Faire face à une inhumanité grandissante
dans une chronologie événementielle désespérante
Dale Nathalie
vendredi 31 janvier 2014 - Mardi 31 janvier 2017
En mémoire de Dale Nathalie
Victime d’un engrenage institutionnel
Il y a tout dans un geste comme il est exprimé par le poète Québécois Wilfrid Lemoin (1927-2003) : « La réalité est-elle plus entière dans le geste que l’on pose ou dans celui que l’on retient ? »
Il y a tout juste trois ans, jour pour jour, Nathalie n’est plus là. Elle n’a pas choisi un tel destin ni imaginé de telles horreurs les plus crues, dans un pays qu’elle aimait en dépit de l’extinction de son idéal et la poussée de son inhumanité grandissante érigée en système de référence pour le commun des vulnérables et des fragiles. Les pauvres, les exclus et les malades peuvent seulement être légitimement pris pour cible par des lois répressives comme le cas de Nathalie mais les tuer par des « médicaments » au nom de « soins » n’est jamais un crime et le plus souvent, ce n’est même pas considéré comme un délit. Les transformer en mendiants dans la rue, affamés dans une société d’abondance au nom de « la protection juridique des majeurs » dans ses deux faces, tutelle et curatelle, fonction déléguée à un système de dépossession et de prédation bien identifié et détaillé dans plusieurs recherches et investigations accablantes (1) démontrant l’escroquerie qu’elle recouvre.
La nonchalance quotidienne de ceux qui se tiennent à quelques mètres d’un crime en train d’être commis peut certainement être compris comme une manifestation de ce que Hannah Arendt a appelé la banalité du mal. (2)
Ce sont les traitements médicamenteux prescrits en surdose aux effets secondaires dévastateurs imposés et les pressions psychologiques dégradantes qui ont créé des « altérations » du fonctionnement cognitif de Nathalie. Elle a été terrorisée par des mesures d’hospitalisation sans consentement jusqu’à sa destruction totale le 31 janvier 2014, de mise sous curatelle conjuguée à un acte terrifiant, l’enlèvement de son enfant immédiatement après l’accouchement. Même une femelle animale perd son équilibre quand son petit disparaît.
Les pratiques de la psychiatre et de son équipe en lien avec la « justice » et la préfecture ont été menées dans une technologie furtive. Nathalie n’a rien perçu et pourtant, tout se faisait devant elle et aussi devant moi en tant que partenaire.
Lundi 27 janvier 2014
Le souvenir de son dernier cri de secours enregistré dans mes neurones et dans le répondeur de mon appareil de téléphone mobile de première génération le 27 janvier 2014 dans un après-midi pas comme les autres n’a pas encore pris de ride. J’étais pris dans des démarches auprès des services concernés pour faire valoir ses droits fondamentaux auxquels elle était si attachée comme citoyenne consciente de son identité. Mon appareil était sur le mode silencieux comme d’habitude. Je n’aime pas la sonnerie des gadgets et non plus les téléphones mobiles quand je suis en action. J’active la messagerie juste après quelques minutes courtes sachant d’avance que c’était Nathalie. J’écoute attentivement le message laissé dans une voix différente, lente et annonciatrice d’une mort inexorable sans pour autant avoir le temps pour penser qu’elle était ainsi : « Mhamed ! Appelle moiii !Aide moiii ! Je suis crevée. ». J’ai mis plusieurs « i » et plusieurs « e » parce que c’était comme je l’entends maintenant.
Effrayé et secoué dans tous les sens, mais vigilant face à son état de santé inquiétant, je prends mon portable et j’appelle : « Allo Nathalie ! C’est moi ! Ça va ! J’arrive dans une heure. ». La victime répondait dans une voix qui me rassure un peu : « Oui ça va ! Tu ne viens pas s’il te plaît. Je me sens bien. J’avais mal au cœur mais maintenant ça va. S’il y a un problème, je t’appelle. ».
