SOS : encore un nouveau "complexe culturel" à Marseille

Lundi 8 octobre, au conseil municipal de Marseille, sera discuté le processus d’attribution du fort d’Entrecasteaux, ce grand bâtiment près du Vieux Port, destiné à devenir une grande infrastructure culturelle (encore une !). Il est prévu que le lieu soit attribué au "groupe SOS", qui se décrit lui-même comme une structure "d’innovation sociale" de "l’économie sociale et solidaire". Cet article revient sur le projet en cours, et sur le groupe qui le porte.

Le 6 octobre 2018, un article de la presse locale se félicite de la probable ré-ouverture des portes du fort d’Entrecasteaux. Le fort d’Entrecasteaux, c’est ce grand bâtiment en pierres qui surplombe le Vieux Port.

Le site appartient à la ville de Marseille depuis 2010,et lundi 8 octobre, en conseil municipal, sera votée la décision d’en laisser la gestion et le développement à la structure "groupe SOS".

Le projet de la ville est, une fois de plus, gigantesque, et s’adresse, une fois de plus, à une partie bien spécifique de la population. Il s’agit d’y ouvrir "un café culturel, un bar, des lieux de restauration, une brasserie, un drugstore et même une microferme où seront cultivés des produits locaux" [1]. Le lieu est par ailleurs destiné à devenir un lieu d’art contemporain, d’expositions de "structures monumentales" et "d’œuvres participatives", et y sera installé un "espace de réalité virtuelle permettant d’explorer l’histoire du fort".

On retrouve ici les grands invariants du discours de la ville depuis Marseille 2013, capitale de la culture. Il s’agit de faire de Marseille une ville vendeuse car artistique, alternative, à l’image de ce qui était dit de Berlin il y a quelques années : "pauvre, mais sexy".
Depuis 2013, on a ainsi pu voir fleurir les projets participatifs, les projets "quartiers créatifs", les installations d’art contemporain visant à reproduire des trajectoires de migrant-e-s dans la cour de la friche de la belle de mai, les expositions de street art et de graff dans d’anciens squat que la police vient à peine d’expulser, des espaces ouverts aux habitant-e-s seulement pendant la durée d’une exposition, alors qu’il n’y a aucun espace vert ouvert dans le quartier...
Le fort d’Entrecasteaux sera donc un espace culturel de plus. Cette fois-ci, il n’est pas destiné à alimenter le côté "alternatif" de la politique culturelle de la ville. Il sera clairement à destination des populations les plus aisées, et des touristes qui se seraient lassés des terrasses du port.

photo prise après une action à Paris

En plus d’être écœuré-e-s de ce trop plein d’alternatif subventionné, de culture légitime et bourgeoise, de "créativité" et "d’innovation", on souhaitait ici donner quelques infos sur qui est le futur repreneur de cet espace.

Le "groupe SOS" est un mastodonte de l’action sociale, de "l’économie sociale et solidaire", qui petit à petit rattache à lui de nombreuses associations, des maisons de retraites, des centres d’hébergements. Dirigé par un proche de Macron, le groupe génère 650 millions de chiffre d’affaires sur une année.
Il rachète petit à petit toutes les structures vacillantes ou déficitaires, et s’étend dans des champs d’action de plus en plus large, allant de la culture au médico-social. En février 2017, le journal Le Ravi avait consacré un article au développement du groupe, et à ses pratiques ultra capitalistes.
Les conditions de travail des salarié-e-s sont régulièrement dénoncées, aux prud’hommes comme dans des témoignages relayés par la presse.

Le groupe SOS est par ailleurs une des associations qui collabore activement avec la politique de chasse aux migrant-e-s mise en place par l’Etat. Ils ont participé aux discussions sur la circulaire Collomb. En février 2014, leurs locaux parisiens ont été occupés par la commission mobilisation du travail social.

Ce seront donc désormais eux les gestionnaires du fort D’entrecasteaux, et leur extension à Marseille semble aussi rapide que discrète.

Alors on souhaitait relayer l’information, et dire et redire qu’elle a beau être "sociale et solidaire", l’économie, c’est l’économie. Et qu’associatif ou non, un patron est un patron.

Notes :

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