Au début était Le GIEC
Le GIEC (Groupe Intergouvernemental d’Experts sur l’Evolution du Climat) est une structure mise en place en 1988, à la demande du G7 (groupe des 7 pays les plus riches : USA, Japon, Allemagne, France, Grande Bretagne, Canada, Italie), par l’Organisation Météorologique Mondiale et par le programme pour l’environnement des Nations Unies. Le rôle du GIEC est « d’expertiser l’information scientifique, technique et socio-économique qui concerne le risque de changement climatique provoqué par l’Homme ». Mais les « résumés pour les décideurs » sont négociés avec les représentants des États. Tous notent que la température moyenne de surface de la Terre augmente, cette augmentation est due quasi-totalement aux émissions de gaz à effet de serre (GES), dont le plus abandon, le dioxyde de carbone, provient de la combustion des combustibles fossiles (charbons, pétrole…) qui couvre 80% des besoins énergétiques de la planète. Or, aujourd’hui il est admis par tous qu’en l’absence de réduction forte des émissions de GES, le réchauffement entraînera avec la fonte des glaces, une hausse du niveau des océans, la multiplication des évènements météorologiques extrêmes, une baisse de la productivité agricole, une diminution de l’eau potable disponible, un déclin accentué de la biodiversité et aura des conséquences sanitaires. Ce n’est pas le seul problème environnemental, mais il est sans aucun doute central par sa globalité, même si les conséquences annoncées de cette catastrophe n’auront pas les mêmes impacts selon les différents endroits de la planète. Il y a donc urgence à intervenir, pour prévenir ce désastre annoncé qui affecte surtout et en premier lieu les peuples. Mais, la menace ne pourra être écartée que par des mesures très radicales qui sont précisément celles que les décideurs retardent ou refusent.
De sommets, en conventions et protocoles
La convention issue du Sommet de la Terre à Rio en 1992 fixait comme objectif d’éviter une « perturbation dangereuse » du système climatique en tenant dûment compte du fait que tous les pays n’ont pas la même responsabilité historique dans le réchauffement, ni les mêmes capacités d’y faire face. Sur ces bases d’une « responsabilité commune mais différenciée » et de « capacité différenciée » à la gérer, lors de la COP3, à Kyoto en 1997, les pays développés, s’engageaient à réduire leurs émissions de 5,2% entre 2008 et 2012, par rapport à 1990. Le protocole de Kyoto s’avérera une escroquerie. L’effort que les pays « développés » auraient dû consentir était dérisoire. Les pays riches, industrialisés, avaient leur idée sur la façon de faire : le marché des droits d’émissions échangeables et la possibilité pour les pays du Nord de remplacer des réductions « d’économies domestiques » par l’achat de crédits d’émissions générés par des investissements soit-disant « propres ». Notons que ces rencontres internationales sont des moments ou gouvernements et puissants lobbies s’allient ou s’affrontent pour défendre leurs propres intérêts. L’immobilisme qui en résulte convient donc selon leurs enjeux du moment. Lors de la « COP15 » de Copenhague en 2009, les pays du Sud dénoncèrent, en effet, le manque d’engagement concret des pays du Nord. Globalement justifiée, cette dénonciation n’était cependant pas exempte d’arrière - pensées, principalement de la part des grands pays dits « émergents » (Brésil, Inde) et des producteurs de pétrole comme le Venezuela, plus soucieux de leurs ressources fossiles et de leur économies nationales, que de remédier au dérèglement climatique.
La COP20 de Lima, en décembre 2014, n’a pas dérogé à ce qui freine ces conférences : des négociations difficiles, pour un accord minimum entre partenaires. Alors que 400 000 personnes défilaient dans les rues, l’immobilisme et l’irresponsabilité prirent le pas sur l’urgence des solutions à apporter pour limiter le réchauffement de la Terre à 2°C. Les États-Unis (et les pays riches) ne sont pas prêts à renoncer à leur mode de vie tandis que la Chine s’est engagée, pour son urgence économique, à augmenter ses émissions jusqu’en 2030 avant d’envisager de les baisser ! Ces deux pays sont les deux plus grands émetteurs de gaz à effet de serre (40%), mais leur « responsabilité historique » dans le réchauffement reste très différente.
Pyromanes et pompiers
Pendant ce temps, les premiers bénéficiaires, ces pyromanes impunis que sont les puissants lobbies publics ou privés sont de toutes ces réunions internationales qu’ils sponsorisent. Les États-Unis fracturent pour obtenir des gaz de schiste, le Canada sacrifie sa forêt boréale pour les sables bitumineux, tandis que la France qui se veut à la pointe du combat contre les GES, s’enorgueillie de son nucléaire en s’enferrant avec son EPR dispendieux, construit un aéroport inutile, et autres joyeusetés environnementales nuisibles et inutiles, la Chine construit ses centrales à charbon. Certes la responsabilité historique n’est pas identique entre pays développés et pays dits émergents. Le capitalisme par sa voracité a démontré qu’il crée la crise écologique en cours. Ses gestionnaires addicts au profit, n’éviteront rien. Comment ses gestionnaires, les gouvernements, les multinationales, peuvent-ils résoudre cette crise du réchauffement, alors qu’ils défendent avant tout leurs intérêts économiques à cours terme ? Mieux, ils proposent même des solutions « vertes, raisonnées, durables » (nucléaire, bio et agrocarburants, voiture électrique) pour accroitre leurs implantations et parts de marché. « Nous n’allons pas stopper d’un coup l’ensemble des centrales à charbon en fonctionnement dans le monde » s’est défendu le PDG d’ENGIE (ex-GDF-Suez), Gérard Mestrallet, rappelant que son entreprise contribuait pour beaucoup au développement des énergies renouvelables dans les pays émergents ».