Je suis loin, je rentre chez moi avec un ami qui la connaissait très bien. Le soir, j’appelle Nathalie plusieurs fois pour la rassurer et l’accompagner dans des petites discussions de soutien. Elle insiste pour que je monte mercredi 29 janvier 2014 pour réparer la serrure de la porte de son appartement et lui ramener des crevettes, du café et du lait. Son argent de vie se trouvait dans la poche de la mandataire, une soi-disant déléguée de la « protection juridique des majeurs ».
Je maintenais la communication avec Nathalie toute la journée du 28 janvier 2014 pour anticiper le pire. J’intervenais auprès de l’organisme de la gestion de son appartement dont le siège est situé à Marseille (13 Habitat) pour une intervention de réparation de la serrure.
Le soir, j’appelais Nathalie jusqu’à 20h pour m’assurer de son état de santé. Jusque-là, tout va bien, moins d’inquiétude mais des pressentiments pèsent sur mon fonctionnement.
Mercredi 29 janvier 2014
Je suis chez Nathalie toute la journée. Je lui ai ramené des cigarettes, des courses, crevettes, fromage, lait, boisson, café, etc. Je passe toute la journée chez elle, à faire le ménage, ranger ses vêtements, les mettre dans des cartons et des sacs pour qu’elle vienne s’installer définitivement chez moi. J’ai fait un plan avec elle : quitter définitivement Aix-en-Provence vendredi 31 janvier 2014 pour s’installer chez moi après avoir mis les meubles nécessaires dans l’appartement que j’ai loué vide. Elle était très contente après avoir bien aménagé son espace en attendant une autre alternative. Elle était très contente de reprendre ses activités artistiques dans des ateliers à Marseille et suivre une formation professionnelle pour avoir un emploi à mi-temps qui lui convenait. Elle aimait travailler dans une librairie ou une bibliothèque. C’était un bon projet pour son rétablissement social et sanitaire, détruit par ce système de stigmatisation administré par la psychiatre de Montperrin et codifié dans ses diagnostics, rétablissement mis à mal dans une nouvelle identité personnelle soi-disant intégrative donnée par la justice de son pays qui la catégorisait de « incapable » par le mécanisme de la « protection juridique des majeurs », fonction déléguée à une association dont le nom fait froid dans le dos : Association Société d’Hygiène Mentale (A-SHM). Avez-vous entendu ce nom ? Une appellation synonyme de l’horreur d’un autre siècle. Celle-ci, par ses pratiques défectueuses et ses implications conscientes dans le processus de la destruction de Nathalie n’est qu’une représentation d’un système de prédation soutenu que j’ai découvert petit à petit.
Elle était très contente de reprendre une psychothérapie différente de la précédente, qui devait mettre un terme à cette surmédication qui l’a empoisonnée jusqu’à la dernière seconde de sa vie, terminée dans un étouffement fatal. Voir le certificat de décès établi le 3 février 2014 par le service de la médecine légale. (3)
Jeudi 30 janvier 2014
Tôt le matin, Nathalie m’appelle. « Mhamed ! Je vais sortir vendre mes vêtements dans une boutique. J’ai besoin d’argent ». Je l’appelle : « Tu prends le train et tu descends. Tu sais comment ça marche. Juste 20 mn. Tu veux que je monte ? Non ! Je viendrai demain vendredi 31 janvier. Tu viens me chercher à la gare Saint Charles. D’accord. Si tu ne te sens pas bien tu m’appelles pour venir. Oui. ».
L’après-midi, j’appelle encore le service du logement pour le relancer dans la réparation de la serrure, un système complexe défaillant. La porte ne se ferme pas, le risque est grand de subir l’inimaginable. Et pourtant, cet organisme surtout son antenne d’Aix-en-Provence avait toutes les informations écrites sur son état de santé et sur l’insécurité et le danger provenant d’une partie des voisins locataires du même organisme. Des monstres violents aux comportements imprévisibles contre qui j’avais déposé des mains courantes et remis un rapport détaillé le 14 mars 2011 auprès de la préfecture qui l’a contraint à une hospitalisation sans consentement du 19 octobre 2010 au 19 janvier 2011, sans compter les soins imposés jusqu’à sa liquidation physique le 31 janvier 2014.
