Arrivé-e-s sur le rond-point où nous allions commettre notre méfait vers 7h, nous nous sommes réparti-e-s à chaque entrée, nos feuilles volantes à la main. Pendant ce temps-là, la banderole était placée bien en vue des personnes arrivant face au CEA : "Ni loi, ni travail, ni nucléaire". Pendant la première heure de diff, la circulation fut assez fluide, l’accueil plutôt favorable et on ne pouvait pas vraiment constater de tensions de la part des automobilistes. Ce n’est pas durant cette période qu’on a pu voir les cadres arriver dans leurs belles voitures pour aller "travailler", mais plutôt des camionnettes de travailleurs-ses intérimaires et des jeunes stagiaires - nous y reviendrons. Ça, c’était au début.
Au fur et à mesure que les salarié-e-s du centre affluaient, on pouvait observer une double file se former sur le rond-point, en direction de l’entrée du complexe, débordant petit à petit sur les deux voies les plus empruntées pour accéder au rond-point. Au moment où nous commencions à prendre conscience que les ralentissements atteignaient l’arrière de la barrière de péage et impactaient sérieusement la D952 à une voie, les sirènes de gendarmes se firent entendre. Une voiture d’abord, une autre plus tard, encore une un peu après. Heureusement, ils ne firent que la circulation sur le rond-point, où nous avons pu tracter sans être inquiété-e-s, mais non sans être dérangé-e-s. Aux injonctions des flics priant aux conducteurs-rices d’avancer, nous les incitions à désobéir, voire à reculer. Un certain jeu se jouait avec les gendarmes, un peu comme cet ancêtre du jeu vidéo Froggy, où une grenouille doit traverser des voies pour ne pas se faire écraser : changer de voie, rechanger, revenir à l’ancienne... Nous voyions aussi des personnes travaillant au CEA arrivant à pied de l’autoroute, certain-e-s assez serein-e-s, presque heureux-ses de faire ce dernier bout de chemin à pied, d’autres nous insultant copieusement et refusant de prendre les tracts. Nous avons appris ensuite qu’elles s’étaient garées sur la bande d’arrêt d’urgence pour pouvoir arriver plus tôt ! Il y en a qui tiennent vraiment à leur boulot, quitte à se mettre en danger et dans l’illégalité.
Plus l’heure avançait et moins les gendarmes nous laissaient tracter, plus la tension montait chez les automobilistes légèrement à la bourre au taf. On a bien ri quand un cadre dans sa petite Porsche décapotable ne s’arrêtant pas s’est vu balancer des tracts par dessus les portes, et a riposté en s’arrêtant un peu plus loin pour nous les renvoyer bien véner, ses lunettes de vue de marque Porsche valls-ant avec. C’est qu’il a dû descendre pour les récupérer ses lunettes, c’est quand même sympa les cadres qui s’allient avec les bloqueurs-ses, un bel exemple à suivre, messieurs-dames en costume !
Résultat ? Des bouchons importants sur l’autoroute A51 : près de 3 kilomètres d’après nos estimations, 5 d’après la gendarmerie à nos côtés (pour une fois qu’elle dit plus que nous). Près de 3000 exemplaires du texte ont été donnés aux 5000 travailleurs-euses, dont une bonne partie de sous-traitant-e-s et de précaires, qui embauchent tous les jours sur ce site de recherche nucléaire.