Conjointement organisée par Attac Toulouse et les Amis Du Diplo, cette conférence devait se dérouler salle du Sénéchal 17 rue Rémusat, mardi 8 avril.
Informé par des camarades, nous avons immédiatement appelé ces orgas au niveau national. La discussion fût longue, mais la prise de conscience immédiate. Un bon point, les responsables ont immédiatement réagi et la conférence annulée dans la foulée.
Cependant l’Alerte Antifouchiste n’est pas levée pour plusieurs raisons.
D’abord, Jean-Dominique Michel, un fouchiste qui développe publiquement une rhétorique complotiste, fasciste, lgbtphope, islamophobe et antisémite, sera tout de même présent dans la région toulousaine et se produira deux fois en public.
Des dynamiques eugénistes qui traversent la gauche
Ce n’est pas un hasard si les fascistes se sentent à l’aise chez les Amis du Diplo : la porte leur est bien ouverte. On se rappelle qu’il y a peu de temps encore, le Monde Diplomatique a dénoncé « l’excès d’humanisme de ceux qui s’engagent dans la bataille sanitaire » pendant qu’eux-mêmes se faisaient les porte-drapeaux de l’eugénisme de gauche.
Le Diplo a apporté sa contribution à la production industrielle jamais interrompue de papiers antivax et eugénistes de Lundimatin, BLAST, Le souffle de l’info, Reporterre, le média de l’écologie et Mediapart relayant notamment les soutiens de la Great Barrington Déclaration, un texte eugéniste élaboré par les lobbies industriel d’extrême droite US.
Sue Facebook, les lecteurs déçus par cette annulation ne s’y trompe pas, s’étonnant de l’annulation d’une conférence fouchiste alors que le dernier numéro en kiosque laissait deux pleines pages à ces mêmes thèses fouchistes. Que les choses soient claires, c’est loin d’être une dérive isolée, cette énième fouchisterie s’inscrit dans une dynamique de fond, qui traverse une immense majorité de la gauche qui s’est vautrée dans l’eugénisme avec la pandémie de covid.
Au téléphone, on a eu droit à des justifications vaseuses de la part d’ATTAC, qui s’est défaussé sur les Amis Du Diplo. Ces derniers nous ont expliqué que leur responsable local « est en vacances à l’étranger », comme quoi la digue antifasciste ne tient pas sur grand-chose.
Globalement, si tout le monde est très gêné, on n’a senti aucune volonté de s’emparer de ces sujets. Un sentiment qui s’épaissit quand on reçoit un "c’est annulé, merci" par e-mail et qu’on prend connaissance du communiqué public dans lequel il n’y a simplement rien.
La frange de militants conspifascistes des Amis du Diplo pourra toujours se consoler en allant écouter les 6 et 7 avril, à Capens et à Murat à quelques kilomètres au sud de Toulouse, Jean-Dominique Michel. Évoquera-t-il publiquement comme sur ses réseaux sociaux une plandémie « orchestrée par des binationaux juifs israéliens » ? Discutera-t-il du « plan de colonisation de l’Europe par l’islamisme organisée par les loges maçonniques ». Histoire de montrer qu’il connaît ses classiques, Jean-Dominique Michel reviendra peut-être même sur la « composante confessionnelle et ethnique des leaders bolcheviques » – pure propagande nazie des années 30. Ces propos ne sortent pas de nulle part, c’est ce sombre personnage qui les tient lui-même sur Twitter.
Ces deux conférences conspifascistes et bienveillantes sont organisées comme il se doit par une asso de businesseurs œuvrant dans le charlatanisme New Age et les spiritualités en plastique : l’Association REEV. Un exemple de plus, s’il en fallait, de la porosité structurelle du New Age avec les mouvances réactionnaires et l’ultralibéralisme. Il y a d’abord bien sûr le fait que la pensée magique suspend les exigences de cohérence et de commun, ouvrant ainsi un terrain propice à la prolifération des récits complotistes. On connait la suite, on a tous eu des cas concrets dans notre entourage, cette rhétorique est une fabuleuse machine à broyer les individus, à transformer en facho et désactiver les luttes.
Plus globalement, le New Age forme un milieu discursif où la dépolitisation, le relativisme et l’hypervalorisation de l’individu ouvrent la voie à l’absorption de motifs idéologiques d’extrême droite. Dans ce cadre, les rapports de pouvoir, les dominations systémiques, les violences sexuelles et sexistes, l’exploitation capitaliste, deviennent des déséquilibres énergétiques ou des blocages personnels.
En substituant à une compréhension sociale et politique de la santé une vision individualiste fondée sur la responsabilité personnelle, ce mouvement s’aligne avec les logiques du néolibéralisme et réactionnaires.
Pourtant ces discours, ces pratiques, traversent nos milieux, sans que cela ne questionne personne. On assiste à un glissement, un basculement idéologique, ce qui relevait autrefois du commun, de l’organisation collective pour prendre soin, glisse lentement vers une logique individualiste, libérale. Et c’est précisément dans ces brèches que l’extrême droite s’est engouffrée. Pas frontalement, mais en recyclant ces mots, en les déformant juste assez pour diffuser ses idées. Sous couvert de liberté individuelle, on préparait ainsi le terrain à un rejet des solidarités, des droits sociaux, du soin en tant que bien public.
Il plus que temps que nous prenions collectivement conscience que les enjeux de santé, que l’antivalidisme ne sont pas juste de nouveaux fronts de lutte. Il nous faut renverser la perspective. Les enjeux de santé publique et le soin, en tant que pratique et horizon matériel, sont le socle à partir duquel un antifascisme, un anticapitalisme, un féminisme peuvent s’enraciner et s’articuler.
NO FOUCHARAN !
Action Antifouchiste