Le soir, j’appelai Nathalie de chez moi en présence d’un ami témoin jusqu’à 20h12 mn. J’insistai auprès d’elle pour venir le matin du vendredi 31 janvier chez moi pour un rendez-vous avec Mme Marie- Arlette Carlotti, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap et de la lutte contre l’exclusion, pour tenter de faire valoir ses droits. « Tu la verras. Elle est très gentille. C’est vrai ! Je vais la voir ? Bien sûr. Génial. ». C’était la dernière communication, en ce 30 janvier 2014 à 20h12.
La dernière fois que j’ai entendu la voix de Nathalie, à 20h12 mn : « Merci Mhamed ! Je vais dormir tout de suite. A demain. Tu viens me chercher à la gare Saint Charles. J’aime bien la terrasse de cette gare. Tu m’offres un cappuccino. Bonne nuit. »
Vendredi 31 janvier 2014
C’était une habitude de recevoir tôt le matin des appels de Nathalie chaque fois que je ne suis pas chez elle. Elle était une fidèle aux temps du matin avec ses fraîcheurs et le parfum du café qu’elle préparait à 6h00 dans la cuisine, accompagnée d’une musique bien choisie, Francis Cabrel, Jacques Brel, Beethoven, Jean-Jacques Goldman, du classique et des paroles poétiques. Son poste radio est quasiment programmé sur France Culture. C’était ça Nathalie. Où est-elle cette altération cognitive et cette schizophrénie codifiée par la soi-disant psychiatre de Montperrin ?
Ce matin, je me suis réveillé un peu tard, vers 9h00. Je vérifiai mon portable. Aucun appel de Nathalie. Je me demandais si elle était déjà partie d’Aix-en-Provence, si elle était dans le train. Je l’appelle une fois, pas de réponse. Son téléphone sonne mais rien. Après cinq minutes, je la rappelle sur son portable, toujours pas de réponse. Je refais l’opération plusieurs fois jusqu’à midi. Rien.
Je commence à m’inquiéter.
A 14h00. Je suis déjà au RDV avec Mme Carlotti Boulevard Baille engagé dans une campagne contre la pollution à Marseille due aux circulations des voitures. J’appelle Nathalie de mon portable. Rien. Je refais les opérations jusqu’à 15h00 sans arrêts. Mon cœur bat anormalement. Un ami qui est avec moi et Mme Carlotti perçoivent mes inquiétudes et mon angoisse. « Ça va Mohamed ! Non ! Je suis inquiet, très inquiet. Nathalie ne répond plus, je pense que quelque chose de mauvais à entendre est arrivé. Je pense que Nathalie est morte. Non ! Ne t’inquiète pas ». Je réfléchis à comment agir. J’appelle une voisine de Nathalie vers 15h30, la seule qui est sympathique. Elle habite en face de chez elle. « Allô « H » ! C’est Mhamed ! Oui, bonjour Mhamed ! Ça va ? « H » ! S’il te plaît « H » ! Tu passes chez Nathalie tout de suite si elle est chez elle. Je l’ai appelé toute la journée mais injoignable. Ok. Je passe maintenant ». Elle rentre et me dis : « Mhamed ! La porte n’est pas fermée. Oui je le sais, j’ai appelé l’organisme pour la réparer. Mhamed ! Tout est allumé dans son appartement. Elle n’est pas là Nathalie. « H » ! Oui. S’il te plaît : Rentre dans la chambre où elle dort. OK. Mhamed ! Oui ! Nathalie est par terre. Elle est bleue, elle est morte. Mhamed ! Nathalie est morte. Elle a de la mousse dans sa bouche. »
La course contre la montre pour la sauver des griffes de la psychiatrie et de la curatelle s’arrête là. J’aurai aimé être plus rapide que la vitesse de la lumière pendant ses derniers jours pour avoir d’excellentes chances d’échapper au processus de destruction mais ces processus ont été plus rapides et plus violents.
