Le 21 juin dernier, 23 No TAV ont été mis sous contrôle judiciaire (obligation de signer chaque jour à la gendarmerie ou assignation à résidence) par le très politisé parquet de Turin. Ils sont accusés d’avoir participé à une manifestation contre le chantier du TAV le 28 juin 2015. Les mesures liberticides se multiplient depuis quelques années dans la vallée de Susa, mais cette fois certains inculpés ont annoncé publiquement qu’ils ne s’y plieraient pas. Parmi eux, Nicoletta, septuagénaire, a déclaré qu’elle refusait de devenir sa propre geôlière
(un entretien de Nicoletta est disponible ici).
Si deux de ces fiers No TAV sont aujourd’hui en prison, les autres ont vu leurs contrôles diminués, et Nicoletta n’a toujours pas été inquiétée.
C’est alors par la bande que le parquet attaque, en inculpant des No TAV pour d’autres faits. Le 21 juillet dernier, une dizaine de contrôles judiciaires ont été prononcés, mais cette fois l’accusation est liée à une manifestation de soutien au peuple kurde. Et là encore, le refus de s’y soumettre a prévalu sur le silence. Une leçon intéressante à l’heure où les assignations à résidence administratives entrent dans l’arsenal législatif français.
Voici leur communiqué :
Une résistance excessive
Pour la énième fois, le 21 juillet 2016, nous avons été réveillés à l’aube par la police. Cette fois - sur demande du seul procureur Rinaudo - ils voudraient nous obliger à nous présenter au commissariat tous les jours, deux fois par jour, dans le cadre du contrôle judiciaire qu’ils veulent nous imposer pour une action remontant à septembre 2015, au cours de laquelle nous avions visité les bureaux de Turkish Airlines à Caselle (Turin), pour dénoncer la politique terroriste d’Erdogan et exprimer notre soutien à ceux qui, en Turquie et au Kurdistan, continuent à résister et à combattre.
Pour voir la vidéo tournée dans les locaux de la compagnie...
Incroyable mais vrai, cette opération judiciaire a lieu juste au moment où en Turquie tombe une avalanche de purges et d’arrestations de masse. En Italie – comme en Europe – on feint de se scandaliser qu’Erdogan déclare la destitution du Parlement et la suspension de la Convention des droits de l’homme, mais dans le même temps l’État et les carabiniers cherchent à faire taire ceux qui depuis longtemps dénoncent le terrorisme de l’état turc.
Et bien, cette fois-ci nous avons décidé que nous ne nous prêterons pas à ces restrictions de notre liberté. D’abord, parce que – comme c’est expliqué dans la même ordonnance judiciaire – le but est de nous empêcher de réitérer les conduites en question, c’est-à-dire le soutien à la résistance du PKK et à la lutte révolutionnaire au Kurdistan, un soutien qui est aujourd’hui plus nécessaire que jamais. Si jamais il y avait quelque chose à nous reprocher, ce serait de n’avoir pas réussi à faire assez.
Ensuite, parce que c’est aujourd’hui qu’il faut réagir à cette succession de mesures répressives avec lesquelles ils sont en train de tenter d’étouffer les mouvements de lutte : rien qu’entre le Val Susa et Turin, on ne compte plus les gens soumis à des contrôles judiciaires.
Maintenant ça suffit ! Une réponse collective est urgente, chacun selon ses possibilités. Par conséquent, la plus grande partie d’entre nous ne collaborera plus à la limitation de sa propre liberté, et ne se présentera pas au commissariat. Si ils le veulent ils devront assumer la responsabilité de nous traîner en prison. Nous sommes ici, ils savent où nous trouver. S’il le faut nous irons rejoindre ces camarades – Luca et Giuliano – qui déjà sont en train de purger en prison leur refus courageux de se soumettre aux assignations à résidence, et nous saisissons l’occasion pour leur transmettre notre affection/les embrasser très fort. Si ils pensaient nous effrayer, ils se sont trompés lourdement.
Les inculpés et inculpées pour l’irruption dans les locaux de la Turkish airlines
Turin, 22 juillet 2016