Vendredi 29 novembre 2019 en milieu d’après-midi, 3 immeubles aux 12, 12bis et 14 rue Chateauredon dans le quartier de Noailles ont été évacués manu militari par les services municipaux sous la tutelle de l’Adjoint au maire délégué à la Prévention et la Gestion des Risques, Julien Ruas.
Un membre du collectif du 5 novembre a été menacé et violenté par un des agents de la ville et, sans l’insistance de voisins, une dame âgée et malade aurait été emmurée dans l’immeuble.
Selon le peu d’informations que nous avons pu recueillir sur place, c’est une vingtaine de foyers qui ont été évacués : 14 au n°12 et 5 au n°14, soit une quarantaine de personnes au total. Les habitants ont été hébergés dans 3 hôtels différents le soir même. L’évacuation s’est terminée vers 21h30. La quasi-totalité des locataires étaient sous le choc. L’immeuble au n°12 avaient en effet déjà fait l’objet d’un arrêté de péril et été évacué durant plusieurs mois fin 2018, dans l’attente de la diligence des procédures administratives, trop longues.
La tension et le désespoir sont montés en raison du comportement inacceptable de certains employés municipaux. Malgré les tentatives de médiation du Collectif, personne n’est en effet parvenu à connaître précisément la nature des décisions prises, ce qui a généré une forte tension et ajouté au traumatisme de l’évacuation. Devant les questions légitimes des personnes délogées, il a été répondu aux premiers concernés comme aux voisins et membres du collectif du 5 novembre présents « Je n’ai pas à te répondre », ou « Je n’ai pas que ça à foutre, je veux rentrer chez moi » , « Vous nous emmerdez » et de nombreuses contre-informations, comme : « Chacun n’a droit qu’à une seule valise » ou « Les propriétaires occupants doivent se démerder tout seul pour leur relogement, la ville ne les prend pas en charge ».
Pire encore, l’un des agents a menacé physiquement dans son comportement et à plusieurs reprises un membre du collectif, jusqu’à lui arracher son téléphone des mains et le jeter au sol.
En début de soirée, une partie des délogés terminent de charger leurs valises descendues avec l’aide de voisins membres du collectif du 5 novembre. Les affaires sont stockées dans des véhicules affectés par la ville après insistance du collectif : les agents avaient invité les délogés à se débrouiller par leurs propres moyens. Alors que les employés municipaux décident de poser les scellés sur la porte principale de l’immeuble, et commencent à souder, plusieurs voisins tentent d’expliquer qu’une dame âgée et malade est encore dans l’un des appartements de l’immeuble. Pressés de finir leur journée, des employés municipaux demandent à la BAC (Brigade Anti-Criminalité) d’intervenir. Ce qu’elle fait rapidement, armée de gazeuses lacrymogènes, en proposant de forcer la porte. Une médiation qui durera deux heures entre voisins et travailleurs sociaux de France Horizon permet enfin à la personne d’être prise en charge.
Nous rappelons ci -dessous les obligations inscrites dans la charte de relogement à l’article II.1.1 :
Les personnes concernées doivent disposer d’une information claire sur la raison de l’évacuation, et du temps nécessaire leur permettant de rassembler leurs affaires, en fonction de la situation de dangerosité et des besoins des ménages ;
Les personnes concernées doivent disposer d’une information générale sur le déroulé des procédures et expertises avant travaux, des contacts d’associations et collectifs et d’un exemplaire de la charte de relogement. Le guide municipal sur les évacuations réalisé fin 2018, réactualisé, est remis aux personnes évacuées et disponible à l’EAPE ;
Les personnes concernées se voient remettre une attestation d’intervention provisoire signée par le responsable de l’évacuation. Cette attestation est mise à la disposition des personnes absentes au moment de l’évacuation dans un délai de 24h à l’EAPE.
Aucune de ces obligations n’a été respectée vendredi soir.
Nous avons émis le souhait d’un traitement bienveillant de la part des services municipaux, l’avons inscrit noir sur blanc dans la charte de relogement, et largement rappelé devant ces trop nombreuses situations à répétition.
Nous avons démontré, avec l’appui de psychologues professionnels bénévoles, que le traumatisme des délogés était largement dépendant de la manière dont se passait le premier acte d’un déracinement humain et social, celui du moment de l’évacuation.
Nos constats ont été partagés et reconnus par les hautes instances de l’Etat, comme le Haut Comité au Logement des Personnes Défavorisées.
Nous avons toujours montré une volonté de dialogue, constructif, ouvert, avec les institutions.
Nous dénonçons le manque de formation du personnel de la mairie à la charte de relogement et à la gestion de situations violentes pour les familles et personnes délogées. Certains employés municipaux ont simplement été dépassés par la situation de tension, mais d’autres ont eu des comportements inadmissibles.
Nous exigeons des sanctions immédiates pour ceux-ci et un engagement de formation du personnel municipal.
Nous exigeons simplement que la charte du relogement soit appliquée.
Quand la ville respectera-t-elle le droit, et prendra-t-elle enfin en compte l’humain derrière les procédures ?