La suite est dans ce lien :
http://cvjn.over-blog.com/2015/10/dale-nathalie-une-lutte-pour-la-dignite.html
Faire face. Comment ?
Les digues que j’ai construites avec les moyens du bord pour empêcher la violence du torrent psychiatrique et sociojudicaire d’emporter Nathalie ont, bon an mal an, résisté jusqu’au 30 janvier 2014 à 20h12 mn. Les acteurs institutionnels et des services concernés savaient sans aucun doute comment l’enchaînement torrentiel et dramatique des situations était irréversible et qu’il pourrait être stoppé par seulement un geste, un petit geste avec un supplément d’humanité mais ils faisaient comme si tout allait dans le bon sens, leur sens à eux, le sens de leur culture institutionnelle, transformée en une ingénierie de mesures totalement inhumaines où l’on préfère préserver un système de normes mortifères présenté comme des illusions qui voilent un triptyque bradé : Liberté – Égalité – Fraternité. Voir le courrier adressé au service de la protection juridique des majeurs le 07 octobre 2013, quelque mois avant sa mort. Voir le courrier adressé au député Denys Robiliard chargé de la mission d’information sur l’hospitalisation sans consentement le 28 décembre 2014 à 14h 47, juste 33 jours avant sa mort. (4)
La victime croyait à toutes ces démarches parce qu’elle faisait confiance aux institutions de son pays. Elle attendait seulement une réponse qu’elle existait, parce qu’elle votait à toutes les élections et qu’elle est Française de cœur et d’esprit.
La réponse a été violente parce qu’elle a été formulée dans un silence terrifiant et un oubli volontaire au-delà de toute imagination.
Nathalie avait-elle le droit d’exister dans cette société où partout le triptyque s’affiche ? « Sur cette terre, il y a ce qui vaille qu’on vive ». Mahmoud Darwich, poète Palestinien (1941-2008).
Nathalie avait-elle raison de faire confiance aux institutions de son pays ?
« La méfiance est toujours pour moi une des formes de l’intelligence. La confiance une des formes de la bêtise ». Disait Paul Léautaud (1872-1956). Plus que vrai. Une valeur bien instituée dans les pratiques délirantes des institutionnels, symptomatique de la valorisation des inversions perverses dans cette société ravagée par la médiocrité et l’ignorance.
La violence des interactions des trois pôles du triangle institutionnel, triangle de la mort (Préfecture avec son arrêté du 18 octobre 2010, la psychiatrie avec un acharnement médicamenteux dangereux accompagné d’un système de dégradation et d’anéantissement de sa dignité et la justice avec des mesures de curatelle synonyme de dépossession, dépossession de son enfant et amputation sans arrêt de ses maigres allocations), a été foudroyante pour la vie de la victime.
« Il faut vivre pour comprendre ». Disait Germaine Tillion (1907-2008). Le lien ici :https://www.mondediplomatique.fr/2009/04/TILLION/17026
Je ne pourrai pas faire abstraction de mon étonnement et de mes indignations de ces synergies institutionnelles mortifères. Il m’a fallu une plongée en apnée pour comprendre comment en dépit des alertes et signalements en direction de ces trois pôles et au-delà d’eux à tous les étages de responsabilité de la puissance publique, aucun n’a pris une initiative, aussi minime qu’elle soit, pour néanmoins manifester avec un geste, donner une chance à la victime. Il y a tout dans un geste comme il est exprimé par le poète Québecois Wilfrid Lemoin (1927-2003) : « La réalité est-elle plus entière dans le geste que l’on pose ou dans celui que l’on retient ? ». N’est-il pas étrange de voir celui-ci traité dans ce système comme un délit ?
Je n’épargne pas les soi-disant associations de soutien des personnes victimes des injustices, la LDH, ALM13, les élus, les imposteurs de la soi-disant gauche et ses variantes d’Aix-en-Provence, infectées par le virus de trahison des vulnérables et des exclus. Et pourtant, ils osent parler en leur nom. Une escroquerie intellectuelle et sociale de taille XXL. Il y a quelque chose de pourri dans cette ville.
