L’analyse comportementale au service du contrôle social sur Marseille et Toulouse

Olivier Arsac, adjoint à la sécurité du maire de Toulouse, vient de préciser l’agenda du projet d’installation de « caméras intelligentes » dans les rues de la métropole, déjà dans les cartons depuis 2015. « Notre objectif, c’est d’équiper une centaine de caméras avec ce dispositif moderne que nous sommes en train d’acheter à la société américaine IBM, pour un montant global de 150 000 euros. Dès le mois de juin, ce sont 50 caméras de la ville qui seront concernées. » L’installation du même type de dispositif à Marseille était annoncée il y a quelques semaines par Caroline Pozmentier, adjointe au maire en charge de la Sécurité et de la prévention de la délinquance. Face à l’opacité de ces systèmes, il nous a semblé que quelques éclaircissements s’imposaient.

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Marseille, composante clé de la stratégie de conversion des villes françaises

À Mexico c’est le fleuron militaro-industriel français Thalès qui s’est chargé de déployer le programme Ciudad Segura (ville sûre, encore et toujours), installé en 2010 pour 460 millions de dollars et qui assure comme à Londres l’interconnection entre toutes les caméras municipales ainsi que celles des transports en commun et également les caméras routières permettant l’identification automatique des plaques minéralogiques, ainsi que des caméras embarquées à bord de drones, soit plus de 15000 caméras en tout. Les images en sont traitées en temps réel par cinq centres opérationnels répartis par quartiers, et dont les activités peuvent être au besoin pilotées par un centre de contrôle. Deux centres opérationnels mobiles peuvent également être déployés en supplément.

De retour en France, Marc Darmon un des dirigeants de Thalès a entrepris un travail de lobbying important auprès des collectivités notamment à travers le CICS, "Conseil des Industries de la Confiance et de la Sécurité", qu’il dirige depuis 2014 et dont font également partie Safran et Airbus. Surfant notamment sur la vague sécuritaire enclenchée par les attentats de 2015 à Paris, ce consortium d’entreprises a signé fin 2016 avec le ministère de l’intérieur une « charte de solidarité en situation d’exception » prévoyant la mise à disposition gratuite de moyens matériels « pour soutenir les forces de sécurité engagées dans la lutte contre le terrorisme » par des « entreprises de sécurité qui souhaitent apporter une contribution citoyenne à l’action mise en œuvre par les forces de sécurité »...

Cazeneuve et Gaudin en visite au CSU

Une des conséquences les plus frappantes de ces actions de lobbying efficaces menées par la filière a été la conversion depuis 2012 de la ville de Marseille en laboratoire français du tout-sécuritaire. Mais les plus de 1000 caméras déjà installées et la vingtaine de keufs devant les écrans 24h/24 au Centre de Supervision Urbain du 40 avenue Roger Salengro ne sont qu’une première étape. Un système global de sécurité inspiré par le concept de « Safe City » à la IBM, se mettrait en place graduellement à compter de 2017. Plus de 1000 caméras supplémentaires seraient prévues, et un appel d’offre est en cours pour recruter le prestataire privé à qui le système informatique d’analyse du comportement sera sous-traité. Sans surprise, des rumeurs laissent entendre que Thalès semble bien placé pour le remporter...

Une fois la pieuvre sortie du Vieux-Port, rien de plus facile que de lui ajouter des tentacules étendant la surveillance à de nouveaux secteurs. Les problèmes techniques ayant été surmontés depuis longtemps, il ne s’agira plus que de vaincre les quelques réticences du corps social à se voir contrôler toujours plus. Ely de Travieso, patron de la société Phonesec qui a effectué une étude en amont pour le compte de la Ville, dévoile bien la vision effrayante des tenants d’une telle évolution : "d’abord il faut une seule chaîne de commandement, on ne peut plus avoir deux polices soi-disant complémentaires, ensuite, la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés) doit faciliter le croisement des données afin que l’on puisse utiliser la reconnaissance faciale. D’autre part, il faut que les villes aient le pouvoir sur l’installation des antennes télécoms [...] afin de pouvoir suivre tous les mouvements de GSM sur son territoire. Évidemment, sans aucune personnification ! Il faut aussi utiliser les technologies qui existent, comme celle des Google Glass, et utiliser les lunettes et voitures de citoyens volontaires afin d’y placer des mini-caméras et avoir des yeux partout en ville. Il n’y a rien de fou là-dedans, on est sur la même démarche que l’initiative "voisins vigilants". »

Des yeux dans les rames de métro

Annoncé en grande pompe dans un certain nombre de médias bourgeois, un aperçu du plan de la RTM d’installer 300 caméras dans les rames du métro marseillais... Métro-boulot-vidéo !

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