La cause de cette situation climatique préoccupante n’est pas tant dans l’impossibilité technique de sortir des combustibles fossiles que dans la nature même du système économique capitaliste. Peut-on imaginer le capitalisme sans la croissance, sans ses profits, alors qu’il a réduit tout les aspects de nos vie à des marchandises, à des logos ?
En réalité, d’une manière générale, les nombreuses « grand messes » internationales et autres conventions, qui prétendent concilier la croissance et la lutte contre les émissions de GES, sont toutes biaisées par les préoccupations « court-termistes ». Ce que ne manque pas d’apprécier le capital financier qui dirige le monde. En effet, pour sauver le climat, les multinationales du gaz, pétrole, charbon et autres, devraient renoncer à exploiter les quatre cinquièmes des réserves fossiles dont elles sont propriétaires, qui font partie de leurs actifs et qui déterminent leur santé financière. La majeure partie du système énergétique mondial (un cinquième du PIB global) devrait être mise à la casse avant amortissement. Protéger la planète implique des réductions d’émissions tellement drastiques qu’elles ne sont pas réalisables sans une diminution importante de la consommation énergétique, sans changer notre manière de vivre. Et une telle diminution à son tour n’est pas possible sans diminuer, voir arrêter, la transformation et les transports des matières fossiles exploitées. Autrement dit, sans renoncer à la croissance, à l’inévitable logique productiviste-consumériste et sa sacrosainte liberté d’entreprendre, fixée et régie par les « lois du marché ». Sans mouvement populaire puissant et déterminé, il est donc peu probable que les capitalistes se résignent à une telle finalité.
Hollande l’écolo
L’escapade rurale en Haute-Saône de François Hollande et sa suite de ministres, acte que Mr le président est déjà en campagne - mais électorale cette fois - pour 2017. Il avait conditionné sa nouvelle candidature à une baisse du chômage… improbable… vu l’actualité. Pour faire oublier cette promesse faite aux français, la cellule de com’ élyséenne s’est donc mise en branle pour donner une stature internationale au président. C’est là que la COP21, sera finement mise en spectacle : « le plus grand événement international jamais organisé sur le sol français » dixit Laurent Fabius. Un accord en décembre à Paris pourrait servir les intérêts électoraux du président pour 2017 et faire oublier ses promesses électorales reniées par son revirement social-libéral : nombreux cadeaux au patronat et plus grande paupérisation de la population déjà précarisée. Un accord à Paris, boosterait le PS, déserté par ses militants et abandonné par son électorat. Hollande, qui ne s’est jamais intéressé à l’écologie, vient de découvrir que le réchauffement climatique est une réalité, une priorité, une urgence ! Son bilan présidentiel en la matière est dans la continuité de celui de Sarkozy. Ecologiste le Président ? Autant que son premier ministre qui vient d’octroyer une subvention supplémentaire pour la réussite de la COP21, mais a diminué de 100 millions d’euros le budget du ministère de l’écologie. Aussi, à défaut d’organiser les Jeux Olympiques ou la coupe du Monde de foot, notre pays aura sa COP21. La France sera le centre du monde en accueillant cette conférence. Il est vrai que notre président n’a pas eu de « cérémonies officielles et internationales » à présider à ce jour. La COP21 sera « SA » grande conférence internationale. Sont attendus les représentants de 195 pays, près de 50 000 participants, dont 25 000 délégués officiels venant des gouvernements, des organisations intergouvernementales, des agences de l’ONU, des ONG, des syndicats et de la société civile. Une conférence dont L. Fabius et S. Royal se disputent discrètement la palme d’un triomphe annoncé. La COP21 de décembre à Paris, sera-t-elle différente des précédentes ? Sera-t-elle un sommet de plus du mensonge, du business et du crime climatique ? S’ils ne rencontrent pas de résistance populaire, nos gouvernants permettrons au système de nous plonger encore plus dans la destruction sociale et environnementale. « Crise écologique », « changement climatique », ces appellations trompeuses ne servent qu’à masquer la marche insensée du capitalisme pillant la planète et exploitant les peuples.
Partant des luttes locales, notre résistance ne peut s’appréhender que globalement. Nous devons inventer dans nos luttes ou multiples lieux de résistance, les outils permettant de développer des pratiques, des revendications, des formes d’auto-organisation. Socialisme ou barbarie comme disait l’autre. Nous devons avancer le projet d’une autre société possible, d’une société non productiviste dans une solidarité internationale de classe. Pour nous sortir de cette impasse de destruction massive qui nous prend en otage, il n’y aura pas d’autre solution que de virer le capitalisme.