C’est là que j’ai compris que la collusion entre ces trois pôles parle d’elle-même, soutenue par la passivité de la plus grande majorité des Français.
Mes recherches initiales à partir du cas de Nathalie m’ont permis de découvrir et de constater l’existence d’un vaste domaine dans lequel l’articulation stratégique entre la psychiatrie, la justice et le politique est plus que réelle. Elle est terrifiante pour la société elle-même, pour son devenir. Elle est symptomatique d’une inhumanité grandissante. L’inscription du cas de Nathalie dans une signification globale de ces horreurs institutionnelles et sociétales s’impose d’elle-même. Je n’avais aucune connaissance de cette toile furtive conçue depuis longtemps pour piéger et dévorer au nom des « soins » et de « la protection ».
Je venais de loin, du Maroc où mes racines culturelles et sociales sont bien arrosées par le meilleur jus de l’humanité, de solidarité, de la confiance et de l’honneur. J’ai découvert la France à l’âge de 13 ans quand j’étais au collège dans les montagnes du Rif. Je l’ai découvert dans les livres. Je me rappelle comme si c’était aujourd’hui, je me rappelle du premier livre en français que j’ai acheté, Le Germinal d’Émile Zola. Je l’ai lu plusieurs fois sous les arbres dans la forêt devant mes chèvres, mon âne et mon chien. Puis, j’ai redécouvert la France avec le livre de Victor Hugo, Les Misérables. La suite sera construite tout au long de mon parcours secondaire et supérieur au Maroc et ici en France dans mes formations doctorales en dépit des harcèlements et des pressions administratives exercées systématiquement par les services de la préfecture et le service administratif de l’université contre des étudiants chercheurs étranger hors l’Union Européenne. Ils ne sont pas les bienvenues dans ce pays en dépit de leur compétence et de leur différence dans la manière de s’y prendre et de voir.
Mes lectures et mes recherches ont été un pont qui m’a permis de découvrir que je ne suis pas le seul à témoigner de ces horreurs. Je suis devenu un simple confirmant de ce qui est déjà là et de ce qui est fait dans la souffrance et le deuil qui ne se termine jamais. Je suis un de plus qui ne pourrait pas faire abstraction de vingt ans de lien avec une citoyenne de qualité broyée par les mâchoires des institutions de son pays à l’âge de 43 ans. Je témoigne pour elle, je croyais qu’elle était la seule qui avait subi ce sort horrible dans un pays de droits de l’homme. Non ! Il y a le pire qui fait trembler. Il est dans les témoignages des victimes et de leurs proches. Il est dans le récit des survivants de la psychiatrie. Il est là où des collectifs et des associations sont engagés pour se battre contre ces pratiques, contre ce mal absolu.
Je suis terrifié par les témoignages du Collectif National des Victimes de la Psychiatrie. Le lien ici
Je suis consterné et stupéfait des témoignages et contenus publiés par l’association Neptune - Information, recherche, entraide, action - ’maladies’ psychiques. Le lien ici :
http://www.forumpsy.net/ qui mène un combat dans un esprit de haute facture intellectuelle. Il y a aussi un travail de grande qualité intellectuelle et humaine menée par le Centre de Réflexion et de Proposition d’Actions sur la Psychiatrie (CRPA) depuis plusieurs années. Le lien ici
En même temps, je suis satisfait et content de voir un nouveau-né à Marseille, il y a juste quelques semaines. Une association animée par des personnes avec des expériences différentes dans la lutte pour faire face aux horreurs de la psychiatrie. Des survivants bien engagés dans le processus de rétablissement social et sanitaire dans une alternative humaine et conviviale : PADUP2 :
« Pour l’accès et la défense des droits des personnes directement concernées par des troubles psychiques et/ ou des personnes directement concernées par l’usage de produits psycho-actifs.
