Ce pourrait être l’endroit où l’on se rencontre, s’organise au-delà de nos secteurs de boulot, où l’on apprend ce qui se passe ici ou là.
Ces immenses cortèges devraient semer la panique chez les agents du pouvoir, les bourges devraient trembler devant la farouche détermination de ces marées humaines que seule l’OM semble en mesure de réunir.
Il n’en est rien. Dans ces manifs, le nombre est inversement proportionnel à la force. Faut-il renoncer à faire de la subversion dans les plus grands rassemblements de notre classe à Marseille ? Qui parvient réellement à s’organiser grâce à ces manifs ?
Nous affirmons qu’il n’y a pas de propriété de la manifestation, que son dépassement est nécessaire. Pour vivre, la lutte a besoin de débordements, d’un élargissement. Dans le temps, à revers des stratégies de “temps forts” qui nous affaiblissent, en reprenant la main, à rebours du chrono du travail. Dans l’espace, avec l’invasion de la ville et de ses rues, avec les blocages et les piquets. Enfin dans le dépassement des corporatismes et des revendications qui divisent le prolétariat entre public et privé, entre ceux qui peuvent et ceux qui ne peuvent pas.
Cependant, nous voyons bien que souvent, ce qui se présente comme un dépassement n’est qu’un spectacle. Chacun y fait son petit marché, espère récupérer quelques déçus d’un cortège ou de l’autre. On a vu dans le dernier grand mouvement de la Loi Travail se construire et s’opposer des identités. Or ces séparations entre bons et mauvais manifestants, entre syndicats et casseurs, sont des identités policières et médiatiques. S’y conformer, c’est faire le jeu du pouvoir.
Parce que nous ne voulons pas être les acteurs d’une pièce de théâtre mise en scène par nos ennemis, parce que nous devons nous approprier la manifestation comme un outil réel de lutte et d’organisation, parce qu’on refuse de laisser ce moment collectif se résumer à un vulgaire défilé, on invite tout ce beau monde et d’autres à venir en discuter au local.