Paris debout n°3

Voici le numéro 3 du bulletin de lutte Parisien contre la loi Travaille ! et son monde...

Le mouvement contre la loi Travail et son monde a démarré le 9 mars avec une journée nationale de manifestations à l’appel de syndicats dynamisés par le #onvautmieuxqueca. Dès le début, les blocages de lycées et l’agitation dans les facs ont donné une belle énergie au mouvement. Chaque semaine, s’appuyant sur des journées de mobilisation posées par une intersyndicale à la traîne, lycéen-n-es, étudiant-e-s, précaires, intermittent-e-s, chômeur.se.s, salarié.e.s en lutte, pour beaucoup non affiliés à des partis ou des syndicats, se sont retrouvés dans la rue. Le 31 mars, malgré la pluie, on était des centaines de milliers à manifester, et « Nuit debout » a démarré le soir même. Au mois d’avril, le mouvement s’est poursuivi avec une occupation de la place de la République. « Nuit Debout » est devenue un lieu d’échanges et de rencontres, bousculant un peu la forme traditionnelle d’un mouvement social. Les AG réunissant plusieurs centaines de personnes, et les multiples commissions ont constitué pour certain-e-s un espace de paroles politiques, marqué par une volonté d’horizontalité. Pour d’autres, cela a permis de faire avancer les discussions sur le mouvement en cours et ses contours. On y a découvert aussi les limites d’une assemblée générale mouvante, souvent déconnectée du mouvement en cours, coincée au milieu d’un carrefour ultra bétonné et quadrillé de CRS, et qui s’épuise à force de vouloir maintenir un consensus à tout prix. Cela dit, de là sont parties de belles manifs sauvages et autres actions.

En même temps, différents espaces d’or-ganisation se sont mis en place avec pour objectif d’agir en dehors des manifestations : les comités d’actions de la Bourse du tra- vail, l’AG interpro de Saint Denis, l’AG des intermittent.e.s, l’AG féministe non-mixte,
la commission Grève Générale. L’idée est d’intervenir par des actions concrètes contre la Loi « Travaille ». Les blocages économiques se sont alors multipliés:contre les conditions de travail pourries dans les fast-food ( blocage du Macdo, Subway, Quick à Gare du Nord), pour faire perdre de l’argent à des patrons du MEDEF (blocage de l’entreprise DULAC à Saint Denis), contre le travail du dimanche (blocage de la zone commercial Val d’Europe), pour ten- ter d’arrêter les flux économiques (blocage du port de Gennevilliers), pour interrompre le tra- vail et permettre à des salarié.e.s en grève de discuter avec leurs collègues en bloquant leur entreprise (blocage des centres de tris du 92).
Un nouveau temps démarre fin mai avec le début des grèves reconductibles et des blocages à plus grande échelle portés par des syndicats de secteurs stratégiques comme celui des transports et de l’énergie : chemi- nots de la SNCF, salariés de la RATP, routiers, dockers , travailleurs des raffineries, des incinérateurs, et des centrales nucléaires, etc. La restructuration des entreprises publiques amorcées depuis des années, aggrave toujours plus les conditions de travail de ces secteurs traditionnellement plus protégés. S’inscrire dans la lutte contre la Loi Travail signifie pour bon nombre de syndicats s’appuyer sur un rapport de force global pour batailler sur des reven- dications spécifiques en parallèle de la loi travail. Menaces de pénuries d’essence et de paraly- sie des transports ont suffi à ce que le mouve- ment prenne un peu plus d’ampleur dans les esprits. Pourtant, quelle sont les réalités sur le terrain de la grève générale (ou simplement de la grève), et de la convergence des luttes ? Aujourd’hui, même pour les travailleur.se.s les plus garantis, faire grève est difficile. Comment analyser le fait que des salarié.e.s grévistes s’appuient sur des personnes venues de l’extérieur pour bloquer leur entreprise sous peine de mise à pied ? Comment comprendre qu’au sein d’un même secteur, les syndicats ne déposent pas la même date pour une grève reconductible ? Comment lier les différentes luttes entre elles quand on sait qu’il ne suffit pas de les additionner ? Comment aller plus loin qu’un soutien à des « secteurs » en lutte (il s’agit en réalité de salarié.e.s en lutte), et s’appuyer sur ces rencontres pour construire des nouvelles formes de luttes ? Comment réfléchir ce mouvement tout en se battant contre ce qui constitue la Loi et le Travail ?

A lire aussi...