Ce que j’ai compris du cas de Nathalie
La psychiatrie est une arme de destruction massive soutenue et entretenue par la politique du contrôle fortifiée par des logiques institutionnelles symptomatiques des représentations mentales et sociales collectives. Les soi-disant sciences médicales et sociales sont les leviers qui "légitiment" cette destruction au nom de la recherche et des "soins". Dans la réalité de leur fonctionnement et leur paradigme, elles contribuent efficacement à imposer des normes pour servir des logiques d’homogénéisation par peur de voir la différence surgir et remettre en question leurs fondements sociaux et idéologiques, voire civilisationnels. C’est pourquoi Stanislas Tomkiewicz (1999) avait tout à fait raison quand il a dit : "Le bon psychiatre est celui qui ne fait pas ce que dit la psychiatrie ». Cette entreprise inhumaine ne fonctionne pas de manière indépendante aux autres contraintes institutionnelles. La conjugaison entre la psychiatrie et la justice fonctionne à bon escient. Dans le premier cas, les logiques du réductionnisme de tout individu psychiatrisé par le mécanisme des diagnostics source d’interrogations sur leur validité impliquent nécessairement l’intervention de la justice par des procédures des mesures sous tutelle ou curatelle, forme de dépossession matérielle et familiale pour motif d’"incapacité". L’intervention de la puissance publique par son fameux organe, la préfecture pour contraindre par force l’hospitalisation de la victime justifiée par une conception de la sécurité dénuée de toute référence au réel.
La triangulation des opérations concoctées contre Nathalie (Préfecture – Psychiatrie – Justice) sans aucun élément didactique est symptomatique d’une extinction cérébrale et psychologique des acteurs de chaque pôle. L’acte prémédité de tuer une innocente sur ordonnance et sur la base d’un arrêté appuyé sur un diagnostic bidouillé est une expression flagrante d’une logique constante et macabre. Un homicide dont les motivations sont clairement volontaires. Cette entreprise institutionnelle complexe est à la fois illégitime mais aussi chargée de conséquences graves pour la victime. En dépit de ses appels à l’aide et de mes interventions dans toutes les directions, l’exécution de Nathalie par les acteurs de ce triangle est l’ultime sommet de la maltraitance des personnes psychiatrisées. Cependant, la maltraitance psychiatrique dans ses différentes formes n’est pas encore décrite. Si l’on se réfère à l’échelle Richter de 2 à 10°, nous trouvons que 2° est insensible dans le tremblement, 5°, pourrait provoquer des dégâts sérieux dans les constructions. 10° n’est pas encore décrite. Le cas de Nathalie a déjà dépassé le 10° après de violentes secousses physiques et psychologiques sans interruption pendant plusieurs années, et surtout du 19 octobre 2010 au 31 janvier 2014.
Derrière chaque mesure d’hospitalisation psychiatrique sans consentement, il y a un crime soutenu par les acteurs institutionnels au nom de "soins" et de "sécurité". En dehors de la perspective "théorico-idéologique" dans laquelle on peut situer la psychiatrie conventionnelle, celle-ci ne pourrait jamais admettre des facteurs d’ordre matériel et socio-économique comme déterminants dans le processus de la dégradation de l’existence de la personne. Son approche réductionniste du fonctionnement cognitif global et complexe de tout individu soumis à des diagnostics dans des paradigmes obsolètes est symptomatique d’une discipline pseudo-scientifique née malade. La justification de l’hospitalisation psychiatrique sans consentement ou sous contrainte, qu’elle soit motivée par l’idée ou de sécurité par les acteurs institutionnels concernés ou par un danger imprévisible est un leurre. La vérité interdite qu’on refuse de dire ou d’entendre sur le lien entre la psychiatrie et l’ordre de la société est aussi symptomatique des représentation sociales et culturelles collectives sur ce qui dérange et remet en question les normes dominantes sur la manière d’être et d’exister. Il y a la peur de la différence, de l’hétérogène, de ce qui se distingue et de percevoir et voir.
Les mesures d’hospitalisation sous contrainte des personnes "accusées" de dangereux par les pouvoirs publics sont, dans beaucoup des cas, génératrices d’excellentes chances pour destruction totale des victimes. J’ai déjà écrit et parlé du cas de ma compagne Nathalie, victime de ces horreurs à Aix-en-Provence. Il y tout juste 3 ans jour pour jour qu’elle est morte le 31 janvier 2014 suite à cette mesure criminelle. Elle n’avait que 43 ans.
