à retenir l’animal qui, équipé d’une muselière, bondit sur l’homme. Ce dernier se défend en protestant contre le groupe de policiers. C’est alors qu’un autre policier le pousse violemment à plusieurs reprises, puis le gaze à bout portant avec une bombe lacrymo au point que l’homme tombe la tête la première entre la barrière et les poubelles. Pendant ce temps, son amie proteste verbalement, elle est immédiatement mise à terre très violemment contre le mur, face aux poubelles (vidéo existe). Elle ne bouge pas, a les bras le long du corps, tandis que plusieurs policiers la maintiennent de force au sol. Elle restera au sol plusieurs minutes avant que son compagnon ne se relève et s’éloigne. Dix minutes plus tard environ, alors qu’un groupe de personnes est debout, devant le Bar de la Plaine et regarde en direction des policiers, ces derniers se mettent en groupes de quatre ou cinq à charger et se ruent sur le groupe qui n’avait rien fait du tout. Le policier avec son chien les suit et ne maîtrise toujours pas son chien qui saute sur un homme. Le groupe de badauds se disperse alors, aveuglés et quasi tous atteints par les gaz lacrymo. Un homme d’une trentaine d’années proteste contre le policier avec son chien. Ce dernier ne maîtrise encore pas son chien et pousse violemment l’homme. »