Dans son célèbre texte, Stanislas Tomkiewicz (1999) disait : "J’avais avec tous jeunes une meilleure relation que la plupart de mes collègues. Leur souffrance psychologique, leur façon de voir la vie, de dire souvent les vérités qu’on ne veut pas entendre, me touchait. Je me souviens ainsi d’un schizophrène, un garçon de dix sept ans qui, pour la fête de service, avait proposé le portrait suivant du patron : "Ce qui caractérise le professeur Michaux, c’est qu’il a peur des malades." C’était une vision extraordinaire juste. J’ai compris qu’on appelle fréquemment schizophrènes les patients qui énoncent les vérités qui ne sont pas bonnes à dire". PP83-84. Dans l’adolescence Volée. Ed., Calmann-Lévy.
Il y a aussi l’idée de souffrance que les institutions ne veulent pas entendre, pire, elle la refuse alors qu’elle est une réalité humaine. Même les animaux sont conscients de leur souffrance.
Ce qui m’intéresse à dire en mémoire de Nathalie et de toutes les victimes de la psychiatrie et de tutelle et curatelle c’est le fleuve des vies qui se poursuit dans les souffrances à l’écart des médias et dans un silence violent des acteurs politiques engagés dans des discours aux fondements furtifs. Il s’est passé beaucoup de choses de 2014 à 2017 même dans son début, souvent invisibles dans ces médias, sans pour autant ces événements tragiques soient anodins. La thermopolitique n’a pas dégeler le monstre glacial. Et pourtant, il est tant d’envoyer des messages durs, plus durs aux politiques et aux responsables logés dans toutes les hiérarchies et les centres de décision pour qu’ils prennent conscience des dégâts causés aux personnes vulnérables par la psychiatrie et la tutelle et curatelle. Il y a des victimes, beaucoup de victimes qui aurait pu être sauvées si une écoute et un geste avaient lieu dans le bon moment. Des proches qui ont tout perdu dans leur engagement pour les sauver. Ils ont pris des risques en dépit des conséquences personnelles et professionnelles. Il n’y a pas de fatalité. Tout est possible quand la volonté est inscrite dans l’optimisme de l’action humaine. Ce serait une lâcheté collective de les laisser souffrir dans l’indifférence totale.
En mémoire de Nathalie
Née le 21 mai 1970
Morte le 31 janvier 2014 suite aux traitements médicamenteux imposés de 18 octobre 2010 jusqu’à sa destruction totale à l’âge de 43 ans à Aix-en-Provence
La psychiatrie n’a jamais fait partie de mes pratiques sociales de référence et n’en fera jamais partie.
Le savoir acquis dans un pays étranger peut être une patrie et l’ignorance peut être un exil vécu dans son propre pays,
(1)
Valérie Labrousse. LES DEPOSSEDES. Enquête sur la mafia des tutelles. Ed., Du Moment. 2014
Frank Hagenbucher. Lettre ouverte à un tu(t)eur professionnel. Édition L’Harmattan. 2010
Frank Hagenbucher. Nos aînés entre tutelle et canicule. Édition l’Harmattan. 2006
(2)
Hannah Arendt, Eichmann à Jérusalem. Rapport sur la banalité du mal, traduction française A. Guérin, Paris, Gallimard, 1966 ; éd. poche, Paris, Gallimard, 1991, coll. "Folio", 1991.
(3)
Certificat de décès
(4)
Rapport à Denys Robiliard posté le 28 décembre à 14h 74
Germaine Tillion (1907-2008). Le lien ici : https://www.monde-diplomatique.fr/2009/04/TILLION/17026
Stanislas Tomkiewicz. (1999). L’adolescence volée. Ed., LEVY-CALMANN
M’hamed EL Yagoubi
Compagnon de Nathalie
Collectif Vérité et Justice pour Nathalie
www.cvjn.over-blog.com
Mardi 31 janvier 2017
Marseille
France